La diplomatie économique du Maroc et son rôle en tant que levier de croissance étaient les thèmes centraux du Ftour-débat organisé par l'Association des femmes chefs d'entreprises du Maroc (AFEM), auquel était conviée Mbarka Bouaida, ministre déléguée auprès du ministère des affaires étrangères et de la coopération mercredi à Rabat. Cette rencontre conviviale, dédiée à un sujet d'importance primordiale, a aussi connu la participation de l'ambassadeur du Japon au Maroc, Tsuneo Kurokawa, aux côtés de plusieurs femmes chefs d'entreprises marocaines et d'épouses de ministres. Dans un exposé détaillé des contours de la diplomatie économique marocaine, Mbarka Bouaida a souligné qu'en plus d'être un terme à la mode, le concept était devenu une nécessité dans un monde qui connaît des changements profonds et rapides, ajoutant que «le Maroc s'inscrit dans cette mouvance, parce qu'aujourd'hui le politique va en parallèle avec l'économique». En effet, selon Mme Bouaida, les changements profonds que connaît la région, l'émergence de nouveaux axes répondant à des enjeux sécuritaires, la naissance de blocs économiques régionaux tels que la CEDEAO ainsi que la place de plus en plus importante que prennent des acteurs non étatiques tels que les ONG ou même les réseaux sociaux, sont autant de facteurs qui ont poussé le Maroc à adopter une diplomatie publique où l'axe économique prend une place centrale. Ainsi, la ministre a affirmé que l'objectif principal de cette nouvelle orientation de la politique étrangère marocaine est de «vendre le Maroc de manière multidimensionnelle, comprenant l'aspect économique, social, politique ainsi que culturel et religieux». Concernant le rôle de plus en plus central que joue le Maroc sur le continent africain, Mbarka Bouaida a assuré que l'Afrique était une priorité économique pour le Maroc, ajoutant que «l'Afrique est une extension presque naturelle de notre pays». Déjà présent en Afrique de l'Ouest, le Maroc ambitionne à travers les nouvelles orientations de sa politique étrangère d'étendre l'investissement à tout le continent afin d'y promouvoir le savoir-faire marocain et d'exploiter l'énorme potentiel qu'il renferme. Ce processus étant déjà enclenché, Mme Bouaida a tenu à souligner que le taux de réalisation des accords signés lors de la tournée royale en Afrique dépassait les 40% fin mai dernier. «Il existe un bon nombre de success stories d'entreprises marocaines qui se sont installées en Afrique (…) Le ministère se charge de les accompagner mais aussi de les protéger». Dans son intervention, M. Kurokawa a, quant à lui, appelé à la multiplication des rencontres entre les entrepreneurs marocains et japonais, citant comme exemple le forum économique Japon-pays arabes qui s'est tenu à Tokyo en décembre dernier. «La prochaine édition du forum se tiendra au Maroc, et j'espère que ça sera l'occasion pour vous de rencontrer le plus grand nombre d'entrepreneurs japonais», a-t-il ajouté en s'adressant aux membres de l'AFEM. Le rôle du Maroc dans la région du Maghreb était aussi l'un des points focaux de l'exposé de Mme Bouaida. La ministre a notamment déploré l'absence des mécanismes de diplomatie économique dans l'espace Maghreb : «Malgré les efforts du Maroc, résoudre le politique par l'économique ne semble pas marcher» a-t-elle affirmé, soulignant que bien que les relations bilatérales avec la Tunisie soient très bonnes et que le flux d'échange économique avec la Mauritanie soit constant, «le blocage politique avec l'Algérie et l'obstacle sécuritaire en Libye empêchent une intégration régionale des pays du Maghreb». Les membres de l'AFEM ont, de leur côté, interrogé la ministre sur des questions pratiques liées, pour la plupart, à l'accompagnement des entreprises marocaines à l'étranger par le ministère des affaires étrangères. Si les plus pragmatiques concernaient le rôle des conseillers économiques dans les représentations marocaines à l'étranger ou encore la possibilité de transformer les ambassades en des co-working space où les entreprises marocaines pourront accueillir leurs partenaires, la plus anecdotique était sans aucun doute celle adressée à la ministre par une jeune chef d'entreprise : «Comment faites-vous pour trouver l'équilibre entre vos responsabilités ministérielles et vos engagements familiaux, surtout après la naissance de votre bébé?», question à laquelle Mbarka Bouaida a répondu, sans hésitation : «Je ne réfléchis pas, je le fais». Sara El Majhad Journaliste stagiaire