L'augmentation importante des prix du pétrole menace sérieusement les projets des constructeurs automobiles sur le segment des SUV (4X4) en Europe, un marché de niche considéré jusqu'ici comme particulièrement prometteur. Les Sport Utility Vehicles (SUV), très recherchés au sein des pays d'Europe de l'Est et en Russie, ont constitué un relais de croissance sur des marchés européens matures et une opportunité pour les constructeurs d'améliorer leurs marges. A ce jour, ces automobiles tous terrains représentent 6% des ventes de voitures neuves en Europe, contre 3% dix ans plus tôt. Certains spécialistes estimaient encore récemment que ce taux pourrait grimper jusqu'à plus de 10%. L'accélération des prix de l'essence à la pompe est néanmoins susceptible de remettre en cause ce scénario même si la hausse de la facture du consommateur européen est moins impressionnante que celle des conducteurs américains ou canadiens. Ces douze derniers mois, les prix de l'essence en France ont crû de 12% tandis que de l'autre côté de l'Atlantique, les prix ont bondi de 30 à 40%. Le différentiel s'explique essentiellement par la faiblesse du billet vert vis-à-vis de l'euro alors que les prix du pétrole sont libellés en dollars. Rick Wagoner, le directeur général de General Motors, a déclaré début juin que son groupe envisageait de céder la marque Hummer, spécialiste des 4X4 et des pickups, pour mieux se concentrer sur le développement d'un véhicule électrique attendu en 2010: le «Chevrolet Volt». «Les prix élevés du pétrole modifient le comportement des consommateurs à un rythme rapide», a-t-il souligné au cours d'une conférence de presse dans l'Etat américain du Delaware il y a quelques semaines. «Chez GM, nous pensons que cette tendance n'est pas temporaire. Nous estimons au contraire qu'il s'agit de quelque chose de permanent», a-t-il ajouté. Le segment des SUV est désormais largement exploité. On y trouve un large éventail de modèles qui vont de la Q7 d'Audi (une marque du groupe Volkswagen), au Land Cruiser de Toyota en passant par le Qashqai de Nissan et le nouveau Koleos de Renault. PSA Peugeot Citroën est également sur le créneau avec les 4007 et C-Crosser. «Les SUV de taille intermédiaire devraient s'en sortir au cours des six prochains mois. Cependant, la période pour les achats par effet d'imitation n'est pas propice», observe Pierre-Yves Quemener, directeur de l'analyse automobile auprès de Landsbanki Kepler. «Je ne suis pas optimiste pour les modèles français comme le C-Crosser ou le Koleos. Et de façon générale, je crois qu'il faut oublier les gros modèles ou les pick-up qui vont retourner à leur place : celle de véhicules dédiés à des usages spécialisés», a-t-il poursuivi. Les SUV actuellement disponibles sur le marché ont été conçus il y a quelques années. «Depuis, le monde a évolué et le secteur automobile doit désormais faire face à des prix du pétrole plus élevés et à des contraintes en matière d'émissions de dioxyde de carbone», a de son côté fait valoir Jonathon Poskitt de chez J.D. Power Automotive Forecasting. Selon lui, la taille et la silhouette du SUV reste toutefois séduisante pour de nombreux automobilistes et l'avenir de ce marché se jouera peut-être grâce à des modèles à l'habitacle plus modeste, sans traction à quatre roues motrices.