De toute évidence, l'urbanisation d'Agadir, depuis la reconstruction au lendemain du séisme, est l'un des aspects les plus révoltants dans une ville émergente. D'abord, on ne peut passer sous silence l'anarchie qu'a connue la prolifération des lotissements antérieurs au point de se retrouver avec des unités urbanistiques bâtardes, occupant plus de la moitié des superficies bâties, en plus des piratages des lots perpétrés par les influents des anciens mandats communaux. A l'époque, les gouverneurs avaient juré de vider les conseillers de leur fibre “socialiste” et procédaient à des manœuvres d'accaparement, en connivence avec des élus prêts à céder aux tentations. Ces détourenements au grand jour exerçaient déjà un chamboulement pervers dans la physionomie architecturale et esthétique d'une ville érigée en pôle attractif aussi bien au niveau des populations que des investisseurs, vu son potentiel naturel et économique. La profusion des bidonvilles et des habitations insalubres constitue, en fait, des illustrations marquantes qui dévoilent ces pratiques illicites menées tambours battants par les barons des élections, en parfaite “harmonie” avec les agents de l'autorité. En effet, plus on met en place des opérations d'absorptions des agglomérations bidonviloises par-ci par-là, plus les masures végètent à une cadence galopante, un peu partout. Mais, à mesure que la machine infernale du promoteur immobilier baptisée actuellement “ Al Omrane” s'approprie une kyrielle de terrains, y compris ceux qui renferment encore les taudis épars de la ville, nombre de citoyens se réfugient dans les piémonts, après avoir bénéficié, pour une bonne partie, des droits au recasement ailleurs dans le cadre du réaménagement du logement économique destiné aux faibles revenus. Là encore, un effroyable fait accompli prenait forme et se répandait comme des tâches d'huile, sous les yeux des autorités qui en tiraient grand profit en procédant au soudoiement à coups de millions. Aujourd'hui, tous ces versants sont maculés de constructions anarchiques qui poussent comme des champignons, sans sécurité ni équipements de base et qui acculent à l'octroi de l'éclairage, de l'eau potable, de l'école...Voilà donc où ont mené l'incivisme et l'illicité, orchestrés par les agents de l'autorité , les élus sans scrupule et les spéculateurs frauduleux, jetant la ville dans un réel chaos à travers les “bombes à retardement” placées ça et là aux piémonts dans l'insécurité la plus totale . On ne peut donc parler d'économie sociale, encore moins en été où les demandes s'intensifient avec le retour au bercail des résidents marocains à l'étranger. Nonobstant, toute une ébauche créative voit le jour, en terme d'aménagement de la ville, au moment où on mène une véritable révolution verte, avec l'incorporation du système d'irrigation des espaces verts à la fois rationnel et pratique et une véritable campagne d'installations socio-éducatives. La promenade à la corniche demeure, dans ce sens, innovation estivale de grande valeur, là où les vacanciers marocains se réjouissent, alors que nombre de touristes étrangers ne programment Agadir sur leur agenda que parce que là bas, on est parvenu, entre autre, à doter le produit d'une réalisation splendide telle que la promenade s'étendant sur plus de cinq kilomètres, ponctuée par un autre fleuron hors pair qu'est la Marina qui, à elle seule, draine un nombre important de visiteurs, notamment les adeptes des croisières. Il y a lieu, néanmoins, de déplorer certaines anomalies urbanistiques et environnementales qui altèrent cette économie estivale florissante. Tout d'abord, on s'amollit, se dérobe et s'efface même devant l'anéantissement dont sont sujettes les dunes par les voracités des groupes hôteliers. Ce patrimoine naturel qui faisait autrefois le prestige de la première station balnéaire du royaume était progressivement saccagé sans que les autorités n'aient réagi à temps pour arrêter ce massacre. Si on se réjouit du déferlement des investissements en matière de tourisme et d'hôtellerie, encore faut-il que ces projets d'envergure respectent comme il se doit les normes requises , les réaménagements en place et les équilibres de l'écosystème aussi bien de la faune que de la flore. A propos du secteur touristique, Agadir, renfermant, depuis longtemps, presque le tiers de la capacité d'accueil nationale, est en passe d'accuser des reculs inquiétants dans nombre de structures d'hébergement. Hormis des établissements hôteliers qui, pratiquement, ne sont plus maîtres d'eux-mêmes puisqu'ils sont objets d'asservissement, à la merci de leurs tours opérateurs, le reste trouve toutes les peines du monde à subsister. Certains “moribonds” s'en prennent, malheureusement, à leur personnel qu'ils licencient froidement par dizaines. D'autres s'adonnent à toutes sortes de pratiques sans pudeur pour joindre les deux bouts. Force est de constater que même les « tout compris » qui ne cessent de porter préjudice à l'un des piliers économiques phares du pays, se plient l'échine devant le diktat de leurs hégémonistes, en tolérant à bras ouverts une clientèle des plus médiocres, infestant les hôtels de haut standing à des tarifications dérisoires. Ce laisser-aller fantaisiste dont font preuve les dragons de l'industrie du tourisme international absorbant les petites