En prononçant jeudi un discours «solennel» sur le Proche-Orient, M. Bush a replacé la diplomatie américaine sur le devant de la scène et relégué l'UE, dont les efforts ont été ignorés par Israël, à un rôle secondaire. Vendredi, l'envoyé spécial le général Anthonny Zinni a rencontré le président Arafat pendant 1h30. Après de nombreuses rumeurs, George W. Bush a officiellement annoncé jeudi l'envoi, la semaine prochaine, de son secrétaire d'Etat Colin Powell au Proche-Orient. Tout en ayant, au passage, fustigé Yasser Arafat, qu'il a accusé d'avoir «trahi les espoirs de son peuple», le président américain a fini par exhorter Israël de mettre un terme à son offensive militaire et de retirer ses troupes. Sans toutefois se risquer à donner un délai au gouvernement Sharon. Ce dernier a d'ailleurs saisi l'occasion pour accélérer les opérations tout en permettant à l'émissaire américain Anthony Zinni de rencontrer Yasser Arafat. Les deux hommes ont pu s'entretenir dans le QG du dirigeant palestinien vendredi après-midi, pour la première fois depuis le siège de la ville, il y a une semaine, sur les « moyens d'appliquer les recommandations des plans Tenet et Mitchell ». Une faveur accordée à la diplomatie américaine dont n'a pas bénéficié la délégation européenne, pourtant de haut niveau, arrivée jeudi matin dans la région. Javier Solana, diplomate en chef des Quinze, et Josep Piqué, ministre espagnol des affaires étrangères, s'étaient en effet vu refuser une telle rencontre par l'Etat hébreu. Un soufflet diplomatique qui a précipité le départ des Européens sans qu'ils ne voient un seul responsable de l'Autorité. « Les Palestiniens avaient décidé que si nous ne pouvions pas voir Arafat, ils ne fourniraient pas d'autre interlocuteur afin de marquer leur protestation contre l'isolement de Yasser Arafat», a expliqué la porte-parole de la commission européenne, Emma Udwin. «Je ne pense pas que ce soit le moment de considérer que l'amour propre soit la chose la plus importante », a-t-elle ajouté. Reléguée au rôle d'observateur par Ariel Sharon, l'Union européenne a donc dû se contenter vendredi de saluer le retour de la diplomatie américaine. Washington a d'ailleurs déjà fait part de son intention de continuer à travailler avec Yasser Arafat, que Colin Powell rencontrera, même si les propos du M. Bush sur le dirigeant palestinien ont été vivement critiqués. Quelques heures après son discours, le chef de la Maison blanche a par ailleurs reçu le soutien du Conseil de sécurité de l'ONU. Celui-ci a voté une nouvelle résolution, la troisième en l'espace d'un mois et la première approuvée par la Syrie, qui exige l'application «sans délai » de la résolution 1402, adoptée samedi dernier. Le Conseil a appelé à la conclusion d'un «cessez-le-feu significatif » et à un retrait israélien de toutes les villes palestiniennes réoccupées. Il a enfin décidé d'appuyer la mission de Colin Powell ainsi que les efforts des émissaires de la Russie, de l'Union européenne et de l'ONU pour déboucher sur «une paix complète, juste et durable au Proche-Orient». Réagissant au vote, le représentant palestinien Nasser al-Kidoua a déclaré jeudi espérer que la résolution « aidera la situation et qu'Israël tiendra compte de la voix unanime de la communauté internationale ». Avant le vote du Conseil, le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan avait quant à lui prévenu Israël que c'était « une grave erreur de la part du plus puissant de penser que la force seule finira par assujettir le plus faible». Il avait également demandé à l'Etat hébreu de laisser les émissaires des Nations-Unies, de l'UE et de la Russie rencontrer Arafat. L'idée relancée par Paris sur l'envoi d'une force internationale d'interposition dans la région, est quant à elle une nouvelle fois passée à la trappe.