Ainsi donc depuis près d'un siècle, la Femme a droit à sa journée ! Et une journée internationale en plus! Une fois l'an ! Et que depuis plusieurs années elle est célébrée même au Maroc, Journée de la femme. De quelle femme parle-t-on ? Quelle femme veut-on honorer ? La femme d'Imilchil, courbée sous le poids des rudes tâches des montagnes, la femme du Rif, séquestrée dans un monde terriblement masculin? La femme de Tafrawt embourbée dans sa prison de draps et de voiles? Est-ce encore cette jeune casablancaise au visage douloureusement ravagé qui hante les trottoirs insalubres? Ou ces fillettes, hôtesse d'accueil d'un hôtel d'Agadir, où des «arabes» lubriques et visqueux vont se prélasser sans crainte de tomber pour pédophilie? Est-ce encore cette toute jeune enfant qui doit subir le viol institutionnalisé d'un vieux cochon sénile, avec le consentement de ses propres parents? Si ce ne sont pas ces femmes-là, alors faut-il peut-être se tourner du côté de ces ouvrières au regard éteint, qui de retour de chez elles doivent assumer, travail domestique, éducation d'une flopée de gosses et violence d'un chômeur enragé? Ou du côté des paysannes, qui telles des bêtes de somme, cumulent travaux des champs, soins des animaux, entretien du foyer et vente au Marché? Que dire de cette mendiante aux yeux boursouflés, que le mari alcoolique a répudiée avec cinq enfants en bas âge? Et de cette secrétaire poursuivie par le harcèlement d'un patron sans scrupule? De cette petite bonne berbère qui, la nuit, couchée sur le sol glacé d'une cuisine, pleure la chaleur du sein maternel? Arrêtons-nous là! Il n'y a pas de journée de la Femme dans un Monde où la femme et l'enfant sont les victimes universelles de sociétés masculines sans merci. Elle aura sa raison d'être, lorsqu'une femme sera reconnue comme telle! Un être humain à part entière! *Professeur chercheur à l'IRCAM