La création du Conseil national des droits de l'Homme remplaçant l'ancien Conseil consultatif et la nomination par SM Mohammed VI de Driss El Yazami, président du Conseil et Mohamed Sebbar, Secrétaire général, a suscité plusieurs réactions au sein du tissu associatif. Abdellatif Chahboune, vice président de l'Organisation marocaine des droits de l'Homme (OMDH) a tenu à saluer cette décision qui représente une avancée dans le chantier des droits humains et traduit la volonté réelle d'aller de l'avant. « Driss Yazami et Mohamed Sebbar nommés à la tête de ce Conseil sont des militants engagés pour la reconnaissance des droits humains au Maroc. Ils se sont investis dans ce domaine respectivement à travers I' Instance équité et réconciliation (IER) et Forum vérité et justice (FVJ) », a tenu à souligner notre interlocuteur. Pour le militant, le nouveau Conseil national des droits de l'Homme tombe à point nommé surtout dans le contexte actuel marqué par la mobilisation des jeunes pour la mise en place de réformes réelles. Tout en saluant l'apport important et non des moindres de l'ancien Conseil consultatif des droits de l'Homme, le vice président de l'OMDH regrette, néanmoins, le piétinement, dû à plusieurs obstacles, qu'à connus la mise en vigueur des recommandations de l'IER. Et d'affirmer que le dossier des droits de l'Homme au Maroc est une question à dimension socio-économique qui appelle à des mesures concrètes afin de rompre définitivement avec un système dépravé et gangréné par la corruption. De l'avis de ce militant, la moralisation de la vie publique ne peut se matérialiser qu'à travers un projet efficace, actif et clair, seul susceptible d'insuffler une nouvelle dynamique tenant compte de la conjoncture actuelle marquée par les derniers mouvements sociaux. Le Conseil national des droits de l'Homme aura également pour tâche de se pencher sur les dossiers épineux restés toujours sans réponse, notamment l'affaire Mehdi Benbarka, note t-il, ainsi que le dossier de l'emploi, un problème de taille auquel le Maroc est sérieusement confronté. Mustapha El Manouzi, secrétaire général du forum Vérité et justice considère, de son côté, que le passage du Conseil consultatif des droits de l'Homme au Conseil national des droits de l'Homme représente un saut qualitatif dans la mesure où la conversion de cette institution, du domaine consultatif pur sans prérogatives effectives au Conseil national des droits de l'Homme, certes à caractère consultatif, mais avec des compétences élargies et doté de mécanismes d'exercices réels et qualitatifs, est significatif . EL Manouzi met l'accent sur l'importance de l'ensemble des prérogatives du Conseil. Il s'agit en premier lieu, d'examiner les plaintes et les requêtes et de diligenter des enquêtes dans certains cas pour éviter toutes violations. Cela, indique-t-il, fait partie des recommandations de l'IER. Le Secrétaire général du FVJ souligne l'importance des autres compétences de cette institution, notamment la visite des lieux de détentions, le contrôle des institutions pénitentiaires et l'examen des conditions de détention ainsi que la rédaction des rapports nationaux et thématiques réguliers sur la situation des droits de l'Homme au Maroc, tels que figurant dans le dahir de création. Sur un autre registre, le travail sur l'harmonisation de l'arsenal juridique national avec les dispositions internationales représente une prérogative de grande portée à soulever, exprime-t-il. Autre point fort du conseil, ajoute-t-il, la dotation des conseils régionaux des mêmes compétences. Un autre atout de ce mécanisme national des droits de l'Homme, c'est son autonomie administrative et financière permettant de lui garantir une certaine indépendance, fait savoir El Manouzi. Cela se traduit aussi par la composition du Conseil dont huit membres sont nommés par SM Majesté le Roi, le même nombre par les deux chambres du Parlement et 11 membres issus du tissu associatif. Cela donnera au Conseil une marge d'action et de liberté importante, commente-t-il. Khadija Erriyadi, présidente de l'AMDH, indique que l'association se réunira incessamment pour débattre largement de la question, en l'occurrence les prérogatives attribuées et le règlement qui régit le Conseil national des droits de l'Homme, et publier un communiqué exprimant la position de l'organisation à ce sujet. Elle ne s'est pas empêchée, toutefois, de critiquer la non implication des organisations des droits humains marocaines quand à la création du Conseil national des droits de l'homme (CNDH) qui remplace l'ancien Conseil consultatif. Selon son avis personnel, la conjoncture actuelle requiert des changements en profondeur, notamment la mise en place d'une constitution démocratique au lieu de se contenter de solutions de replâtrage. Lequel contexte, indique- t-elle, est marqué par des reculs sérieux et violations flagrantes qui continuent à miner le champ des droits de l'Homme et l'absence d'une justice équitable et indépendante. Et d'ajouter que l'ancien Conseil consultatif n'a pas pu apporter un plus qualitatif en la matière. « Mis à part les débats et les rencontres, le CCDH n'a pas assumé sa responsabilité et n'a pas réussi à refléter dans ses rapports la vérité sur les infractions et les atteintes commises à l'encontre des droits de l'Homme dans notre pays », regrette-t-elle Pour Aziz El Ouadie, l'un des fondateurs d'Amnesty Maroc militant des droits de l'Homme, la nomination de Driss El Yazami et Mohamed Sebbar à la tête du CNDH est un hommage à Feu Driss Benzekri et à tout le travail qu'a fait l'Instance Equité et Réconciliation. MM. El Yazami et Sebbar sont connus pour être des militants des droits de l'Homme qui ont contribué, chacun à sa manière, à ce processus de réconciliation, souligne El Ouadie. Le plus jeune détenu politique au Maroc a précisé qu'il est temps de passer à l'application et la concrétisation des recommandations de l'IER, et surtout l'intégration sociale des victimes des années de plomb.