Evincé du pouvoir le 10 Avril dernier à l'issue d'une motion de défiance du Parlement, Imran Khan, l'ancien Premier ministre pakistanais et ancienne gloire nationale du cricket, refuse toujours de reconnaître sa défaite en invoquant le fait qu'il ferait l'objet d'un complot ourdi par l'étranger. Accusant les Etats-Unis d'avoir prêté main-forte aux « pilleurs » du Pakistan, que sont Nawaz Sharif et les familles Bhutto-Zardari, pour l'écarter du pouvoir, l'ancien chef de l'exécutif pakistanais exige la dissolution de l'Assemblée nationale et appelle ses compatriotes à descendre dans la rue pour faire tomber le gouvernement et pour exiger la tenue d'élections anticipées. Ainsi, en dépit de l'interdiction de tout rassemblement émise par les autorités d'Islamabad, Imran Khan avait organisé, mercredi dernier, dans tout le pays, une « marche des libertés » qui, dès le lendemain, avait fini par atteindre la capitale où l'armée avait été déployée en force. Cette « marche » ayant donné lieu à de multiples affrontements dans diverses villes du pays, l'ancien Premier ministre pakistanais avait menacé de faire sortir, de nouveau, dans la rue, deux millions de personnes avec pour seul objectif de faire tomber le « gouvernement importé », installé par une « conspiration étrangère », si l'organisation d'élections anticipées n'est pas annoncée, par le gouvernement de Shehbaz Sharif dans un délai de six jours. Son successeur qui n'a pas l'intention de céder a, dès le lendemain, rappelé, aux députés de la chambre basse du Parlement, que la date limite pour la tenue des élections législatives est fixée à Octobre 2023 et qu'à ce titre, il ne compte point se plier aux injonctions d'Imran Khan qu'il accuse de vouloir déclencher une guerre civile en ce moment où le pays fait face à une conjoncture économique particulièrement défavorable. Comptant 227 millions d'habitants et fragilisé par la pandémie du Covid-19, le Pakistan connaît, en effet, un endettement et une inflation record qui le mettent au-devant d'un risque de défaut de remboursement de sa dette – pour la deuxième fois de son histoire – et souffre, également, d'un amenuisement de ses réserves de change si bien qu'avec 10,1 milliards de dollars, il n'a pas de quoi couvrir plus de deux mois d'importations alors que les pourparlers qu'il a menés, du 18 au 25 mai, au Qatar, avec le FMI, au titre du déblocage d'une nouvelle tranche d'un prêt de 6 milliards de dollars conclu en 2019, ont été un échec dès lors que ce dernier lui a demandé d'entreprendre des réformes douloureuses comme la suppression des subventions sur le carburant et l'électricité que le gouvernement d'Imran Khan avait mises en place en Février dernier et qui grèvent lourdement les finances du pays qui souffre, par ailleurs, d'une sous-collecte structurelle des impôts. Autant de mesures que le gouvernement se trouve dans l'incapacité de mettre en œuvre de peur de provoquer la colère des habitants qui sont déjà fortement secoués par une importante hausse des prix des denrées alimentaires. La situation s'étant, par ailleurs, envenimée en plusieurs endroits du pays et de la capitale notamment, la Cour Suprême a ordonné au gouvernement de Shehbaz Sharif de laisser les marcheurs se rassembler à Islamabad, loin des bâtiments ministériels fortement protégés, et de libérer les quelques 1.700 personnes arrêtées, par la police, lors des perquisitions qu'elle avait effectué, dans la nuit de lundi à mardi, dans les maisons des partisans du Mouvement du Pakistan pour la Justice (Pakistan Tehreek-e-Insaf – PTI) fondé par Imran Khan en 1996. De quoi demain sera-t-il fait au Pakistan au vu de la très forte détermination de l'ancien Premier ministre pakistanais et de celle que lui oppose son successeur ? Attendons pour voir...