M'Barek Tafsi Le débat que la lettre ouverte N°2 du Parti du Progrès et du Socialisme au Chef du gouvernement a suscité autour notamment des chiffres relatifs au nombre des Ramedistes, dont les noms ont été transférés à l'AMO-TADAMON, est à saluer, selon le président du groupe du progrès et du socialisme à la Chambre des représentants, Rachid Hamouni. Pour lui, un tel débat se doit d'être franc et sincère pour répondre à toutes les interrogations au sujet du nombre exact des Marocaines et Marocains éligibles à AMO-TADAMON, a-t-il estimé dans un entretien avec le site « Alyoum24 ». Sur les 18 millions de Ramedistes, seuls 10 ont été transférés Au moment où le PPS soutient qu'ils sont en réalité au nombre de 18 millions de Ramedistes et que lors de leur transfert automatique au système de l'AMO-TADAMON, 8 millions d'entre eux ont été perdus en cours de route, alors que le chef du gouvernement et récemment le ministre délégué auprès de la ministre de l'économie et des finances, chargé du budget, Fouzi Lekjaâ, estiment, eux, que ce nombre n'existe pas. Pour eux seuls, il n'y a que 10 millions de bénéficiaires effectifs. S'exprimant lors d'une rencontre organisée, mardi 28 mai, Lekjaa a notamment affirmé que le nombre de 18 millions de bénéficiaires du « RAMED » correspond au nombre cumulatif de bénéficiaires depuis le lancement du Régime d'Assistance Médicale en 2012 jusqu'à fin 2022, incluant ceux qui ont perdu leur éligibilité à ce système. Il a toutefois précisé que le nombre de bénéficiaires dont les données ont été transférées du « RAMED » à « AMO Tadamon » en décembre 2022 est de 10 millions de personnes, et non de 18 millions, comme le soutient le PPS dans sa lettre ouverte. Pour lui, l'ensemble des bénéficiaires du « RAMED » ont été automatiquement éligibles à « AMO Tadamon » et ont eu une période d'une année pour s'inscrire au Registre Social Unifié afin de continuer à bénéficier de « AMO Tadamon ». À l'issue de cette période, le nombre de bénéficiaires est passé à 3,8 millions de ménages, soit environ 10 millions de personnes, ce qui correspond au même nombre de bénéficiaires du « RAMED » à fin 2022, a expliqué M. Lekjaa. Réagissant à ces affirmations, le président du groupe parlementaire du PPS a indiqué que le tableau présenté, lors de cette rencontre, confirme entre autres l'existence de 18 millions de Ramedistes, qui correspondent au nombre cumulatif des bénéficiaires depuis le lancement du RAMED en 2012 et jusqu'à fin 2022, incluant aussi ceux qui ont perdu leur éligibilité. Dans son exposé, Lekjaâ précise aussi que le nombre des bénéficiaires effectifs est de 10 millions, a ajouté Hamouni, qui soulève la question de savoir que signifient les bénéficiaires effectifs. S'agit-il de ceux qui ont bénéficié du service à l'hôpital parmi ces 18 millions ou autre chose? En fait et selon le directeur de l'Agence marocaine du médicament et des produits de santé (AMMPS), a rappelé Hamouni, c'est qu'au départ en 2012, les gens étaient enthousiastes et les demandes d'inscription au RAMED étaient élevées, en parallèle avec l'augmentation du nombre de l'utilisation de la carte RAMED. Malheureusement, selon toujours le directeur de l'agence, nombreux sont les Ramedistes dont les cartes ont expiré, qui n'ont pas jugé utile de la renouveler, étant donné la mauvaise qualité des services que cette carte leur permettait d'obtenir au niveau surtout de l'hôpital public. Réagissant en son temps à cette situation, le PPS appelait à une amélioration de ces services, a-t-il indiqué. Au fil donc des ans, le nombre des cartes RAMED distribuées a baissé à 10 millions de bénéficiaires effectifs, a-t-il dit, tout en réaffirmant que le nombre des 18 millions de Ramedistes a bel et bien existé à un certain moment donné. Il a également fait savoir que contrairement aux déclarations du gouvernement, selon