Nos hôpitaux, nos dispensaires, nos centres de santé répondent-ils aux attentes de nos concitoyens en matière de soins de santé ? Les patients sont-ils bien soignés, ou correctement pris en charge ? Quel accueil est-il réservé aux malades ? Les professionnels de santé sont ils à l'écoute des patients et de leurs familles ? Quel regard porte aujourd'hui le citoyen à l'égard des structures publiques de soins ? Vouloir répondre à ces questions n'est pas chose aisée, l'écart entre ceux qui portent un jugement négatif et ceux qui sont satisfaits est grand. En finir avec le passé Les responsables et les décideurs au ministère de la santé ont compris qu'il leur était pratiquement impossible de satisfaire l'ensemble de la population. C'est compréhensible eu égard au peu de moyens qui sont octroyés au ministère de la santé pour faire face aux nombreux et multiples besoins de santé de notre population. Les ministres qui se sont succédé à la tête du département de la santé depuis le passage d'un certain Taeib Bencheikh, ont tenté de remédier à cette situation à travers des plans, des stratégies pour améliorer le niveau sanitaire de notre pays, de réduire les écarts qui existent entre milieu urbain et milieu rural. Sur le terrain les résultats obtenus furent mitigés. Il est évident que des erreurs ont été commises. Les choix pour lesquels ils avaient opté n'étaient pas les bons. Les femmes et les hommes qu'ils avaient choisis, n'avaient pas toutes les compétences requises pour mener à bien les différentes responsabilités dont ils avaient la charge. Effet du hasard, simple coïncidence ou clientélisme et népotisme ? Les décisions prises, les choix opérés ont pour la plupart produit des résultats contraires aux attentes escomptées, mais ils ont profité à certains qui n'ont pas hésité à se sucrer les fraises. Loin de nous l'idée de faire ici le procès des uns ou des autres, mais on ne peut passer sous silence les erreurs flagrantes commises et les lourdes conséquences engendrées au passage. Aujourd'hui en 2010, à mi-chemin du parcours que s'est fixée la stratégie 2008-2012 du ministère de la Santé, que pouvons – nous dire de cette stratégie ? Rappelons que cette stratégie, dont les principaux axes avaient été présentés, en février 2008 à Rabat, par la ministre de la Santé, Yasmina Baddou, lors d'un colloque national sous le thème «Ensemble pour le droit à la santé», avait pour objectif de rendre au citoyen la confiance dans le système de santé par l'amélioration de l'accueil, une meilleure information, plus d'écoute, une meilleure qualité des soins, la diminution des délais d'attentes au niveau des urgences, la propreté et l'hygiène des établissements de santé, la disponibilité des médicaments, la moralisation du secteur de la santé. Bref tout un tas de dysfonctionnements qui minaient le secteur de la santé. Ce même constat a été évoqué lors du débat sur la carte sanitaire. Parmi ces problèmes que nous avons toujours dénoncés sur ces mêmes colonnes, il y a lieu de rappeler encore une fois les difficultés d'accès aux soins de santé pour les plus démunis et pour la population en milieu rural, avec une mal répartition de l'offre de soins sur l'ensemble du territoire. La gestion déplorable des hôpitaux publics qui souffrent à ce jour d'un manque de compétence managériale pour les directeurs des hôpitaux, les infirmiers chefs des services dont un grand nombre n'ont ni les compétences, ni le profil. Pour ce qui est des professionnels de santé, il y a une réelle insuffisance en quantité pour faire face à l'augmentation de la demande en soins. Les départs à la retraite ne sont pas toujours remplacés. Nous avons besoin de prés de 20.000 infirmiers. La gestion est souvent caractérisée par une opacité qui est source de conflits sociaux internes, les affectations, les postes de responsabilité, les avantages et autres sont souvent octroyés en fonction de critères qui ne tiennent pas compte de la méritocratie. Existence du phénomène d'absentéisme, utilisation abusive par le secteur privé des ressources humaines du secteur public, à cause notamment du mauvais contrôle du Temps plein aménagé (TPA). La liste des dysfonctionnements est longue. La stratégie 2008-2012 du ministère de la santé pourra-t-elle remédier a tous ces problèmes ? Cette stratégie prévoit de réduire le taux de mortalité maternelle qui était de 227 pour 100.000 naissances vivantes à 50 décès pour 100.000 et celui de la mortalité infantile à 15 décès pour 1.000 à l'horizon 2012, et de disposer d'un service public de santé compétitif et performant (taux d'hospitalisation à 5 % de la population à l'horizon 2012…). Il est évident que ce sont là des objectifs pertinents, cohérents qui