L'économie espagnole, qui peine à décoller depuis 2008, a été la grande bénéficiaire des acquis des révolutions qui secouent le monde arabe. Si la plupart des pays arabes passent par des moments de dure gestation avec des régimes absolutistes et dictatoriaux qui refusent de «dégager», l'Espagne a repris le sourire avec le débarquement à ses aéroports de plus de touristes internationaux. Cette constatation, bien qu'elle paraisse peu plausible, confirme le bon moment que traverse le tourisme en Espagne, le seul qui progresse en ce début de 2011 plus rapidement que le reste des secteurs et du Produit Intérieur Brut (PIB). Les opérateurs se frottent les mains pour les records atteints ou battus en termes de recettes et nuitées depuis le début de l'année en cours pour l'annulation des voyages programmés en Egypte et en Tunisie aussi bien par les clients nationaux que par les touristes internationaux. Les agences de voyages et tours operators espagnols ont été submergés, dès novembre dernier, par la multitude de sollicitudes de leurs clients de substituer ces deux destinations par d'autres en Espagne. Dans toutes les régions espagnoles, particulièrement celles à vocation touristique, les hôtels avaient affiché «complet» lors des dernières vacances de Semana Santa (pâques : 18-24 avril). Les révoltes des peuples opprimés et des couches sociales marginalisées dans le monde arabe se sont converties, paradoxalement, en une source d'espoirs pour l'économie espagnole, ce qui se traduit par la réactivation de l'activité touristique et la récupération de l'emploi dans un secteur qui se considère comme un composant fondamental du PIB. Dans l'attente de la publication de données fiables sur le comportement du tourisme durant le premier quadrimestre de 2011, les premières projections, à la lumière du bilan établi des vacances de la Semana Santa, sont plus que prometteuses. Les opérateurs ont été amenés à réviser à la hausse leurs prévisions. Ils sont désormais convaincus d'un taux de croissance de 2,2%, soit le double de l'indice qu'ils avaient prévu en janvier qui était de 1%. Cette prévision est aussi le triple de l'indice de hausse prévu pour l'économie espagnole (0,7%) en 2011, comme l'avaient annoncée il y a deux semaines des sources officielles espagnoles, l'Union Européenne ainsi que des experts financiers. Les premières analyses des résultats des quatre premiers mois de l'année versent dans l'expectative puisqu'il s‘agit d'une récupération conjoncturelle, conditionnée par la déviation des flux touristiques vers l'Espagne à cause des conflits qui déstabilisent l'Ouest de l'Afrique et le Moyen Orient. C'est le cas surtout des Iles Canaries qui ont été débordées par les arrivées de touristes nationaux et internationaux après une décennie de marasme total et de chute de recettes. Les opérateurs espagnols sont conscients des effets négatifs que pourraient succéder à cette situation passagère puisque la Tunisie a relancé une campagne promotionnelle agressive à destination du marché espagnol et la rue en Egypte commence à récupérer le calme. Les Iles Canaries a été, du coup, la destination alternative de ces deux pays chauds de la Méditerranée, en comptabilisant 89% du taux d'affluence des touristes en Espagne. Que disent les statistiques les plus récentes ? Le PIB touristique a progresse trois fois de plus que le PIB général grâce à un rythme de 2,4% interannuel, a indiqué lundi l'Alliance Pour l'Excellence Touristique (EXCELTUR). Le taux d'occupation hôtelière, durant la Semana Santa a été de 85%, soit 10% supérieur à celui de 2010 et aux prévisions officielles, a signalé de son côté, le secrétaire général du département du tourisme et du Commerce, Joan Mesquida, lors d'une conférence de presse. Il a reconnu, en même temps, l'impact qu'ont eu les révoltes dans le monde arabe sur l'arrivée en masse des touristes provenant des marchés traditionnels tels la Grande Bretagne, la France, l'Allemagne, l'Italie et les pays nordiques. Ceci s'explique aussi par le bon moment que traversent les économies de ces pays, a-t-il expliqué. Selon une autre donnée statistique, apportée par le marché du travail, le chômage dans le secteur touristique est passé de 20% à 14%. Ces chiffres n'auront pourtant aucune signification sans prendre en compte ceux de l'exercice précédent. L'industrie touristique en Espagne contribue à hauteur de plus de 10% du PIB espagnol et occupe 11% de la population active. Jusqu'à 2010, le secteur avait progressé moins que l'économie espagnole, à cause surtout de la concurrence d'autres marchés, particulièrement les destinations les plus proches du Maghreb. Les touristes internationaux ont dépensé, en 2010, un total de 39,595 milliards d'euros, soit 4% de plus qu'en 2009, plaçant l'Espagne au deuxième rang derrière les Etats-Unis en termes de recettes dans le secteur touristique. Pourtant, l'Espagne avait accueilli l'année dernière 52,7 millions de touristes, soit 1% de plus qu'en 2009. En 2011, le secteur a bénéficié des bienfaits de la récupération des économies des marchés traditionnels, telle l'Allemagne qui avait enregistré un taux de croissance de 3,6%. L'Espagne a accueilli, depuis janvier dernier, 10% de touristes de plus qu'à la même période de 2010. Ce sont en partie de potentiels touristiques qui entraient dans les prévisions des opérateurs tunisiens et égyptiens.