Abdul Caimo, le président de la commission électorale du Mozambique, avait annoncé, dimanche dernier, que c'est avec 73% des suffrages exprimés que Filipe Nyusi, le président sortant et candidat du Front de Libération du Mozambique (FRELIMO), a rempilé pour un second mandat de cinq années à l'issue des élections du 15 Octobre dernier. Aussi, dans un message rassembleur, ce dernier a invité ses principaux opposants à «travailler ensemble pour développer le pays». Mais si ces élections au terme desquelles Oussufo Momade, le principal opposant au chef de l'Etat et candidat de la Résistance Nationale du Mozambique (RENAMO), n'a recueilli que 22% des voix, se sont déroulées sans trop d'incidents, force est de reconnaitre, toutefois, qu'elles ont généré de très vives tensions de part et d'autre puisque l'opposition n'a eu de cesse de dénoncer des fraudes et d'accuser le gouvernement d'avoir eu recours à des violences et à des intimidations. Ainsi, avant même la proclamation des résultats définitifs, le candidat de l'opposition avait-il dénoncé «des fraudes électorales massives», des opérations d'intimidation des électeurs et appelé, à ce titre, à la tenue de nouvelles élections. «Il y a eu plusieurs cas de fraudes rapportés le jour du scrutin, des accusations de bourrage d'urnes, un double meurtre suspect de cadres de la RENAMO mais, en réalité, la triche s'est surtout déroulée en amont du vote (…) Le taux de participation de plus de 90% dans certains districts pro-pouvoir est hautement improbable» a déclaré Anne Pitcher, spécialiste en politique africaine à l'Université du Michigan. Ces irrégularités ayant, par ailleurs, été confirmées par les observateurs de l'Union européenne et des Etats-Unis et cette réélection étant intervenue dans un contexte particulièrement tendu, l'accord de paix conclu en Août dernier entre le FRELIMO qui dirige le pays depuis son indépendance en 1975, et la RENAMO, active pendant la guerre civile (1975-1992), s'en trouve fragilisé. Cet accord qui était supposé mettre un terme aux affrontements récurrents entre les deux partis depuis plus de quarante ans comportait d'importantes dispositions ayant trait principalement à la décentralisation donc au fait que les gouverneurs des provinces n'allaient plus être nommés par le chef de l'Etat mais élus (indirectement) par la population. Mais, si la campagne électorale a ravivé les tensions entre les deux camps puisque dans un intervalle de moins d'une semaine, deux policiers ont été abattus, le résultat du scrutin a encore plus enfoncé le clou quand la RENAMO qui pensait pouvoir conquérir, par les urnes, entre trois et cinq provinces sur les dix que compte le pays est sortie les mains vides. Enfin, même si la branche armée de la RENAMO a nié toute implication dans ces assassinats, ceux-ci ne constituent-ils pas les signes avant-coureurs d'un pourrissement de la situation et d'une reprise du conflit armé entre les deux anciens ennemis ? Pour l'heure, rien ne permet d'affirmer le contraire mais espérons que la quiétude d'une population meurtrie par dix-sept années de guerre civile sera préservée et attendons pour voir…