Avant de s'approprier un style musical, il est nécessaire d'abord de bien le connaître, de le maîtriser pour y exceller et réussir pour mener à bien tout projet, a affirmé le chanteur, compositeur et musicien gnaoui, Abdelmajid Bekkas. Les groupes en herbe qui s'approprient le style gnaoui doivent, en plus de l'intuition, s'abreuver des connaissances, des notions techniques afin de réussir leurs créations musicales, a conseillé ce maître gnaoui à l'occasion de l'obtention du prix Al Farabi. Cette récompense vient en reconnaissance d'une riche carrière artistique et un couronnement pour l'apport de Bekkas à la musique marocaine, à cette mixture qu'il a si bien concoctée d'une musique gnaouie et africaine qui transporte dans l'univers magique de la transe. “Tout en suivant des études de Sciences de l'Information et des cours de guitare classique au conservatoire, je jouais du Banjo au sein de groupes du “Jil”, à l'image de Nass El Ghiwan, très en vogue à l'époque”, s'est remémoré Bekkas, rappelant qu'il a été initié à la musique Gnaouie par maître Ba Hoummane à Salé, où il est né et vit. Cet auteur, compositeur, musicien et interprète originaire de Zagora a su s'ouvrir, en chemin, sur de nouveaux genres musicaux tels le Jazz et le Blues, tout en conservant cette quête d'authenticité, de signes identitaires pour sauvegarder, perpétuer la musique gnaouie. “C'est en incorporant les instruments occidentaux que le jazz est devenu ce qui l'est maintenant”, a affirmé ce connaisseur de l'évolution de la musique gnaouie. “Chaque musicien ou Maalem a sa personnalité, sa technique de jeu et son propre style, mais l'objectif de la musique gnaouie reste le même, la guérison des âmes”. Bekkas plonge dans le Jazz, Blues et la Soul Music et, en tant que guitariste et chanteur, monte son premier groupe dans les années 80 avant de former le “Gnaoua Blues Band”, tout en partageant son temps entre la composition, l'enseignement de la guitare, les concerts et l'enregistrement de CD. En 2001, Bekkas enregistre l'album “African Gnaoua Blues” à Bruxelles, qui lui a permis de porter, pour la première fois, son art en Europe. Depuis, Majid multiplie les expériences musicales internationales avec les plus grands Jazzmen et de musique du monde à l'instar, entre autres, de Archie Shepp, Randy Weston, Joachim Khun, Louis Sclavis, Jamaleddine Tacoma, Morinio Garay. Cet artiste de talent, nominé au prix “Django d'Or” en 2004, a représenté le Maroc dans la composition dédiée aux artistes africains “Desert Blues” par sa composition “Daymallah”. Créateur de “L'African Gnaoua Blues”, Bekkas est, de toute évidence, l'ambassadeur idéal via l'Occident, de cette nouvelle forme d'expression musicale issue de la musique spirituelle de transe gnaouie, métissée au Jazz et au Blues de sources africaines, estime Hassan Migri, président fondateur du comité national de la musique du Maroc et membre du conseil international de la musique (CIM). Son charisme sur scène, sa voix sensuelle de chanteur gnaoui et sa virtuosité au Hajhouj, prêtant à l'envoûtement et la transe, font de lui le digne représentant de la culture gnaouie issue du métissage du patrimoine ancestral musical, arabo-berbère et africain à tendance sacrée. Grâce a son exceptionnel univers de créativité, métissage et mélange musicaux, cet artiste expérimenté a pu s'affirmer, promouvoir et mettre en valeur la musique mystique gnaouie pour qu'elle soit reconnue et appréciée par les autres pays et cultures du monde entier. Actuellement, il partage son temps entre les concerts, la création artistique et la réalisation des rencontres musicales dans la cadre du Festival “Jazz du Chellah” dont il est directeur artistique depuis sa naissance en 1996. La cérémonie de remise du prix Al Farabi aura lieu mercredi au Théâtre Mohammed V de Rabat, dont l'invité d'honneur est le professeur de musique et chercheur musicologique, Belaid Akkaf, en présence de plusieurs personnalités et stars de la musique gnaouie. Le trophée Al-Farabi récompense des chanteurs ou musiciens pour leur contribution à l'art marocain. Il est soutenu par le ministère de la Culture et parrainé par le Conseil international de la musique (maison de l'Unesco) en partenariat avec l'Association Bouregreg.