Révolution pédagogique ou coquille vide ? La très attendue initiative «Lawhati», parrainée par le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de la formation des cadres vient d'être lancée hier mardi à l'Ecole nationale supérieure d'informatique et d'analyse des systèmes (ENSIAS) de la capitale. Lors de la cérémonie de lancement, l'enthousiasme des officiels contrastait avec la déception très visible des étudiants. «Les prix ne sont pas du tout adaptés à nos moyens», nous déclare Yacine, étudiant à l'ENSIAS, «Je peux avoir ces tablettes quasiment au même prix ailleurs». Une assertion qui n'est pas tout à fait rejetée par le ministre concerné. «Les étudiants peuvent ne pas peser l'importance de cette initiative à leur échelle, mais c'est une étape importante vers ce que nous espérons qu'elle deviendra», a déclaré Lahcen Daoudi, ministre de l'enseignement supérieur. «Plusieurs facteurs affectent le coût de ces produits, dont par exemple la montée du dollar, mais l'offre sera meilleures dans les années à venir»,a-t-il assuré. Même son de cloche du côté de la ministre déléguée, Jamila Moussali, qui, abordée par un groupe d'étudiants déçus par l'offre Lawhati, s'est bornée à expliquer que l'apport est avant tout pédagogique, et que les baisses des prix sont malgré tout significatives. Les tablettes 2 en 1 proposées aux étudiants contiennent, en effet, des applications et logiciels censés les aider pendant leur parcours universitaire. Le coût de ces logiciels est, selon le ministre, de plus de 3.000 dirhams. Du côté des acheteurs, même cet argument ne fait pas le poids. «On nous explique que les tablettes sont chères à cause du contenu, mais je ne vous cache pas que l'on télécharge tout cela sur Internet. C'est peut-être illégal, mais ça marche», nous explique Yacine. Il faut dire que ce qui porte le plus préjudice à l'initiative Lawhati est qu'elle est systématiquement comparée au programme Injaz, adressé plus ou moins à la même cible mais avec des produits à moitié prix. Pourtant, contrairement à Injaz, le programme Lawhati n'est pas subventionné par le ministère. Son poids financier vient exclusivement de ses six partenaires, dont Intel et Microsoft, et de l'apport direct des étudiants. Pour rappel, Lawhati consiste à mettre à la disposition des étudiants de l'enseignement supérieur, des stagiaires des établissements de formation professionnelle ainsi qu'au corps professoral des universités publiques, des tablettes 2 en 1 (notebook et tablette) à des prix plus bas que ceux du marché, munies d'un contenu pédagogique intégré. Lors d'un point de presse organisé lundi au ministère, Lahcen Daoudi a assuré que «cette initiative va rapprocher la science de l'étudiant». Avant d'ajouter que «ce programme vise l'amélioration de la qualité des formations et la nécessité de s'aligner sur les standards internationaux en matière d'intégration et d'utilisation des technologies de l'information et de la communication (TIC) dans l'enseignement supérieur». Pour sa part, Karim Bibi Triki, directeur général d'Intel en Afrique du Nord et au Levant, a assuré qu'il s'agit essentiellement d'«encourager la formation et le développement de compétences qui permettent aux jeunes marocains de travailler avec les outils et les ressources nécessaires afin de concrétiser leurs idées, d'être les innovateurs de demain et donc de participer au développement économique du Maroc». La caravane de promotion de l'offre qui a démarré à l'ENSIAS de Rabat, devrait parcourir plusieurs villes universitaires du Maroc, dont Mohammedia, Casablanca, El Jadida, Settat, Beni Mellal, Marrakech, Agadir, Oujda, Guelmim, Tétouan ou encore Laâyoune. Par: Sara El Majhad et Houda El Fatimi