Par Noureddine Mhakkak Universitaire spécialisée en sciences du langage et chroniqueuse musique au sein de Qantara, magazine de l'Institut du Monde arabe de Paris, Mariem Azizi s'est consacrée depuis l'âge de 11 ans à l'apprentissage de la musique arabe classique et andalouse au lycée pilote des arts et au conservatoire de Tunis. Elle est l'élève de Yousra Dhahbi nommée «La reine du luth arabe». Auteur compositrice, elle s'est produite au oud et au chant en France, en Tunisie et en Chine dans plusieurs festivals de musiques du monde. Le parcours académique et culturel de Mariem Azizi est très riche. On peut le présenter de cette façon –là sans préciser les dates: -Thèse de doctorat en Sciences du langage, Université de Lorraine. Titre : Le faire transformatif dans trois adaptations de La Recherche du temps perdu de Marcel Proust. Analyse contrastive, sous la direction de M. Driss Ablali. – Master 2 Recherche Cinéma et audiovisuel, Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle. Titre : La Captive de Chantal Akerman : une vision de l'univers proustien à partir de La prisonnière de Marcel Proust, sous la direction de Mme Marie-Thérèse Journot. – DEA Littérature et civilisation françaises, Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle. Titre : Le portrait d'exilé dans les épîtres de Clément Marot, sous la direction de M. Michel Magnien. – Maîtrise en langue et littérature françaises. Faculté des Lettres et des Arts de la Manouba. Tunisie/Bourse d'excellence pour une inscription en 3ème cycle (4ans) Titre : L'expression de l'indétermination dans les travailleurs de la mer de Victor Hugo sous la direction de Mme. Boutheina Ayadi. Mention Assez Bien. Major de promotion Juin 2004. Bourse d'excellence. -Enseignante-chercheure (grade Maître-assistante) à l'Institut supérieur des langues de Tunis-Université de Carthage. – Enseignante-chercheure (grade : assistante) permanente en langue, littérature et civilisation françaises à l'institut des études appliquées en Humanité de Zaghouan/Université de Tunis. (Lauréate du concours national) -Chargé de cours, Université Paris 3 Sorbonne. * Voici une interview avec elle. Bonne lecture. Que represent les Arts et les Lettres pour vous? – Deux domaines où l'expression élève l'homme de sa condition d'animal pour toucher au divin. Que représente l'écriture pour vous ? – Je pratique l'écriture en tant que chercheuse. C'est la traduction de mes réflexions. Elle fait partie de mon quotidien et est une composante de ma vie qui brille par son indispensabilité, c'est mon oxygène... Comme un espace-temps où je me réalise intellectuellement. Parlez-nous des villes que vous avez visitées et qui ont laissé une remarquable trace dans votre parcours artistique. -J'ai un rapport très musical avec les pays et les villes puisque le désir d'aller rencontrer une ville vient d'abord de mon engouement pour sa culture et plus spécifiquement son patrimoine musical. Donc c'est la tradition musicale qui aiguise ma curiosité de découvrir là où elle est naît et non l'inverse. Istanbul et la Crète m'ont marquée. Je suis luthiste avec une particulière admiration pour la musique turque qu'elle soit classique ottomane ou rurale kurde. À mes yeux, elle déborde de spiritualité dont je suis souvent demandeuse. La Grèce et plus particulièrement, la Crète m'a accueillie dans le cadre d'un stage avec le grand maître du oud Naseer Shamma et sous la houlette de Ross Daly fondateur de ce concept. J'étais la seule luthiste femme au milieu de confrères venant des quatre coins du monde. Ce fut une expérience inouïe et fort chargée en émotion. Durant les dix jours du stage, dans un village crétois niché au fin fond de la montagne, on pratiquait huit par jour et le reste de la soirée notre meilleur moyen de parler n'était plus l'anglais mais la musique. Je peux vous dire que ce langage a été plus efficace que la parole. Et c'est là que je me suis dit la musique est un langage universel et détenir entre ses mains ce pouvoir est en soi une merveille. Passionnée d'histoire et notamment l'histoire culturelle des peuples, c'est tout naturellement que je me suis orientée vers la musique du monde comme style. Mais cela n'empêche pas d'oser une ouverture vers le jazz qui de par ses caractéristiques est le genre adéquat pour rafraîchir des mélodies oubliées. Que représente la beauté pour vous ? La beauté, pour moi, je ne la vois pas, je la vis, je la ressens... C'est quelque chose que je reçois sensoriellement mais qui a le pouvoir de me libérer du diktat du hic et nunc et de m'arracher de la routine du quotidien. Je me sens vivante à travers la beauté. Ce n'est donc pas la beauté en soi qui importe mais la magie qu'elle exerce sur nous. Parlez-nous des livres que vous avez déjà lus et qui ont marqué vos pensées. Comme le oud, j'ai fait du livre mon compagnon depuis mon jeune âge et ce compagnon a prouvé plus d'une fois qu'il était le meilleur des compagnons. À commencer par ma rencontre précoce avec Marcel Proust : j'ai lu d'une seule traite À la recherche du temps perdu l'été de mes 17 ans. Sa phrase fleuve m'a tout de suite happée pour se déteindre sur mon écriture. Au lycée, le professeur m'enjoignait souvent de simplifier les phrases de mes dissertations. Je ne lisais pas que des romans, j'avais ce besoin de dialoguer avec les philosophes pour confronter mes réflexions à les leurs. Et jusqu'à aujourd'hui je bénis le jour où ma main a fortuitement tiré des rayons de la médiathèque de l'institut français, Le jardin imparfait de Tzvetan Todorov, un véritable plaidoyer pour l'humanisme!