Khomsi Zoubida , cadre formateur au ministère de la Santé A l'occasion de la célébration de la Journée Internationale des Infirmières 2022, Al Bayane a donné la parole à Khomsi Zoubida , cadre formateur au niveau de la division de la formation du ministère de la Santé et de la protection sociale, enseignante en sciences infirmières, qui a bien voulu répondre à nos questions relatives à la profession infirmière au Maroc. Que vous inspire la journée internationale de l'infirmière ? Mme Khomsi Zoubida : La célébration de la journée internationale des infirmières, organisée par le ministère de la Santé, s'inscrit dans la politique des ressources humaines de la santé. Cette politique vise la valorisation et la motivation du capital humain, notamment le corps infirmier, et ce, de par des cérémonies organisées à travers toutes les régions du Maroc, en l'honneur des infirmières et infirmiers. Il est utile de rappeler que les infirmières et les infirmiers ont toujours accompagnés, les différentes réformes qu'a connues notre système de santé. C'est tout naturellement et en toute bonne logique qu'aujourd'hui, le ministère applaudi comme il se doit les efforts considérables déployés par les infirmières et les infirmiers, notamment dans les activités de prévention, et de lutte contre les épidémies. La plus belle preuve de cet engagement s'il en fallait une, c'est ce qu'on réalisés les infirmiers durant ces deux années lors de la pandémie de la covid-19. Mais, il faut aussi souligner le rôle qui est assuré par les infirmières dans la réussite des programmes de santé publique, la gestion des services de soins de santé, dans la formation et l'encadrement. Sans oublier la recherche scientifique. Que pouvez-vous nous dire au sujet de la formation des infirmières ? Il faut savoir que la profession infirmière a depuis notre indépendance accompagné le développement du system de santé, participé aux différentes reformes, tout en rappelant que la première école d'infirmières a été créée en 1943 à Rabat. Depuis cette date, se sont succédées les ouvertures d'autres écoles de formations d'infirmiers brevetés, d'infirmiers diplômés d'Etat, l'école des cadres du ministère de la Santé. Notre pays a connu plusieurs reformes de la formation des infirmiers et infirmières, et ce afin de répondre aux besoins émergents, et aux développent démographique de notre population. Actuellement, la formation de ce corps médical est assurée au niveau des Instituts Supérieurs des Professions Infirmières et Techniques de Santé (ISPITS). Ce sont des établissements de l'enseignement supérieur ne relevant pas des universités. Elles ont été créées par le décret n°2.13.658 du 30 septembre 2013. Ces ISPITS assurent la préparation et la délivrance des diplômes nationaux organisés en trois cycles d'études dans les domaines des Professions Infirmières et des Techniques de Santé (Cycle de la Licence professionnelle, Cycle de Master et Cycle du Doctorat). Il faut noter que le 2e cycle de la formation des infirmières et infirmiers est reconnu en tant que Master, et qui donne accès aux infirmiers aux études doctorales, surtout au niveau des établissements où la recherche est déjà structurée. Ce cycle n'est pas encore installé au niveau des ISPITS, mais dans un avenir proche cela sera opérationnel. Quoiqu'il en soit, le Système LMD, est un acquis pour les infirmières et infirmiers, un choix que le ministère de la Santé et de la protection sociale appuie avec force. En effet, ce choix a été amplement exprimé à l'occasion de la célébration de la journée internationale de l'infirmière, et le ministère de la Santé et de la protection sociale a organisé les premières assises de la recherche en sciences infirmières et techniques de santé, sous le thème : « la recherche en sciences infirmières et techniques de santé, au cœur de la refonte du système de santé » Notre pays manque d'infirmiers et d'infirmières, l'OMS et le CII, s'accordent à dire qu'il faut un minimum de 60 infirmiers pour 10.000 habitants pour assurer des soins valables. Notre pays ne compte que 9 infirmiers pour 10.000 habitants. Votre avis sur cette question ? Parmi les problèmes qui sont souvent cités, il y a celui de la pénurie des infirmiers et infirmières. C'est une réalité que nous ne pouvons pas occulter, mais cette pénurie des professionnels de santé est mondiale, pratiquement tous les pays de la planète sont confrontés au manque d'infirmières. Notre pays connait cette pénurie depuis les années 80, et depuis des efforts sont consentis pour remédier à la situation. Ce n'est pas facile comme peuvent le penser beaucoup de personnes, car pour former une infirmière polyvalente, une sage femme, un infirmier anesthésiste, un kinésithérapeute, les études sont longues, 3 années après le bac ... Il y a aussi celles et ceux qui poursuivent leurs études pour l'obtention d'un master, et ceux qui désirent préparer le doctorat dans le domaine des sciences infirmières, et là aussi ce sont des études ardues, longues ... Mais grâce à la création des ISPITS au niveau des différentes régions du Maroc, à l'augmentation des effectifs d'étudiants, le recrutement des lauréats par les régions, il y a des améliorations. Il y a lieu d'être optimiste, de grands projets voient le jour, de nombreux chantiers sont lancés. La formation des infirmiers n'est pas en reste, elle est inscrite comme une grande priorité du département de la santé. Parmi les revendications qui sont formulées par les infirmiers, il y a la création d'un ordre national des infirmiers, et l'élaboration du référentiel d'emploi et de compétences. Absolument, ce sont des revendications parmi tant d'autres qui figurent dans le dialogue social que les syndicats présentent au ministère de tutelle. Personnellement, en tant que personnel de santé concerné par ces aspects, qui sont importants pour le développement et l'avenir de la profession infirmière, je dois reconnaitre que des efforts sont consentis de part et d'autre, et que des avancées sont perceptibles, que l'ordre national des infirmiers verra bientôt le jour inchallah . Pour le deuxième point, il faut savoir que la profession infirmière évolue sans cesse, que ces évolutions exigent une adaptation constante, et donc des compétences avérées qui touchent à plusieurs aspects et domaines dans la pratiques quotidienne des soins, des compétences d'organisation et de gestion, relationnelles, de communication et d'information.... La pratique infirmière est aujourd'hui synonyme de qualité, de sécurité pour les patients et pour les professionnels de santé. Chaque infirmière, chaque infirmier qui a à cœur la noblesse de ce métier, se doit dans l'exercice de ses fonctions, au niveau des établissements de soins de santé de base, des établissements hospitaliers, ou enseignants au niveau des instituts supérieurs des professions infirmières et des techniques de santé (ISPITS) , d'encourager le développement de la recherche en sciences infirmières. Car celle -ci , contribue grandement à l'élaboration des meilleures pratiques de soins, à hisser haut et fort l'image de la profession, et à redorer le blason des infirmiers et infirmières qui en font un métier. L'infirmière d'aujourd'hui a beaucoup changé, elle doit s'adapter et être à jour, agir avec tact, dextérité et compétence dans la mesure où la médecine évolue plus vite que l'homme. Dans notre métier, il n'y a pas de place pour la médiocrité. C'est pourquoi il est important pour notre pays, pour les décideurs et les responsables, d'investir dans la profession infirmière.