La Banque mondiale et le FMI s'inquiètent de la baisse de la croissance africaine, qui atteint son niveau le plus bas en 20 ans. La chute des prix des matières premières en est la principale explication. «Après avoir ralenti à 3% en 2015, la croissance économique de l'Afrique subsaharienne devrait continuer de baisser en 2016, pour atteindre son niveau le plus bas depuis plus de vingt ans, et se situer en-dessous du taux de croissance démographique». Cette année, la croissance de cette partie du monde ne devrait pas dépasser 1,6%. La prédiction émane de la Banque mondiale (BM), qui vient de la livrer dans la dernière mise à jour de ses prévisions sur la croissance du continent. Pour l'institution financière internationale, «ce net recul s'explique par les difficultés des plus grandes économies et des principaux exportateurs de matières premières de la région (Afrique du Sud, Angola et Nigeria) qui restent confrontés à la baisse des cours mondiaux, au durcissement des conditions de financement et à la sécheresse». En définitive, poursuit la même source, la croissance de l'Afrique est, dans l'ensemble, encore inférieure à son niveau d'avant la crise financière de 2008. Le FMI plus pessimiste La Banque mondiale n'est pas la seule institution de Bretton Woods à dépeindre un tableau peu reluisant de la situation économique de l'Afrique. Le Fonds monétaire international (FMI) constate, lui aussi que «les plus grands pays d'Afrique subsaharienne continuent de faire face à la baisse des recettes tirées des produits de base, qui pèse sur la croissance régionale». Il s'agit notamment du Nigeria, où l'activité devrait se contracter de 1,7% en 2016, alors que la croissance sera à peine positive en Afrique du Sud. «Par contre, plusieurs pays exportateurs de produits autres que des ressources naturelles, parmi lesquels la Côte d'Ivoire, l'Ethiopie, le Kenya et le Sénégal, devraient continuer d'enregistrer une croissance vigoureuse (plus de 5%) cette année». Globalement, le FMI mise sur une progression du PIB africain de seulement 1,4%, tout en laissant entrevoir une probable reprise dès l'année prochaine avec 2,9% de croissance. De son côté, la BM croit que l'Afrique subsaharienne devrait enregistrer une légère reprise en 2017 et 2018. Hausse de la pauvreté L'actuelle baisse de forme des économies africaines a de quoi inquiéter. Alors que les différents acteurs économiques faisaient de la «croissance inclusive» leur principal objectif, ils se retrouvent d'un seul coup à devoir lutter contre le plongeon de la croissance économique. D'ailleurs, la Banque mondiale, qui estime que la croissance a un impact plus limité sur la pauvreté que partout ailleurs dans le monde, émet de sérieux doutes sur la poursuite des objectifs de lutte contre la pauvreté. «Ce ralentissement freine la lutte contre la pauvreté. Bien qu'elle ait reculé de 57% à 43% entre 1990 et 2012, l'incidence de l'extrême pauvreté demeure élevée», note la BM. Chiffres clés 1,6 Selon la Banque mondiale, la croissance de l'Afrique subsaharienne sera de 1,6% en 2016. 1,4 Le FMI table, lui, sur une progression de 1,4% seulement 3 En 2015, le PIB de l'Afrique subsaharienne était de 3%, selon la Banque mondiale 57 La pauvreté aurait reculé de 57% à 43% entre 1990 et 2012 en Afrique subsaharienne, toujours selon la BM Nouvelles sources de fragilités Malgré un léger rebond, les cours des matières premières devraient rester largement inférieurs à leur pic de 2011-14 à cause de la faiblesse de la reprise mondiale. Face à des besoins financiers croissants, les exportateurs de produits de base ont commencé à s'adapter, mais leurs efforts sont encore insuffisants. Selon la Banque mondiale, le continent est par ailleurs confronté à une hausse de la violence et des conflits armés, qui obligent de plus en plus d'Africains à fuir leur foyer. «En outre, les trafics en tout genre, la piraterie et l'extrémisme religieux sont autant de nouvelles sources de fragilités persistantes dans de nombreuses régions du continent», écrit la BM. Le changement climatique constitue un autre risque pour l'Afrique. Alors que cette région du monde émet le moins de carbone, c'est elle qui souffre le plus des effets de l'évolution du climat: sécheresse, érosion des côtes et inondations. Cette vulnérabilité aux chocs accroît l'incertitude, coûte cher à l'économie africaine et nuit à la productivité.