Nabil EL BOUSAADI En Europe, le flux migratoire bat son plein et, depuis le début de cet été, ce sont des millions de migrants – majoritairement originaires du Moyen-Orient – qui ont foulé le sol du vieux continent en traversant la frontière biélorusse à telle enseigne que l'Union européenne a nommément accusé le président Alexandre Loukachenko d'avoir, en représailles aux sanctions économiques qui ont été infligées à son pays par l'UE, délibérément fait venir des ressortissants de pays du Moyen-Orient et d'Afrique et de leur avoir fait passer clandestinement les frontières qui séparent son pays de la Lituanie, la Lettonie et la Pologne ; un procédé qui a été qualifié, par la Pologne et les pays baltes, d'« attaque hybride ». Pour contrecarrer cet important « assaut migratoire », la Pologne a immédiatement décrété l'Etat d'urgence dans sa zone frontalière, y a dépêché des milliers de soldats et légalisé la pratique du refoulement direct. Mais, après la mort de plusieurs demandeurs d'asile, les Nations-Unies ont réclamé une action urgente pour sauver des vies et éviter des souffrances à la frontière entre l'UE et la Biélorussie. Et si, à l'instar de 12 autres Etats-membres de l'UE, la Pologne a demandé à cette dernière de financer l'érection de « barrières » à ses frontières, cette demande a été rejetée par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, au motif que l'UE n'est pas disposée à financer la construction de barrières à ses frontières et la semaine dernière, l'Allemagne avait rappelé aux dirigeants européens réunis en sommet à Bruxelles, une position commune de la Commission et du Parlement européens disant qu'« il n'y aura pas de financement de barbelés et de murs ». Or, en insistant sur le fait que la Pologne a été « attaquée » par la Biélorussie, le Premier ministre nationaliste Mateusz Morawiecki a déclaré que la construction d'un mur est impérative car elle seule permettra de « protéger » la Pologne d'un nouveau flux migratoire. Et bien que l'Etat d'urgence instauré par Varsovie ait été critiqué par des journalistes et des associations caritatives dès lors qu'il les empêche de s'approcher de la frontière – ce qui a contraint l'UE à appeler à la « transparence » – le Parlement polonais a définitivement validé, ce vendredi 29 Octobre 2021, le projet gouvernemental afférent à la construction d'un mur de près de 100 kilomètres à la frontière orientale de l'Union européenne séparant la Pologne de la Biélorussie pour un coût de 353 millions d'euros après que le président polonais Andrzej Duda ait annoncé qu'il allait signer cette loi dès qu'elle sera approuvée par l'Assemblée Nationale. Pour rappel, quand en Août dernier, la Pologne avait doublé les effectifs de ses soldats stationnés dans la zone frontalière orientale, des migrants originaires d'Afghanistan étaient restés près de 3 semaines bloqués à la frontière. Aussi, furent-ils contraints, d'après une ONG sur place, de camper à proximité du territoire polonais puisque, pour ne point céder au « chantage » du président biélorusse Alexandre Loukachenko, les gardes polonais les avaient empêchés de franchir la frontière à l'effet de demander l'asile au gouvernement de Varsovie. Et quand l'Agence de l'ONU pour les réfugiés, le Conseil de l'Europe et la Cour européenne des droits de l'homme avaient exhorté la Pologne à fournir une aide humanitaire aux migrants, cette dernière leur avait répondu qu'elle ne pouvait apporter son aide que moyennant le consentement des autorités bélarusses. Quel sort sera réservé à ces cohortes de migrants pris entre le marteau et l'enclume après avoir été contraints de fuir des pays en proie à la guerre, la misère, la faim et les épidémies ? Attendons pour voir...