Le projet de loi organique des finances arrive enfin. Le texte a été rendu public par le Secrétariat général du gouvernement. Il faut dire que le projet de loi en question qui se faisait un peu attendre devra marquer sans nul doute le mandat du gouvernement Benkirane. Ce texte est très important tout simplement parce qu'il va conditionner le contenu, l'élaboration et surtout le contrôle de l'exécution des différentes lois de Finances durant les prochaines années. Autrement, tous les gouvernements, que ce soit celui d'aujourd'hui ou futurs, devront se référer à cette loi pour définir les recettes et les dépenses de l'Etat. Dans les détails, l'absence de la fixation du taux de déficit et d'endettement par rapport au PIB (Produit intérieur brut) attire l'attention dans le projet de loi alors que l'on s'attendait à plus de transparence là-dessus. Pourtant, l'opposition avait obligé le gouvernement dans le cadre de la loi de Finances 2014 à travers un amendement de fixer le taux maximum d'endettement public à 65% du PIB. Cela dit, la réforme apporte tout de même d'innombrables changements. Comptabilité analytique Le projet de loi introduit pour la première fois la comptabilité analytique destinée à analyser les coûts des différents projets engagés dans le cadre des différents programmes d'investissements. Chaque département, devra justifier ses dépenses ce qui représente un grand pas en avant. D'une manière plus globale, les responsables expliquent que la refonte de la loi organique des finances s'est articulée autour de trois grands axes. Le premier axe est relatif au renforcement de la performance de la gestion publique. L'une des premières nouveautés de ce volet concerne l'élaboration de la loi de Finances selon une approche triennale (sur trois années) actualisée annuellement. Selon le responsable, le but est d'améliorer la cohérence entre les stratégies sectorielles tout en préservant l'équilibre financier de l'Etat. Toujours dans ce premier volet, les ministères devraient passer d'une projection générale de leurs dépenses annuelles à une présentation par programme et projet-action, en évoquant la dimension régionale. Ces données seront par la suite contrôlées, vérifiées puis comparées aux réalisations, dans le cadre d'audits de performance réalisés par l'Inspection générale des finances. Cette dernière sera amenée à présenter le rapport de son audit au Parlement. De même, chaque département ministériel devra préparer un rapport ministériel de performance joint au projet de loi de règlement qui compare pour chaque programme les réalisations avec les prévisions initiales. Le deuxième axe retenu concerne la transparence des finances publiques. Réduction des comptes spéciaux Pour renforcer la transparence budgétaire, le projet de réforme introduit explicitement le principe de sincérité budgétaire. Le but est de conforter la pertinence des hypothèses qui président à la préparation de la loi de Finances et de confirmer la qualité des prévisions de ressources et de charges. La réforme prévoit la présentation de lois de Finances rectificatives en cas de modifications significatives des priorités et hypothèses de la loi de Finances. L'autre nouveauté phare du projet est sans nul doute la proposition de réduire les comptes spéciaux du Trésor et d'en rationaliser la création. Aussi, le projet établit de nouvelles règles financières pour améliorer la transparence, notamment à travers la limitation des crédits de personnel, l'interdiction d'inscrire les dépenses de fonctionnement ou personnelles au niveau du chapitre d'investissement, et la prohibition du report des crédits d'investissement tout comme l'orientation de la dette publique vers le financement de l'investissement. Le troisième et dernier volet couvre le contrôle du Parlement à l'exécution de la loi de Finances. Un contrôle qui a été renforcé sensiblement par la réforme de la loi organique des finances. Implication des députés Ainsi, le projet propose d'associer le Parlement dès les premières étapes de préparation du projet de loi de finances et de mettre à sa disposition des données précises et de qualité afin de lui permettre d'exercer son rôle de contrôle des politiques publiques et des conditions de leur mise en œuvre. Une autre proposition concerne le réaménagement du calendrier d'examen et de vote du projet de loi de Finances. De ce fait, une nouvelle phase de préparation est proposée ainsi qu'une phase de concertation avec le Parlement avant la fin du mois de juillet pour discuter des grandes orientations et du cadre général. S'agissant de la loi de règlement, le projet propose de réduire les délais de sa préparation et de sa présentation au Parlement. Celle-ci devra être bouclée dans les six mois suivant son dépôt par le gouvernement à la première Chambre parlementaire. Il faut par ailleurs préciser que les informations communiquées au Parlement sont enrichies par l'élaboration de 14 nouveaux rapports et 2 annexes afin d'améliorer la qualité du débat sur la loi de Finances. C'est ainsi que le projet de loi de règlement sera accompagné des rapports ministériels de performance, du rapport annuel de performance préparé par le ministre des finances, des rapports d'Audit de l'Inspection générale des finances, et du rapport sur les finances des collectivités territoriales. Enfin, des changements seront introduits à l'opération du vote des lois de Finances à travers une nouvelle démarche axée sur les résultats. Autrement, le vote des députés s'articulera autour des départements ministériels et de leurs stratégies.