Débat sur le rôle du 7e art dans le développement Le siège national du Parti du progrès et du socialisme (PPS) a abrité mercredi 29 mai un événement artistique et cinématographique phare organisé dans le cadre de l'activité «Les mercredis du cinéma marocain» initiée par le Secteur de la culture et de la communication du PPS, en collaboration avec l'Agora des arts et la Chambre nationale des producteurs de films. Les férus et mordus du 7e art ont afflué nombreux pour assister à cette manifestation qui a démarré avec une conférence sur le «cinéma et le développement» et a été suivie d'un ftour-débat, d'une soirée poétique qui a connu la participation du grand poète Driss Maliani accompagné par le musicien Mohamed Baiati et de la projection du film «Fidaa» du réalisateur Driss Chouika. Cette rencontre a été marquée par la présence du secrétaire général du PPS, Mohamed Nabil Benabdallah, des membres du Bureau Politique, des membres du Comité Central, des réalisateurs, cinéastes, hommes et femmes de la culture, des arts, de la communication. Ce fut l'occasion de se remémorer le bon vieux temps, des ciné-clubs et de mener des échanges fructueux. Mohamed Nabil Benabdallah : «La culture une question primordiale» Intervenant lors de la conférence sur le « cinéma et le développement», le SG du Parti, Mohamed Nabil Benabdallah, a souligné que le PPS est un espace ouvert à tous les intellectuels et créateurs du Maroc pour débattre autour des différentes questions liées au secteur cinématographique et artistique. «Nous espérons que cette activité débouchera sur un club de cinéma qui deviendra un lieu d'art par excellence», a-t-il déclaré. Selon le SG du Parti, la culture est un vecteur majeur de développement des nations sur tous les plans. Dans ce cadre, le PPS œuvre pour une culture progressiste, moderne et épanouie où l'humain est au cœur des préoccupations. «C'est notre combat d'ailleurs : faire de la culture une question primordiale et développer l'humain et sa culture». Pour le SG du PPS, l'Etat a joué un rôle important dans le développement du cinéma et des efforts ont été déployés dans ce cadre, mais il est important, a-t-il insisté, de revoir le niveau de créativité et de faire face à la médiocrité. Incontestablement, la question du cinéma est transversale. Dans cette optique, le SG a appelé à revoir le rapport existant entre le système éducatif et le 7e art. «Nous avons assez d'espaces et d'édifices culturels, mais il faudra de quoi les meubler et les ressources humaines qui vont les gérer», a-t-il fait savoir. Il a appelé en outre les créateurs et intellectuels à contribuer au débat sur tous les niveaux. «Il ne faut pas tuer l'activité propositionnelle. Et nous vous invitons à contribuer avec nous dans le nouveau souffle démocratique», a –t-il conclu. Latif Lahlou, cinéaste et président de la CNPF : «La fiction cinématographique et audiovisuelle, une expression pour accompagner et interroger les mutations de la société» «Aujourd'hui que le débat sur la culture occupe une place importante dans la recherche d'un projet originel de développement, nous, créateurs et producteurs de films, nous nous inscrivons avec force dans cette démarche en affirmant notre détermination à contribuer positivement à la création culturelle et artistique, ainsi qu'à la recherche de nouveaux moyens pertinents et d'une nouvelle organisation économique et sociale qui répondent aux besoins et aux aspirations de notre population dans la voie d'une modernité renouvelée et adaptée», a souligné le réalisateur et cinéaste Lahlou Latif. Selon lui, la fiction cinématographique et audiovisuelle constitue l'expression la plus appropriée pour accompagner et interroger les mutations de notre société, en proposant aux spectateurs des regards nouveaux sur l'évolution des pratiques sociales et des mentalités, ainsi que sur les rapports des citoyens vis-à-vis de la modernité, de la démocratie et du vivre ensemble. Latif Lahlou a souligné que malgré les efforts déployés dans le cinéma, il reste encore un long chemin à faire. «Nous sommes parfaitement conscients que les efforts consentis en faveur du cinéma national ont déjà réussi à faire de notre pays