Vendredi dernier, en début d'après midi, la commune rurale d'Aourir, située à une dizaine de kilomètres au nord d'Agadir, a connu une véritable émeute. De nombreux accrochages entre les services de l'ordre et une multitude de jeunes de cette localité d'une population de plus de 50 000 personnes, réparties sur un patelin dont les carences infrastructurelles sont criardes. Depuis longtemps, cette zone située aussi bien sur le littoral atlantique qu'aux confins d'un site montagneux, manque cruellement de nombre de services vitaux de la vie humaine, notamment l'implantation du réseau d'assainissement, le revêtement des accès et ruelles, la construction des ponts pour endiguer les inondations, la mise en fonction du plan d'aménagement pour Aourir et Tamraght… Cette débandade qui règne dans la commune a donc occasionné une véritable ruée vers l'informel et l'anarchie au niveau des constructions de logement. Les dispositions de l'urbanisme ne sont guère respectées dans une région où les lois en vigueur sont totalement bafouées. Devant ce dépassement qui ne fait alors que proliférer dans le tissu urbanistique, les autorités locales ont entamé, vendredi dernier, une campagne de démolition des constructions anarchiques dont celles qui appartiennent à des conseillers communaux, censés donner l'exemple aux citoyens. A peine les bulldozers eurent-ils amorcé leur tâche que des jeunes se ruèrent contre les services de l'ordre massivement installés dans les parages. Jets de pierres, blocage des rues, éclatement d'incendie, telles, entre autres, sont les réactions surchauffées de ces émeutiers qui se placèrent par centaines sur les versants des montagnes avoisinantes, sans s'en prendre ni aux passants ni aux conducteurs, encore moins aux locaux de commerce. C'est ainsi que les forces de l'ordre toutes catégories confondues, se lancèrent à la poursuite de ces jeunes manifestants, les assiégeant de toutes parts, munis de bombes lacrymogènes et de matraques. Ces confrontations musclées ont alors provoqué des blessés de part et d'autres et des arrestations parmi les jeunes insurgés. Ces soulèvements déplorables qui ont émaillé toute une localité de long en large ont pareillement touché la Caïdat d'Aourir, lourdement saccagée. Il faut bien rappeler que ces anarchies urbanistiques régnant dans la commune d'Aourir, ainsi que dans d'autres, ont été l‘objet de longs débats lors d'une série de réunions initiées récemment par la Wilaya avec les diverses parties concernées dans les différents Caïdats relevant de la préfecture d'Agadir Ida Outanane et au cours desquelles le Wali a été catégorique par rapport à ce phénomène de profusion des constructions anarchiques et insalubres. «Je ne tolérerai aucun dépassement des règlements urbanistiques en vigueur. Gare à celui qui verse dans la complaisance et le laxisme dans ce sens !», s'écrie-t-il d'un ton ferme. Cependant, lors des rencontres tenues sur place par des commissions ad hoc, constituées à la suite de ces réunions plénières, il sera constaté que les présidents de certaines communes, particulièrement d'Aourir, de Tamri et de Taghazout brillaient par leur absence. On devinera alors le sentiment de gène qui empêchait ces responsables communaux de se présenter à ces réunions de commissions dont les rapports parvenaient à la Wilaya avec cette mention d'absentéisme suspect. D'aucuns avanceraient le fait que ces bouderies trouvent leur explication dans, tout d'abord, l'incapacité des présidents de communes de s'opposer aux électeurs contrevenants de peur de perdre des voix électorales, à la veille des prochaines échéances, d'autre part, l'implication de ces mêmes responsables et leurs acolytes dans des dépravations urbanistiques flagrantes, comme c'est le cas dans la commune d'Aourir. On conviendra alors que les élus et les agents d'autorités, dans bien des cas, se lancent dans des complicités abjectes, car il est bien évident que les citoyens à qui on détruit aujourd'hui leurs constructions non autorisées, se sont sans doute, adonné à ces manœuvres clandestines après avoir «corrompu» leurs bourreaux pour que ces derniers «ferment les yeux». L'épée de Damoclès tombe maintenant sur les toits des citoyens qui se trouvent, certes, dans l'infraction urbanistique, et doit également trancher toutes les têtes dans le camp des élus et des autorités qui ont, des années durant, soudoyer ces délits, en contrepartie de l'argent sale.