Le médicament le plus cher de l'histoire de la pharmacie était jusque-là celui traitant l'hépatite C. Comme expliqué par les responsables des laboratoires Pharma 5, le traitement anti-hépatite distribué par le laboratoire américain Gilead sur un grand nombre de pays est vendu au prix faramineux avoisinant les 2.000 DH le comprimé. Soit 800.000 DH pour une cure de trois mois. Aujourd'hui, le générique de ce médicament miracle est développé avec succès par Pharma 5. Il sera disponible à partir du 10 décembre sous le nom du SSB®400, à 3.000 DH la boîte. Ce qui réduit le coût du traitement à 9.000 dirhams. Les trois quarts des personnes atteintes d'hépatite C vivent dans les pays intermédiaires. Il se trouve également que ces même pays abritent les trois quarts de la population pauvre de la planète. Au Maroc, ils sont au moins 627.000 à souffrir d'une infection chronique nécessitant traitement dont le coût de traitement classique s'élève à 250.000 DH pour un taux de guérison qui dépasse à peine une personne sur deux. Peu encourageants, ces constats sont appuyés par une complexité de dépistage due à la fois à la cherté de ces opérations et à la difficulté d'accès aux soins à laquelle sont généralement confrontés les patients par la suite. Ce dernier point serait toutefois plus ou moins résolu grâce à la mise sur le marché du SSB®400 à «bas» prix et la prise en charge de ce traitement décidée jeudi dernier par l'ANAM. L'histoire du développement du SSB®400 remonte à 2014 quand le laboratoire américain en question a mis sur le marché un médicament «révolutionnaire» à base de Sofosbuvir. Un traitement dont le prix prive de facto la majorité des malades atteints d'hépatite C de leur droit d'accéder aux soins mais qui assure une guérison de plus de 90% d'entre eux après une cure de 12 à 16 semaines. Ce même laboratoire signe par la suite des accords d'exclusivité avec des fabricants de génériques en Inde pour la distribution de ce traitement sur 91 pays en développement. «Cette décision exclut 100 autres pays. Chiffre qui représente 73 millions de personnes. Soit plus de la moitié des malades dans le monde», précise-t-on auprès de Pharma 5. Le Maroc, n'étant pas parmi les 91 pays choisis par Gilead, entame une procédure de saisie de l'Organisation mondiale de santé (OMS) à ce sujet et introduit auprès du laboratoire américain une demande d'intégrer le Royaume parmi les pays bénéficiaires du générique du Sofosbuvir. «N'ayant pas de réponse, la prochaine étape était naturellement de recourir à une fabrication locale de ce générique à base de Sofosbuvir. C'est là où Pharma 5 a été contacté par le ministère de la santé pour savoir si la technologie et le savoir-faire nécessaires pour cette opération étaient disponibles. Nous avons par la suite obtenu, le 16 avril 2015, un accord de principe de la part du ministère pour la fabrication locale de la version générique 100% marocaine du Sofosbuvir», explique Meriem Lahlou-Filali, directrice générale de Pharma 5. Elle précise ainsi que, heureusement pour le Maroc, le laboratoire américain avait omis de déposer un brevet dans les délais réglementaires, pour la protection de sa molécule au Maroc. Afin de percer le secret de fabrication du médicament anti-hépatite C, ces laboratoires ont dépensé près de 4 millions de dirhams uniquement dans l'opération décrite comme extrêmement confidentielle et qui concerne l'achat et le transport des princeps sur lesquels les recherches se sont basées. «Des analyses poussées sont effectuées en laboratoire dans le plus grand secret. C'est un projet hautement confidentiel. Nous avons veillé à associer une équipe resserrée et à adopter des règles de confidentialité très strictes», explique Dr. Yasmine Lahlou-Filali en sa qualité de pharmacienne responsable de ces laboratoires. A l'heure actuelle, Pharma 5 compte trois fournisseurs différents de matières premières et fabrique au sein de ses unités jusqu'à 50.000 boîtes de SSB®400 par jour. Se voulant rassurant, Dr.Abdallah Lahlou-Filali, président-fondateur de Pharma 5 précise: «Nous ferons en sorte que le Maroc ne vive jamais de situation de rupture de stock. Pour ce faire, nous sécurisons notre production en variant les fournisseurs». Quant à la distribution dans d'autres pays du continent africain, la même source indique qu'elle serait envisageable et que les prix «s'ils ne baisseront pas, ils seront maintenus. Nous ne voulons pas profiter du besoin de ces pays».