Le projet de loi sur la réforme bancaire sera discuté au Parlement lors de la session du printemps. Cette loi s'inspire des deux derniers rapports du FMI et de la Banque mondiale réalisés en 2002 et 2003. Elle tient, aussi, compte des règles de Bâle II entrant en vigueur à partir de 2007. Dans son dernier rapport, Bank Al Maghrib, emboîtant le pas aux institutions internationales, fustige le dépassement en matière de respect des règles prudentielles. Provisions insuffisantes et créances en souffrance trop élevées dans un marché handicapé par la multiplicité des opérateurs. L'accélération des opérations de regroupement bancaire au Maroc coïncide avec l'avènement d'une nouvelle loi bancaire. De nouveaux dispositifs qui seront discutés en principe lors de la prochaine session parlementaire du printemps. Concrètement, la nouvelle réforme renforce le pouvoir de contrôle et de suivi de Bank Al Maghrib sur les établissements bancaires, notamment en ce qui concerne l'application des règles prudentielles, la gestion du risque et les créances en souffrance. Sont concernés, non seulement les banques classiques, le secteur de l'assurance, du crédit, mais aussi, c'est une première, des institutions spécialisées comme la Caisse de Dépôt et de Gestion (CDG) et la CCG, ainsi que les banques étatiques. La réforme introduit une autorité de régulation unique. La coordination sera assurée par un comité comprenant des représentants de Bank Al Maghrib, du Conseil déontologique des Valeurs Mobilière (CDVM) et d'autres institutions régissant des secteurs comme l'assurance. Pour Khalid Oudghiri, P-dg de l'ensemble BCM –Wafabank, «les règles de provisionnement sont contraignantes, certes, mais elles garantissent la viabilité de tout le secteur». Même sentiment partagé par l'universitaire Abdellatif Maâzouz, pour qui ces règles prudentielles, à prime abord contraignantes, ont pour but de «sauvegarder le tissu économique». Même si, se faisant, on le voit avec le régime actuel, certains établissements ont tendance à se conformer avec la règle sur les provisions. «Dans la nouvelle réglementation, comme dans l'ancienne, une entreprise qui a un bilan déséquilibré doit être provisionné à hauteur des risques d'insolvabilité du client». Le dérapage concernerait, selon un analyste du secteur, certaines banques, pour justement se conformer aux règles prudentielles de Bank Al Maghrib ; elles n'hésitent pas à provisionner sur leurs fonds propres, au lieu de le faire sur le résultat avant impôt. Une nuance pas souvent bien vue côté fisc. Avec le nouveau projet de loi, les banques seront tenues aussi de s'adapter aux standards internationaux, concernant la gestion du risque. La réforme s'inscrit dans la droite lignée des recommandations de la FMI et de la Banque mondiale. Courant 2003, les deux institutions avaient pointé du doigt la faiblesse de la supervision financière, laquelle pourrait, si n'est fait, fragiliser le système bancaire, du reste trop dépendant du MRE (25% du dépôt clientèle). Dans un secteur jusque-là fragmenté, le regroupement qui se profile à l'horizon, outre qu'il va dans le sens des recommandations de la FMI, permet aussi aux banques de disposer d'une plus grande marge de manœuvre. Avec des fonds propres évalués à 9 milliards de dirhams, le pôle BCM-Wafabank repousse en absolu le plafond imposé par la règle de la division des risques (20% des fonds propres sur un seul client), et se donne de nouvelles possibilités. A titre de rappel, la BCM est depuis 2002, selon le rapport standard & Poors, très pointilleuse en ce qui concerne les règles de provision, avec un taux de couverture (rapport des provisions constituées sur les créances en souffrance) qui a atteint 75% contre 60% pour l'ensemble des banques commerciales. Lors de la conférence de présentation des résultats, mardi dernier, M. Oudghiri a fait part de sa volonté de conduire Wafa Bank vers les mêmes standards. Il s'agit des règles de Bâles II, futur système international de sécurité qui entre en vigueur en 2007. La BCM s'y est engagée depuis l'année dernière, avec le conseil du cabinet Mercer Olivier. Dans tous les cas, les opérateurs économiques doivent tirer profit de ces regroupements. Pourtant, de l'avis du professeur universitaire, Abdelatif Maâzouz, il ne faut pas crier victoire trop vite. «L'entreprise marocaine tirera profit du regroupement du secteur, mais seulement à long terme». Une taille critique, ce n'est pas seulement plus de solvabilité, c'est aussi la possibilité de procéder à la mise à niveau aux normes internationales. Le choix est cornélien pour les structures modestes : s'unir ou périr. A moins, suggère M. Maâzouz de prendre le chemin de la spécialisation. Des options comme le capital-risque, peu exploré, présentent d'énormes potentialités. A ce niveau, la législation doit prendre en compte plusieurs facteurs touchant non seulement la réglementation bancaire mais aussi celle portant sur la Société anonyme. Dans tous les cas, la multiplication des opérateurs est un handicap pour le secteur. «Les petites structures auront encore plus de mal à se mettre aux normes», insiste M. Maâzouz qui voit venir l'ouverture aux banques étrangères au même rythme de l'application des accords comme le libre-échange conclu avec l'Amérique. « Pour faire face aux exigences internationales, il faut avoir une dynamique internationale». Cette nouvelle loi bancaire va dans le sens de toutes les recommandations des institutions internationales qui souhaitent, à terme, un règlement rapide de la situation des banques étatiques et le retrait de la Banque centrale du capital des instances de direction de l'ensemble des institutions financières. Le chemin est encore long.