Par Omar Achy (MAP) Le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (BM) réunissent, à partir de ce lundi, leurs assemblées annuelles du printemps, encore une fois sous un format virtuel, signe que la pandémie de coronavirus continue de planer sur le monde. Les nouvelles vagues d'infections sont sources d'incertitudes persistantes. Mais l'heure est clairement déjà aux réflexions sur la reconstruction sur de nouvelles bases dans l'espoir d'une relance résiliente, inclusive et plus respectueuse de l'environnement. Dressant le cadre général des débats, le président du Groupe de la BM, David R. Malpass, souligne que le conclave offre l'occasion de «dialoguer avec nos partenaires sur des questions urgentes comme l'action sur les fronts du changement climatique, de la dette et des inégalités, ainsi que les efforts déployés en vue d'assurer une reprise verte, résiliente et inclusive». La récession due à la pandémie du COVID-19 a été en effet lourde de conséquences pour l'économie mondiale. Et la reprise s'annonce poussive et hétérogène, tellement la crise a aggravé les inégalités entre pays avancés et pays pauvres. Cet écart se creuse davantage par la disparité d'accès aux vaccins qui risque, avec le niveau de circulation de nouvelles souches du virus, d'être déterminant pour les perspectives d'évolution de l'économie mondiale. La directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, a été on ne peut plus claire sur l'importance cruciale de l'accès équitable au vaccin partout dans le monde pour assurer une reprise durable. Certes, elle se veut optimiste au regard des nouvelles projections de croissance pour 2021 qui devrait être, selon elle, «encore plus forte» que les prévisions de 5,5% initialement annoncées en janvier dernier. «Le sort du monde au lendemain de la crise dépendra directement des décisions que nous prendrons aujourd'hui. Il nous faut donc prendre les bonnes décisions. Cela implique, avant tout, une injection d'équité pour tous : un vaccin partout dans le monde, afin de mettre un terme à la pandémie une bonne fois pour toute, et une chance d'accéder à un avenir meilleur pour les populations et les pays vulnérables, afin de jeter les bases d'une reprise inclusive et durable», a-t-elle néanmoins plaidé. Aujourd'hui, la relance s'annonce «à vitesse variable», tirée essentiellement par deux locomotives: les Etats-Unis et la Chine, qui sont «l'exception, pas la règle». «D'ici l'année prochaine, le recul cumulé du revenu par habitant par rapport aux prévisions d'avant-crise sera de 11 % dans les pays avancés. Dans les pays émergents et les pays en développement, Chine exceptée, le manque à gagner sera bien plus important, à hauteur de 20 %. Cela revient à amputer du cinquième un revenu par habitant déjà bien plus modeste que dans les pays riches», a indiqué la cheffe du FMI. En Afrique, la crise sanitaire a causé le pire choc économique depuis des décennies et a fait basculer des millions de personnes dans la pauvreté. Selon le FMI, l'Afrique du Nord devrait connaître une croissance plus rapide en raison de la performance des exportateurs de pétrole et des pays ayant démarré tôt la campagne de vaccination contre le COVID-19. La reprise en Afrique subsaharienne devrait être par contre bien plus lente cette année. Les séquelles de la crise seront probablement de longue durée : dans beaucoup de pays, le revenu par habitant ne devrait pas retrouver son niveau d'avant la crise avant 2025, estime l'institution financière internationale. «Pour sortir de la crise en toute sécurité et replacer l'Afrique sur sa trajectoire de convergence d'avant la crise, il faudra des politiques nationales bien calibrées et une aide plus élevée de la communauté internationale», ont recommandé le président du groupe des gouverneurs africains, Domitien Ndihokubwayo, et la DG du FMI. Les réunions annuelles FMI-BM se tiennent avec la participation de représentants des secteurs public et privé, de la société civile, des experts et des médias, autour de grands dossiers comme la conjoncture économique mondiale, la lutte contre la pauvreté, le développement économique, l'efficacité de l'aide… Depuis le début de la pandémie l'an dernier, cet événement se déroule sous format virtuel et se focalise sur l'impact de la crise sanitaire inédite. Aussi, l'accent sera-t-il mis entre autres sur comment aider les pays à se préparer et à investir dans un développement résilient et sobre en carbone; comment préparer les pays en développement à des campagnes vaccinales à grande échelle; le rôle du secteur privé en matière d'innovation, de production et de fabrication face aux besoins colossaux de vaccins, ou encore les défis et opportunités engendrés par la pandémie en matière de recherche, de financement et d'action publique, dans le contexte plus large des efforts entrepris pour mettre en place des systèmes sanitaires et économiques plus résilients aujourd'hui et à l'avenir. Plus d'un an après le déclenchement de la pandémie de COVID-19, l'ampleur de la tragédie est sans précédent : 128 millions de personnes infectées, 2,8 millions de décès, plus de 100 millions de personnes précipitées dans l'extrême pauvreté, l'équivalent de 250 millions d'emplois perdus et 250 millions de personnes exposées à une faim aiguë. Selon le président de la Banque Mondiale, le moment est venu d'avancer rapidement vers des possibilités et des solutions qui assurent une «croissance économique durable et à large assise sans porter préjudice au climat, dégrader l'environnement ou laisser des centaines de millions de familles dans la pauvreté». Parmi les intervenants attendus lors de ce forum qui se poursuit jusqu'au 11 avril, figurent l'envoyé spécial américain pour le climat, John Kerry, la secrétaire au Trésor des Etats-Unis, Janet Yellen, le prince William, duc de Cambridge, Melinda Gates, coprésidente de la Fondation Bill & Melinda Gates, le DG de l'OMS, Tedros Ghebreyesus, la DG de l'OMC, Ngozi Okonjo-Iweala, ou encore le président du Policy Center for the New South, Karim El Aynaoui et le président de la COP26, Alok Sharma.