Les autorités russes ont été contraintes de déclarer un gel temporaire des exportations des céréales, à compter du 15 août courant, en écho à des demandes de protection du consommateur et de satisfaction des besoins domestiques, alors que Moscou espérait, cette année, renforcer sa position sur le marché mondial. Des décideurs considèrent comme "logique et réaliste" cette orientation à cause de la sécheresse qui frappe les différentes provinces du pays, avec une révision à la baisse de la récolte céréalière qui devra chuter du quart, selon le ministère de l'Agriculture qui tablait initialement sur une production de 100 millions de tonnes. Les experts ont été divisés sur l'évaluation de la démarche du gouvernement. Au moment où une spécialiste de la commercialisation défend la politique officielle arguant que cela va modérer la frénésie spéculative et préserver l'équilibre du marché local, le président du groupement des producteurs céréaliers estime que cette décision "affectera la réputation de la Russie en tant qu'exportateur crédible des céréales", ce qui causera l'annulation de plusieurs contrats, à l'image d'une commande égyptienne de 180 mille tonnes. "Les clients traditionnels de la Russie pourraient se rabattre sur d'autres fournisseurs pour satisfaire leurs besoins, avec la possibilité de la perpétuation de cette situation au cours des années à venir et, par conséquent, la perte de ces marchés de longue date", a-t-il mis en garde. Le gel des exportations sonne comme une réponse aux vŒux d'un bon nombre de producteurs et d'exportateurs qui avaient urgé l'exécutif de prendre une telle décision à cause de la contraction de la récolte qui complique la tâche d'honorer leurs engagements internationaux et de se conformer aux exigences de qualité. La vague de sécheresse qui sévit dans le pays a eu pour cause immédiate la hausse des prix des céréales dans certaines régions, alors que l'on craint la perspective du renchérissement des aliments du bétail et des denrées alimentaires, essentiellement les viandes et les produits laitiers. D'après certains experts, la Russie, qui a connu des productions record au cours des dernières années, serait confrontée à l'éventualité d'un recours à ses réserves stratégiques, estimées à 21,5 millions de tonnes, pour faire face aux conséquences des aléas climatiques, surtout que la farine est une denrée vitale pour les citoyens russes. Aux yeux des mêmes analystes, un tel scénario devrait se traduire par la hausse des cours mondiaux et de probables répercussions sur la sécurité alimentaire nationale et l'économie mondiale, alors que Moscou s'emploie, selon eux, à gagner en crédibilité auprès des acteurs internationaux.