En fait j'ai envie pour une fois d'être sérieux car le moment est solennel et l'heure est grave. Nous sommes à quelques petites semaines d'une nouvelle échéance électorale qui s'annonce assez délicate – quel doux euphémisme! – et rien n'est clair. Pour employer une expression très à la mode mais tout-à-fait à propos, «il n'y a pas de visibilité». En tout cas, personnellement, je ne vois pas grand-chose et l'horizon me paraît opaque. Attention : je n'ai pas dit sombre, mais opaque. Nuance. Depuis le temps qu'on se fréquente, vous savez bien que malgré mes mauvaises humeurs fréquentes et mes coups de gueule à répétition, je suis un optimiste chronique. Je suis plutôt du genre bisounours qui aime presque tout le monde et voit la vie tout le temps en rose. Mais là, je vous avoue, j'ai un peu de mal à y croire. Je devrais même dire que, depuis déjà un certain temps, je crois que je n'y crois plus. Or, je vous jure que je ne demande qu'à y croire. Je sais qu'il y a parmi vous des gens plus éclairés et/ou plus lucides que moi et qui voudraient bien m'aider, mais mon grand problème, c'est que je ne sais pas comment vous expliquer les blocages que je porte en moi, depuis le jour où j'ai commencé... à ne plus y croire. Je vais essayer de vous expliquer. Il y a longtemps, dans une autre vie, grâce à certaines rencontres que j'ai faites – et dont quelques-unes étaient exceptionnelles et merveilleuses - et aux dizaines de livres et même plus encore que j'ai dévorés goulûment à cette époque, j'avais fini par bien connaître des idées qu'on qualifiait durant cette période et même jusqu'à aujourd'hui de «révolutionnaires», au point que j'ai fini par y adhérer corps et âme. Ces idées ou plutôt cette idéologie, on l'appelait et on l'appelle toujours, «le marxisme –léninisme». Si j'en parle aujourd'hui avec autant d'aisance et autant de liberté, c'est que tout cela est si loin derrière, et je suppose qu'il y a prescription. Mais là aussi, attention : je ne suis pas en train de vous dire que je regrette ce que j'ai fait. D'ailleurs, il n'y a rien à regretter. Que ce soit moi ou mes anciens et anciennes camarades, nous n'avons rien fait de mal. Bien au contraire, beaucoup d'entre nous ou disons plutôt pas mal d'entre nous, n'ont pas encore déposé «les armes» et nous continuons, chacun selon ses moyens et chacun à sa manière, à essayer de changer les choses du mieux que nous pouvons. Tout cela pour vous dire qu'aujourd'hui, malgré toute l'expérience que j'ai accumulée au fil des années et toutes les choses que je pense avoir apprises, je n'arrive pas à comprendre les comportements incohérents de nos hommes et nos femmes politiques ni encore moins la logique de leurs alliances conjoncturelles que je trouve souvent irrationnelles et parfois même contre-nature. Je vous jure que ce n'est pas du tout avec mon vieux filtre idéologique que j'analyse les choses, mais avec juste un zeste de bon sens. Ne dit-on pas que c'est le zeste qui compte… Non, blague à part, j'aimerais bien que quelqu'un parmi vous m'explique le pourquoi du comment de la création de ce qu'on a appelé, je crois, «le Front de la majorité» et qui aurait pour but de transposer l'accord actuel entre les différents partis de la majorité gouvernementale vers le terrain de la bataille communale. Pourquoi pas ? Me diriez-vous. Oui, mais, avant, on nous avait expliqué que «l'alliance des contraires» réalisée au lendemain des élections parlementaires était une «nécessité historique pour sauver notre jeune démocratie en danger», mais aujourd'hui, alors qu'on va être dans un cadre plus régional donc moins fatal, qu'est-ce qui justifie qu'on décide de se lancer dans ce combat «front contre front» qui, à mon avis, n'a pas de sens ? En effet, on aura, d'un côté, des partis de droite, du centre et de gauche, et de l'autre, des partis de... droite, du centre, de gauche ou assimilés. JE NE COMPRENDS PLUS RIEN. D'ailleurs, ni le vieux Marx, ni le vénérable Lénine, ni même l'immortel Mao que j'ai consultés récemment n'ont pu m'aider à piger. Alors, j'ai pris une grande décision : je vais enfin m'inscrire sur les nouvelles listes électorales qu'on vient de rouvrir de nouveau, et vous allez voir ce que vous allez voir ! Je ne vous en dirai pas plus pour l'instant, mais vous allez avoir bientôt de mes nouvelles. Non, mais !... En attendant, je souhaite un très bon week-end à tous ceux et à toutes celles qui croient toujours en un avenir meilleur. Quant aux autres… Un dernier mot sous forme de devinette pour rigoler un peu : puisque la jupe et la robe vont être bientôt réhabilitées officiellement, quand va-t-on enfin élever un peu plus haut le débat?