D'abord, on retiendra ceci : la réforme budgétaire de l'Etat marocain est une urgence. Cela passe par la refonte de la loi organique relative à la loi de finances et la réforme de la comptabilité de l'Etat. De l'avis des experts, réunis à l'occasion du 4ème colloque franco-marocain sur «la nouvelle gouvernance des finances publiques», tenu samedi et dimanche à Rabat, la réforme du budget de l'Etat devrait renforcer la transparence dans la gestion des deniers publics. Le ministre de l'Economie et des Finances, Salaheddine Mezouar, le dira clairement : la réforme du budget de l'Etat engagée au Maroc «marquera le dépassement de la simple logique d'encaissement et de décaissement pour privilégier une véritable comptabilité d'exercice à forte valeur ajoutée en ce qui concerne la dimension patrimoniale et l'appréhension des opérations financières selon une logique de droits constatés». Les réformes récentes engagées par le Maroc en matière de renforcement de la gouvernance des finances de l'Etat ont permis aux finances publiques de bénéficier d'un «niveau élevé de fiabilité, de sécurité et de transparence ainsi qu'une meilleure maîtrise des évolutions budgétaires et financières», devait souligner M. Mezouar. L'argentier du royaume a notamment cité la mise en place du système de gestion intégrée de la dépense et la réforme de la fiscalité de l'Etat. Respect des règles de rigueur Tout en rappelant l'importance cruciale que revêt la thématique du colloque, le trésorier général du Royaume, Noureddine Bensouda, devait souligner, pour sa part, que la nouvelle gouvernance impose, le «respect des règles de rigueur, de discipline budgétaire et financière, et de consécration des valeurs d'éthique, d'intégrité, de transparence et de reddition des comptes». Il faut dire que cette rencontre de deux jours a permis d'aborder, sous forme de tables rondes, plusieurs thèmes de grande importance, dans un contexte de sortie progressive de crise économique et financière. Intervenant à l'ouverture de la première table ronde sur «Quels instruments clés de la réforme budgétaire de l'Etat», le professeur universitaire et ancien ministre des finances, Mohamed Berrada, a noté que la fixation des objectifs et des indicateurs de performance, la responsabilisation des acteurs, la transparence, ainsi que l'harmonisation des systèmes comptables constituent des outils cruciaux pour la réussite de toute réforme budgétaire. Il a également mis l'accent sur l'importance d'adopter des outils modernes dans la gestion budgétaire, notamment la mise en place d'un système d'information, l'évaluation permanente, la coordination et le respect des délais dans l'exécution des budgets. M. Berrada a, en outre, souligné l'importance de la formation et du développement d'une économie du savoir afin de préparer de futurs responsables capables de relever les défis de la mondialisation et mener à bien les réformes adoptées dans le domaine de la gestion publique en général. Restituer en temps réel les informations De son côté, le directeur du budget au ministère de l'Economie et des finances, Abdellatif Bennani a indiqué dans une intervention sur «le budget de résultats: quelles perspectives» que ce type de budget est une nouvelle approche dans la gestion des finances publiques pour passer de l'optique «moyen» à l'optique «résultat». Ce processus, a-t-il ajouté, ne peut se réaliser qu'avec une relation organique entre les objectifs à atteindre, les ressources à mobiliser et les indicateurs de performances accompagné d'une logique d'évaluation et de reddition des comptes. S'agissant de la réforme de la comptabilité de l'Etat, le directeur de la réglementation et de la normalisation comptable, à Trésorerie générale du Royaume (TGR), Abdelkrim Guiri a, quant à lui, noté que cette réforme constitue un chantier d'envergure nationale notamment de par les changements profonds qu'elle implique pour les finances de l'Etat et le processus global de réformes visant la modernisation de l'administration. Cette réforme, précisait M. Guiri, a pour objectifs de retracer de manière fidèle et exhaustive l'intégralité des opérations de l'Etat, produire une information comptable et financière fiable, pertinente et rapide, faciliter le contrôle des finances publiques et rationaliser la gestion de la trésorerie de l'Etat. La décision de la mise en place du GID procède de la volonté gouvernementale visant à impulser de l'efficacité et de l'efficience dans l'action de l'administration, souligne de son côté, le directeur de l'entité de Gestion intégrée de la dépense (GID) à la TGR, Mohamed Saad El Alaoui. M. El Alaoui a fait savoir, dans son intervention sur le thème «le système intégrée de la dépense », que le GID a pour objectifs de simplifier les circuits et procédures d'exécution de la dépense, réduire les coûts et des délais de traitement des actes de la dépense, restituer en temps réel les informations relatives au rythme d'exécution de la Loi de finances et consolider le principe de la déconcentration de la gestion de la dépense. Impact des mesures dérogatoires Selon le Directeur général des impôts (DGI), Abdellatif Zaghnoun, il existe deux voies «possibles» pour améliorer les recettes fiscales : la réduction des dépenses fiscales et la lutte contre la fraude et l'évasion dans ce domaine. Pour avoir une meilleure maîtrise des dépenses fiscales, il faut procéder à une suppression progressive des exonérations et des réductions et, en même temps, avoir une meilleure évaluation de l'impact économique et social des mesures dérogatoires, a notamment souligné la patron du fisc. Et d'ajouter que le secteur informel constitue une préoccupation constante des pouvoirs publics, en étant responsable de la perte de recettes pour le budget de l'Etat et du maintien de taux d'imposition élevés sur les unités organisées, a encore relevé le Directeur général des impôts. M. Zaghnoun a fait remarquer que pour améliorer le contrôle fiscal, l'Administration devra modifier son mode opératoire, en prévoyant des contrôles fiscaux ponctuels et simplifiés, améliorer la programmation du contrôle en se basant sur le système d'analyse risque et veiller au renforcement de l'organisation et de la qualité du contrôle fiscal en s'appuyant sur des vérificateurs expérimentés et pluridisciplinaires.