Nabil EL BOUSAADI Soucieuse de limiter, autant que possible, l'influence des Etats-Unis et de leurs alliés de l'OTAN dans son voisinage immédiat en ce moment où américains et européens l'accusent d'y préparer une offensive militaire contre l'Ukraine, la Russie a dévoilé, ce vendredi, ses propositions à travers deux textes prévoyant notamment l'interdiction de tout élargissement de l'alliance atlantique et de l'établissement de bases militaires dans les pays de l'ancien espace soviétique. Ainsi, selon les documents présentés par Moscou, les membres de l'OTAN – avant l'élargissement de l'alliance atlantique vers l'Europe orientale – devraient s'engager à ne pas disposer de forces ou de missiles de courte et moyenne portée sur d'autres territoires européens, à ne pas s'adonner à des exercices militaires ou à des vols de reconnaissance à proximité de la frontière russe, à ne procéder à aucun élargissement en direction de l'Ukraine, la Géorgie ou de tout autre pays candidat et, enfin, à ne conduire aucune activité militaire sur le territoire ukrainien, en Europe orientale, en Asie centrale ou dans le Caucase du Sud. Une lecture minutieuse des documents présentés par Moscou montre clairement que la Russie demande à l'OTAN de se saborder, de renier ses principes, d'oublier ses engagements et de replier ses forces alors même que, de son côté, elle entend maintenir une présence militaire exceptionnelle à proximité de l'Ukraine pour pouvoir contrecarrer toute éventuelle opération d'envergure. Or, tout cela semble difficile à mettre en œuvre voire même impossible. En outre, s'il est fort inhabituel de la part de diplomates de présenter publiquement ce type de documents de travail étant entendu que c'est la discrétion qui permet de donner, aux négociateurs, la latitude nécessaire, le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Riabkov, a tenu à préciser, en présentant ces documents à la presse, qu'« il est essentiel que les garanties de sécurité pour la Russie soient couchées sur le papier pour qu'elles aient force de droit » et saisi cette occasion pour proposer l'ouverture de négociations dès « samedi 18 décembre » à Genève. Mais si Jen Psaki, la porte-parole de la Maison Blanche, Jen Psaki, a répondu qu'il n'y aurait « pas de discussions sur la sécurité européenne sans (les) alliés et partenaires européens », un haut responsable américain a déclaré, au cours d'un point de presse, que les Etats-Unis restent, néanmoins, « prêts à discuter » de ces documents même s'ils comprennent « certaines choses que les Russes savent inacceptables ». Il ajoutera, par ailleurs, que « s'il y a une agression de plus en Ukraine, cela aura des conséquences massives et cela coutera très cher ». A cela, la partie russe a rétorqué que « les deux documents ne sont pas formulés comme un menu où l'on peut choisir ce qui nous intéresse » et rejeter le reste mais comme un tout à prendre comme tel. Aussi, pour ne point offrir à Moscou la satisfaction d'un refus qui servirait de prétexte à une invasion militaire de l'Ukraine, l'administration Biden s'est dite prête à lui adresser une réponse formelle « la semaine prochaine ». Au vu de tout cela, il semble donc que les deux protagonistes se soient engagés dans une partie de poker menteur où, dans le seul but de gagner du temps, chacun d'eux prétend être en mesure de faire une proposition constructive. Quand, comment et sur quoi tout cela débouchera-t-il alors que la Russie demande clairement à l'OTAN de renier ses engagements, voire même de se saborder ? Attendons pour voir...