Nabil EL BOUSAADI En Afrique, les transitions sont élastiques. C'est le cas au Burkina-Faso où, ce samedi, le capitaine Ibrahim Traoré, aux commandes du pays depuis qu'il s'était emparé du pouvoir en Septembre 2022 en évinçant, par la force, le Lieutenant-Colonel Paul Henri Sandaogo, qui était arrivé aux commandes du pays quelques mois plus tôt, à l'issue d'un coup d'Etat en Janvier de la même année, a fait adopter, une nouvelle « charte de transition ». Adoptée, en quelques heures à peine, en l'absence des partis politiques traditionnels qui ont boycotté l'évènement, cette nouvelle « charte » qui est immédiatement entrée en vigueur et dans laquelle les quotas qui étaient alloués aux formations politiques pour les postes de députés de l'Assemblée législative de transition ont été supprimés, permet, désormais, au capitaine Ibrahim Traoré, non seulement de rester à la tête du pays, en tant que « Président », pour cinq nouvelles années, prenant effet à compter du 2 Juillet prochain, mais également d'être « éligible aux élections présidentielle, législatives et municipales » qui seront organisées afin de mettre fin au régime militaire. C'est dire que le nouvel homme fort du pays vise une « présidentielle à vie » même s'il lui faudra, pour cela, se débarrasser de l'uniforme militaire. Annonçant la création d'une nouvelle instance dite « Korag », dont la composition et le fonctionnement ont été laissés à la discrétion du chef de l'Etat, et qui a pour mission de « suivre et contrôler la mise en œuvre de la vision stratégique du pays dans tous les domaines et par tous les moyens », cette nouvelle charte prévoit, également, dans son article 22, que des élections pourront être organisées « avant cette échéance [de soixante mois] si la situation sécuritaire le permet » du moment que le Burkina-Faso est aux prises, depuis près de 10 années, avec une insurrection jihadiste qui a fait, à ce jour, plus de 20.000 morts et près de 2 millions de déplacés. D'ailleurs, pour assurer la sécurité du président, une centaine de russes de l'Africa Corps (nouvelle appellation du groupe Wagner) étaient venus, le 18 mai, à Ouagadougou, la capitale alors qu'en craignant des affrontements avec l'opposition, « les soutiens du régime » surveillaient en H24, depuis le 22 mai, les abords de la salle de conférence et menaçaient tous ceux qui voulaient se rendre à ces assises alors qu'ils entendaient véhiculer des idées allant à l'encontre du maintien d'Ibrahim Traoré à la tête du pays. Sachant, enfin, que dans son éditorial, le journal burkinabé « l'Observateur Paalga », a affirmé que cette « affaire » – à savoir, l'adoption de cette nouvelle charte de transition – qui a été «mâchée en amont, a été pliée en une journée, en à peine quatre-cinq heures chrono, sous les hurlements des partisans du régime qui manifestaient dehors » puisque personne n'est « assez fou pour ramer à contre-courant des désidératas du grand manitou », c'est donc que le nouvel homme fort du Burkina-Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, s'installe « dans la durée » mais attendons pour voir...