l'un des plus grands producteurs du monde arabe et africain. Toutefois, nous nous permettons de relever que ces efforts demeurent en deçà de nos aspirations et de celles de la société en général», a-t-il affirmé. Hamid Bennani, cinéaste, producteur et écrivain «Pour un cinéma d'auteur» D'après Hamid Bennani, tout cinéma d'un pays émergent, comme le Maroc, a besoin de films d'auteur pour s'imposer auprès du public et susciter une synergie créative dans le cinéma national. Pour lui, le cinéma d'auteur ne signifie pas «film élitiste». Mais, il doit s'adresser au public le plus large possible. Bennani a mis la lumière sur le rôle important de «passeur» dans la transmission à la fois des valeurs humaines et esthétiques. Naturellement, a-t-il fait savoir, le film d'auteur demande parfois un certain temps pour s'imposer auprès de son public. D'où le besoin, explique-t-il, du rôle de «passeur», d'une éducation cinématographique dans les écoles et des universités relayée par les ciné-clubs et les émissions de télévision. Mohamed Gallaoui, professeur universitaire et critique de cinéma «On a perdu le goût du spectacle collectif» Dans son intervention, Mohamed Gallaoui a mis l'accent sur le rapport qui existe entre la culture, l'enseignement et le cinéma. C'est vrai que sur le plan cinématographique, le Maroc occupe une place importante sur le continent africain, mais nous ne sommes pas encore parvenus à accrocher le grand nombre de public, estime-t-il. Le problème du Maroc, explique-t-il, c'est le manque de formations de plusieurs acteurs. «Nous avons perdu le goût du spectacle collectif», précise-t-il. A-t-on alors une véritable industrie cinématographique? Pour répondre à cette question, Gallaoui affirme que «sans marché, on ne peut espérer concurrencer les grandes industries cinématographiques». Driss Khouri, critique de cinéma et professeur de philosophie des arts visuels. «Le cinéma doit être lié à une stratégie globale claire» Pour Driss Khouri, le cinéma doit disposer d'un intermédiaire et d'un lien avec le public pour jouer pleinement son rôle. Selon lui, plusieurs politiciens ne prennent pas en compte la question du cinéma. Pis encore, ils croient que ce dernier ne contribue pas au développement. L'intervenant a souligné dans cette optique que le 7e art est un moyen de véhiculer des valeurs universelles. Il s'agit d'un secteur d'investissement et d'une véritable source génératrice de revenus. Il joue également, d'après lui, un rôle fondamental dans la diplomatie parallèle. Le critique de cinéma a rappelé que le cinéma doit être lié à une stratégie globale et transversale claire. Jamila Annab, docteur en communication et professeur à l'ISMAC «La réception du film de fiction marocain auprès du public» Quant à Jamila Annab, elle a mis l'accent sur la réception du film de fiction marocain par le public. Dans son intervention, elle a soulevé de nombreuses interrogations sur des problématiques d'actualité entre autres : Quel film pour quel public ? Qu'est ce qu'un film réussi ? Pour répondre à ces questions et bien d'autres, elle a travaillé sur trois films marocains à savoir «Road to Kabulde» de Brahim Chkiri, «L'orchestre des aveugles» de Mohamed Mouftakir et «Sotto Voce» de Kamal Kamal. Elle a analysé ces films du point de vue esthétique, cinématographique et sociologique tout en se basant sur le public et sa nature, les niveaux de réception, les films grand public, les films élitistes et les films destinés à la classe moyenne. Un voyage poétique, nostalgique En plus de la conférence, la rencontre a été marquée par la présence du poète Driss Maliani. Le poète n'a pas manqué le rendez-vous avec ses camarades, ses amis et tous les admirateurs de la magie de la parole et de la force du verbe. Posé, le poète avec sa voix singulière a rendu sur scène un vibrant hommage poétique à deux figures emblématiques du militantisme et de la pensée nationaux: Abdel Aziz Belal dont le 37e anniversaire de la disparition a été célébré, il y a quelques jours et Mohamed Anik. A travers ces paroles sincères, un vent nostalgique s'est emparé de la salle mythique Ali Yata. Cette soirée a été animée avec brio par le camarade M'hamed Sallou.