créatures du domaine, ne fait qu'hypothéquer une vision nationale concertée et performante, mettant en relief le potentiel naturel, climatique, infrastructurel spécifique et volontariste de toute une nation en pleine effervescence développementale. Ne serait-il pas plus judicieux de renforcer, pour de bon, le tourisme intérieur dont les adeptes, moyenne et petite bourse, sont empreints de voyage et d'aventure ? Il est vraiment scandaleux et condamnable qu'un touriste marocain dans son propre pays paie une chambre pension complète dans un hôtel quatre é toiles à plus de mille dirhams, alors que, juste à côté de lui, dans le même hôtel, un touriste étranger en « tout inclus » ne débourse que moins de deux cents dirhams, tous frais confondus ? Pire encore, notre compatriote, bon vivant de nature, dépense sans compter et se fait aussi bon payeur à l'égard des taximen, des bazaristes, des restaurateurs,…, en dépit des contraintes boursières, tandis que le visiteur étranger, arnaqué jusqu'aux dents par cette désastreuse formule «all inclusive», ne sort pratiquement pas un rond troué, même pas de quoi glisser aux serveurs, très mal au point par cette formule alarmante. L'état a donc tout intérêt de confronter, avec sérieux et courage, cet ogre du « tout compris » et préserver notre produit national de cette calamité dramatique qui submerge nos hôtels. Car en terme de stratégie touristique nationale, c'est bien l'Etat qui décide, après mûre et inclusive concertation avec les professionnels du métier, et non pas les barons des tours opérateurs qui exercent une mainmise révoltante. L'encouragement du tourisme intérieur constitue une nécessité incontournable, à l'instar des nations résolument tournées vers ce type d'option économique autonome et rentable, particulièrement en été. Avec l'édification de la nouvelle autoroute Marrakech/Agadir, on peut prétendre accélérer cette démarche. En moins de 2 heures de la cité ocre et de 5 de la capitale du royaume, ce réseau autoroutier, récemment mis en marche est en passe de mettre le feu dans un itinéraire qui, naguère, semait l'agacement et le risque. Outre son aspect utilitaire et sécuritaire, la nouvelle réalisation compte parmi les supports transporteurs les plus attractifs au plan panoramique, de par les splendeurs des sites de l'arrière pays qu'elle offre, tout au long du trajet. Depuis un certain moment, les usagers de part et d'autre ne cessent d'exalter ces donnes des plus salvatrices, en dépit de quelques gênes relatives aux pentes irritantes. Cependant, il convient ici de soulever certains désagréments qui peuvent, à coup sûr, survenir, particulièrement dans la destination du Souss qui, sans nul doute, constituera le pôle d'attraction encore plus intensifié, particulièrement en périodes estivales. Tout d'abord, il faut bien souligner que la priorité sectorielle s'est constamment focalisée, rappelons-le, sur la fondation des unités hôtelières haute de gamme, en front de mer, au détriment des structures d'accueil de masse, en second et troisième ligne. On a beau arborer le slogan du « tourisme interne » dans une ville qui, chaque année en été, reçoit des multitudes de compatriotes venant de toutes les régions du Maroc, chercher la clémence du climat et les charmes de la baie, considérée, il est vrai comme l'une des plus belles du monde. En ce moment des voyages, on se demandera où vont loger les visiteurs qui, fort motivés par les aisances que procure l'autoroute, prendront d'assaut la capitale du Souss, par centaines de milliers, si l'on sait que les capacités d'hébergement des hôtels et résidences classés ne dépassent pas les 26 000 lits, sachant que plus de 14 000 se trouvent dans un état de délabrement lamentable. Pour les non classés, qui se condensent dans la quatrième ligne du côté du fameux quartier de Talborjt, sont encore sordides et inappropriés pour des familles en quête de confort, de paix et surtout de scrupule. Depuis la pose de la première pierre de l'autoroute, en janvier 2006, on n'a donc jamais pensé à anticiper l'accompagnement de ce projet d'envergure, par l'incitation à l'investissement en direction des projets hôteliers des 2 et 3 étoiles, destinés aux flots humains nationaux qui, quatre ans après, se déferleront en nombres explosifs. Malheureusement, pendant ce temps, l'ancien Wali était beaucoup plus préoccupé par le déferlement des capitaux immobiliers au Hay Mohammedi, plus juteux et rentables, mais aux répercussions sociales calamiteuses, que par des anticipations de ce genre. Résultat ; des bannières de constructions R+10 dans le lotissement en question, sans équipements sociaux, qui pullulent comme des bombes à retardement et des assiettes litières détériorées et amenuisées dans les hôtels « luxueux », sans vision ni diversification en perspective. On s'est retrouvé donc avec des déceptions accrues au sein des familles qui, auréolées par les fastes de l'autoroute et les beautés de la corniche, ont peiné pour trouver où caser dans une ville saturée. Quel gâchis ! La nouvelle gestion régionale, remédiera-t-elle à cette déficience, dans un proche avenir? Il ne fait pas de doute que, vu la volonté affichée du nouveau responsable dont les compétences en terme de tourisme et de civisme ne sont plus à démontrer, Agadir renouera avec des lendemains plus enchanteurs.