répondent à un réel besoin ressenti et exprimé par l'ensemble des citoyens qui s'adressent aux structures sanitaires. Sur ce point, on ne peut que nous féliciter de cette louable initiative qui intervient à un moment opportun en ce sens que le Maroc d'aujourd'hui est résolument tourné vers l'avenir, accordant plus d'intérêt au volet social, à la santé de l'ensemble des citoyens, accordant plus de justice, d'équité et de confiance afin de concilier ces mêmes citoyens avec les structures de santé. A y bien regarder et a y bien réfléchir, on ne peut que se féliciter, car les responsables du département de la santé ont fait preuve d'honnêteté , de sincérité et de courage en mettant a nu les grands dysfonctionnements dont souffre notre système de santé. C'est le résultat d'un laborieux, méticuleux et pertinent travail réalisé par des professionnels qui ont mis le doigt sur les différents maux dont souffre notre système de santé. Il est vrai qu'à la lecture de tant de dysfonctionnements, on, peut qu'être un peu secoué, éberlué, mais c'est une réalité qui est vécue au quotidien par nos concitoyens. Voilà pourquoi la ministre de la Santé, parlant de la stratégie 2008-2012 élaborée par son département, emploie à juste titre cette phrase : «réconcilier le citoyen avec son système de santé». Une phrase qui en dit long sur le constat qu'elle a pu faire au lendemain de sa nomination à la tête du département de la santé. Des améliorations constantes, oui mais …. Il est clair que le niveau de santé de notre population s'améliore. Ceci est une réalité que tout un chacun peut aisément faire chaque jour, en témoigne la baisse de la mortalité infantile, la réduction des maladies transmissibles ainsi que la baisse de leur incidence. (Il est vrai que le secteur privé apporte lui aussi sa contribution dans l'amélioration de l'état de santé de notre population.) Aujourd'hui certaines maladies qui causaient des ravages n'existent plus, ce n'est pas dû au hasard. Il est vrai que nous disposons de ressources humaines très qualifiées, mais il n'en demeure pas moins vrai que le problème réside dans leur nombre qui est en deca des besoins réels, ce qui représentera une réelle menace à court terme et portera un coup dur aux multiples acquis. Sans chercher à tout mettre sur le dos du ministère de la santé, disons le tout de suite la solution ne dépend pas de son seul ressort, chose que tout un chacun connaît, car il suffirait de mettre à la disposition du département de la santé des postes budgétaires en nombre suffisant pour que cette situation soit réglée. La politique du médicament connait des améliorations constantes, il y a plus de produits qu'autrefois, les pharmacies des hôpitaux sont mieux dotées, mieux approvisionnées. La propreté et l'hygiène au niveau des hôpitaux gagne du terrain, c'est franchement plus propre qu'avant et même plus humain. Question accueil et communication, on note ici et là des améliorations, mais il reste beaucoup de travail à faire, c'est à revoir. La moralisation ou pour être plus terre à terre le problème de la corruption constitue a notre avis un handicap qui mine le secteur de la santé, le plus grave dans cette histoire de moralisation, c'est le comportement de certains responsables sensés donner le bon exemple «Ya Hassra». Côté mortalité maternelle et infantile, les derniers chiffres avancés par le haut commissariat au plan incitent à l'optimisme, il suffit que ces derniers soient officialisés par les instances internationales. Le point qui nous reste tel une arête de poisson dans la gorge est celui de la qualité des soins qui varient d'une structure hospitalière à l'autre, autant dire que certains professionnels s'investissent pleinement dans la tâche au moment où d'autres s'en foutent. Finalement la stratégie 2008-2012 pourrait aboutir à des résultats remarquables pour peu que l'on recadre les objectifs qu'elle s'est assignée au départ et que des évaluations soient entreprises pour déceler ce qui ne va pas et les structures qui nécessitent des accompagnements pour leur mise à niveau. A cela, il faut créer un climat plus propice à la création de cercles qualités au sein de nos hôpitaux en redynamisant les ressources humaines pour que la notion de qualité , de méthode , de rigueur puisse acquérir peu à peu une nouvelle place au sein des établissements hospitaliers .Il ne fait aucun doute que les cercles de qualité serviront de courroie de transmission pour donner une nouvelle pulsion qui permettra à tous les acteurs en place de changer de comportement , de s'inscrire dans une approche qualité plus concrète passant ainsi des bonnes intentions aux réalisations. C'est ce que nous souhaitons, c'est ce que nous espérons.