lesquelles tous les Marocains bénéficient actuellement d'une couverture sanitaire, les parlementaires du PPS soutiennent que de telles affirmations sont loin de la réalité et que plusieurs centaines de milliers voir des millions de citoyennes et citoyens en sont privés. Il a fait savoir aussi que nombreux sont actuellement les parlementaires de l'opposition et de la majorité qui affirment avoir reçu des plaintes de la part de citoyennes et citoyens sans couverture médicale. Même Lekjaa, a-t-il dit, a reconnu l'existence de tels cas et fait savoir que le gouvernement va ouvrir la possibilité à tout le monde pour interjeter appel ou déposer plainte pour le réexamen de leur cas. Il est clair que tout le monde n'est pas couvert et il est faux de soutenir le contraire, étant donné que d'anciens Ramedistes sont aujourd'hui exclus du nouveau système. Les contradictions dans l'exposé des données Revenant à l'exposé de Lekjaa devant les groupes de la majorité, il a estimé qu'il comporte des contradictions. Il parle à un certain moment de 3,9 millions de ménages bénéficiaires de l'AMO-TADAMON. Ce qui correspond à environ 8 millions de bénéficiaires en y intégrant les ayant-droit, selon lui. Plus loin, il indique que le nombre des bénéficiaires transférés à l'AMO-Tadamon est de 10 millions et non de 18 millions. Leur transfert a été automatique et un délai d'inscription leur a été accordé. Au début de l'année 2023 et après l'expiration du délai qui leur a été accordé, le nombre des bénéficiaires, selon lui, est de 3,9 millions de ménages soit environ 10 millions au lieu de 8 millions cités plus haut. Ce qui fait ressortir une différence de 2 millions de bénéficiaires, a-t-il dit avant de poser la question de savoir où sont passés les deux millions de bénéficiaires. Tout ce qu'on peut dire à ce stade, c'est que le gouvernement est entrain de manipuler à sa manière les chiffres et que nombreux sont les citoyennes et citoyens, qui méritent une telle couverture sanitaire, qui en sont malheureusement privés. L'indice d'éligibilité aux aides repose sur des critères ambigus Répondant à une question concernant l'indice chiffré qui reflète la situation socio-économique de chaque ménage et par la même permet d'établir son éligibilité aux aides prévues dans chacun des programmes d'appui social, Hamouni a indiqué que le calcul de cet indice est entouré d'ambiguïtés. C'est ainsi que des citoyens ont réussi à s'inscrire et à bénéficier de cet appui dans un premier temps avant d'être surpris plus tard par la décision de les écarter, sous prétexte que leur indice a augmenté. A présent, les citoyens ne se soucient plus que de cet indice, qu'ils tentent de faire diminuer à travers le recours à tous les moyens en dissimulant par exemple des appareils électroniques ou un téléphone. Selon les critères appliqués, ne bénéficient pas du soutien direct celui qui a un compteur d'électricité en son nom, qui possède un vélomoteur ou qui se permet de se payer une recharge de 50 DH de son téléphone portable. A suivre la logique du gouvernement, quiconque a un téléphone est riche. Selon des statistiques, chaque Marocain a trois téléphones. Le critère des compteurs d'électricité aussi ne tient pas debout. Il en est aussi du critère du vélomoteur. Le gouvernement se doit en fait de faire savoir aux représentants de la nation et aux citoyens les moyens utilisés pour contrôler la véracité des données utilisées pour accepter ou rejeter les demandes relatives notamment à l'AMO-Tadamon. Le critère de 50 DH de recharge est le plus ridicule. Car il se peut qu'au début de la recharge, la personne soit considérée comme riche et une fois la recharge consommée, elle ne l'est plus. Les critères sont donc aberrants et injustes et il ne sert à rien de tenter de les corriger, puisqu'ils ne sont pas corrigeables. Pour le