Assise dans une belle ruelle de la ville d'Assilah, qui abrite depuis le 2 courant le 33è Moussem culturel international d'Assilah, les mains pliées vers l'intérieur, les pieds nus tendus, l'artiste peintre marocaine Karima Jouadi peint ses tableaux en plein air. Agée de 33 ans et atteinte d'une maladie de naissance qui lui a atrophié les bras, Karima, qui ne manque pas de courage et de volonté, a appris à vivre, à peindre, et à se débrouiller uniquement à l'aide de ses pieds. Issue de Ksar El Kbir, cette artiste qui, depuis son plus jeune âge essaie d'être autonome malgré son handicap, peint en plein air des paysages imprégnés de douce mélancolie. Nature, portraits de femmes, monuments historiques, traditions marocaines, entre autres, tels sont les principaux thèmes desquels elle s'inspire. Dans une déclaration à la MAP, la jeune femme a indiqué avoir exploré le monde de la peinture à l'âge de 11 ans. «Au début, les éléments que je dessinais étaient un peu loin de ressembler à ce que je voulais mais, au fil du temps, je me suis améliorée, et j'ai pu monter ma première exposition en 1995», regrettant que le fait de «monter une exposition n'est malheureusement pas facile». «Jusqu'à maintenant, j'ai participé à plus de 25 expositions au niveau national (Rabat, Casablanca, Tanger, Marrakech, Tétouan) et international (Cadiz, Madrid, Barcelona, Gibraltar), ce qui m'a permis de présenter mon art et mon style à plusieurs intéressés et professionnels de la peinture», a-t-elle dit. L'artiste a également souligné qu'elle a appris à peindre seule, sans cours ni formation, ajoutant que son handicap l'a aidé à relever le défi de prouver sa personnalité et son art, et de pouvoir jouir d'une vie digne et subvenir à ses propres besoins, puisqu'elle est elle issue d'une famille à revenu moyen, composée de 9 membres. Actuellement, Karima vit seule à Assilah, elle vit seule son handicap, son art et sa souffrance. Pour elle, «être handicapé ne signifie pas être restreint, mais cela constitue un pari que la personne en situation doit relever». «A voir les oeuvres que produit Karima, personne ne pourrait deviner que la jeune femme n'utilise pas ses mains mais ses pieds pour refléter de tels beaux paysages et portraits. Bien que privée de l'usage de ses mains, l'artiste a su prouver sa sensibilité artistique. En effet, lorsque les amoureux de la peinture voient ses tableaux, il est difficile d'imaginer la façon dont ils ont été réalisés. Karima a indiqué que, petit à petit, ses efforts assidus «commencent à obtenir la reconnaissance qu'ils méritent». Ses oeuvres sont «appréciées et estimées au niveau national et international, et les amateurs d'art s'intéressent de plus en plus à ses réalisations». «Tous les visiteurs, les membres de ma famille, mes amis et mes voisins m'encouragent et respectent ce que je fais», s'est-elle-réjouit, indiquant qu'elle a assisté au Moussem culturel international d'Assilah pour la première fois en 2002, qui est devenu un rendez-vous annuel qu'elle ne peut pas rater.