Les importations de céréales, qui alimentent beaucoup le marché marocain, devraient baisser en 2003-2004 en raison de la bonne campagne agricole. Une donne capable de dynamiser le secteur des minotiers tournant à 50% de sa capacité, et un marché du pain encore très limité mais prometteur. Le Maroc importe l'essentiel de ses céréales. Entre juin 2002 et mai 2003, notre pays a importé 2,3 Mt de blé tendre, 0,5 Mt de blé dur, 0,89 Mt de maïs et 0,41 Mt d'orge. C'est ce qui ressort d'une étude élaborée par la Mission économique de l'Ambassade de France. L'Hexagone vient justement en première position des pays fournisseurs du Maroc (23%), devant la Russie (15%), l'Ukraine (12%) et le Canada (10%). La campagne 2002-2003 a été particulièrement positive pour la France qui a fourni 33% du blé tendre (22% l'année précédente) et s'est positionnée activement sur le marché de l'orge (20%), du blé dur (10%) et du maïs (7%). Et pour cause, « en dépit d'une politique volontariste qui visait à assurer l'autosuffisance du pays en céréales et qui a permis d'atteindre une production moyenne avoisinant les 5 Mt, le Maroc demeure structurellement importateur, sa consommation annuelle s'approchant de 9 à 10 Mt », note-t-on dans cette étude. Mais les importations devraient baisser en 2003-2004. D'après les estimations de France Export Céréales et compte tenu des excellents résultats de la campagne 2002-2003, elles ne dépasseraient pas 0,9 Mt de blé tendre, 0,5Mt de blé dur, 0,9Mt de maïs et 0,3Mt d'orge. Des céréales destinées essentiellement à combler le déficit de production mais également à améliorer la qualité des céréales proposées aux minotiers et semouliers. A cela, s'ajoute la faiblesse des rendements qu'enregistre le Maroc– 10 à 15 quintaux/ha en moyenne – du fait des aléas climatiques mais aussi de la faible technicité des agriculteurs qui utilisent peu et mal les semences sélectionnées et les produits phytosanitaires. Dès lors, la production varie sensiblement d'une année à l'autre, impactant lourdement le PIB agricole, la céréaliculture étant pratiquée sur 80% des exploitations. Demeurant de mise, ces importations sont essentiellement effectuées par des opérateurs privés dont les 5 plus importants réalisent plus des 2/3. L'Office national interprofessionnel des céréales et légumineuses (ONICL), qui détenait auparavant le monopole des importations, n'intervient plus qu'à hauteur de 20% environ dans les importations de blé tendre, précise l'étude. D'autre part, l'industrie de la première transformation des céréales compte un peu plus de 150 moulins et semouleries, les plus importants étant situés sur l'axe Casablanca – Rabat. Cet outil industriel d'une capacité d'écrasement de 6,5 millions de tonnes paraît aujourd'hui démesuré et ne fonctionne qu'à 50% de son potentiel. Il souffre du faible niveau de collecte des céréales dont une large proportion est utilisée pour la nourriture des animaux, écrasée par plus de 10 000 moulins artisanaux, autoconsommée ou vendue directement dans les souks. D'après le rapport annuel de la Fédération Nationale de la Minoterie, 20 moulins auraient fermé leurs portes en 2002 et une dizaine serait sous la menace d'un redressement judiciaire. Il en est de même pour le marché du pain et des pâtes qui souffre de plusieurs maux. Si certains industriels profitent aujourd'hui d'une augmentation régulière de la consommation, la plupart souffrent des dysfonctionnements d'une filière encore très largement administrée et peu préparée à la concurrence. Le marché du pain se caractérise par la prédominance de la fabrication domestique, notamment en milieu rural. A l'exception du pain rond et de la baguette, le prix du pain est aujourd'hui complètement libre. On observe d'ailleurs la fabrication croissante de pains spéciaux et de viennoiseries, à plus forte valeur ajoutée, dans les grandes villes. Toutefois, les volumes à l'échelon national demeurent encore très limités du fait du faible pouvoir d'achat de la population. Cependant, la vente en grandes surfaces et des boulangeries modernes se développent. Un réseau de boulangeries, Au pain tout chaud, a vu le jour à Casablanca en 1997. Si le marché manque encore de maturité pour un réel décollage de la boulangerie industrielle, les changements de modes de consommation (succès des sandwicheries comme Paul ou La Brioche Dorée) laissent entrevoir des perspectives favorables dans ce secteur à moyen terme. En somme, le système actuellement en place, destiné à protéger le revenu des agriculteurs et à maintenir stable le prix du pain pour les couches de population les plus nécessiteuses, est aujourd'hui contesté car trop coûteux (près de 2 milliards de DH/an), contourné et ne bénéficiant que très partiellement aux cibles visées (le prix public théorique de la FNBT est de 200 DH, mais le prix constaté est plus proche de 250 DH, en raison de la forte demande, y compris par les classes moyennes et aisées). Après la réforme des droits de douane intervenue en 2003, l'abandon du prix d'achat au producteur et des différentes subventions versées aux collecteurs semble inéluctable.