PPS, ceux qui doivent bénéficier du soutien doivent être inscrits sans obstacle, et ceux qui ne doivent pas en bénéficier doivent être écartés, comme c'est le cas des fonctionnaires et des salariés du secteur privé, qui ont leur couverture médicale. Pas d'amélioration du déficit budgétaire et l'endettement a atteint les lignes rouges Hamouni a également réagi aux explications concernant la situation économique du Maroc en 2023 et les affirmations, selon lesquelles le déficit budgétaire et l'endettement total du Trésor figurent parmi les indicateurs macroéconomiques qui ont évolué positivement. Cette tendance se poursuit en 2024 avec une amélioration de la situation des finances publiques au cours des quatre derniers mois par rapport à la même période de l'année précédente, a notamment indiqué Fouzi Lekjaa. Selon ce dernier, le déficit budgétaire dépassait les 7% en 2021. Avec une dette de 72% du budget de l'Etat, et tous ces indicateurs évoluent positivement actuellement. Commentant ces déclarations, Hamouni a fait savoir que la lecture de la courbe présentée par Lekjaâ montre le contraire. Selon cette courbe, le déficit budgétaire était de 4,7% en 2013, puis de 4,4% une année plus tard, puis de 3,8%, puis de 4%, puis de 3,2%, puis de 3,5%, puis de 3,3%, puis de 7% pour la période 2019/2020, c'est-à-dire celle qui correspond à la crise du Covid. D'après Hamouni, il est malhonnête de ne se baser que sur ce chiffre correspondant à une période de crise pour parler d'une tendance positive. L'honnêteté intellectuelle dicterait de comparer le taux qu'il considère comme indicateur de la tendance positive à l'année 2018 qui avait enregistré un taux de 3,3% de déficit budgétaire. La crise du covid représentait en fait une situation exceptionnelle pour le Maroc et le monde entier. En fait, il n'y pas eu de baisse significative du déficit budgétaire, à moins qu'il ne le compare à 7% de déficit budgétaire durant la crise du covid, qu'il a omis d'évoquer pour expliquer cette augmentation du déficit. Mais ce qui est encore malhonnête, c'est d'éviter de citer tous les facteurs de la guerre entre la Russie et l'Ukraine, la flambée des prix à l'échelle mondiale ou l'état de sécheresse dans le pays, pour expliquer pourquoi le Maroc n'a pas réalisé le taux de croissance de son économie, comme prévu dans le programme gouvernemental et pourquoi il n'a pas pu maitriser l'inflation. C'est de la mauvaise foi, a-t-on envie de dire. Il y a donc de la manipulation. Bref, le déficit de 7,1% de 2020 a été réduit à 4,4%, après avoir ajouté aux comptes de l'Etat le fonds du séisme et d'autres fonds sans oublier le produit de de la privatisation d'établissements publics : 80 milliards de Dirhams en deux ans. Quand on inclut tous ces fonds dans le budget, le déficit baisse évidemment. S'agissant de la dette publique, elle représente, selon Lekjaâ 72,2% du budget de l'Etat en 2020 et qui a diminué à 71,3 en 2023. Ici il parle de la dette du budget général et a exclu les établissements publics tels l'ONEE, les autoroutes. La dette publique est en réalité de 86%, c'est-à-dire qu'on a atteint les lignes rouges, a affirmé Hamouni. L'amélioration des recettes fiscales sans toucher les grandes fortunes S'agissant des recettes fiscales, il parle de 100 milliards de Dirhams, réalisés grâce aux efforts du gouvernement pour améliorer leur collecte. Mais il n'a rien dit en ce qui concerne la réforme fiscale à mettre en œuvre ou l'intégration du secteur informel qui emploie 30% de la population active, a-t-il dit, ajoutant qu'il n'a pas créé non plus d'impôt sur la fortune ou révisé à la hausse l'impôt sur les monopoles (Télécoms, hydrocarbures notamment). Tout ce qu'il a fait c'est qu'il a révisé un certain nombre d'impôts sur d'anciennes transactions entre les citoyens sans toucher aux grands fortunes et monopoles.