Notre société change à un rythme effréné. Nos traditions ont tendance à céder le pas à de nouvelles exigences où l'image du corps et la course à l'éternelle jeunesse prennent une place toujours plus importante. Les gens cherchent tous à plaire et veulent que les autres les admirent. Ils veulent vivre plus longtemps, en bonne et parfaite santé et sans prendre une ride. Le culte de la perfection est devenu un enjeu primordial voire une obsession pour beaucoup d'hommes et de femmes. C'est ainsi que nombreuses et nombreux sont celles et ceux en surpoids qui n'hésitent pas à adopter des régimes conseillés par un nutritionniste ou un praticien. Mais la plupart du temps, ces régimes alimentaires ne suffisent pas aux individus car ils ne parviennent ni à maigrir ni à changer d'apparence aussi vite qu'ils le souhaitent. Ils font alors appel à des techniques irréversibles telles que la chirurgie esthétique, qui s'est beaucoup développée ces dernières années à cause du besoin d'avoir de meilleures mensurations ou de paraître plus jeune. D'autres refusent de voir apparaitre un sillon, une ride sur leur visage. Certains désirent rajeunir, se relooker. Ils le font certes pour leur propre plaisir, mais pas seulement, car la société juge et scrute. Pour décrocher un job, certains établissements accordent pour ne pas dire exigent un physique presque parfait, des mensurations de mannequin et pour faciliter l'intégration au sein de la société, certaines personnes n'hésitent pas un instant à soigner leur image voire à transformer leurs corps. Ils font appel aux praticiens esthéticiens dont certains sont de véritables artistes qui manipulent le bistouri avec une dextérité parfois déconcertante. Mais dans cette quête effrénée du corps parfait, il y a les ratés de la chirurgie esthétique qui viennent de temps à autre nous rappeler la réalité des choses : la magie du bistouri ne dure pas éternellement. Pour en savoir plus sur la chirurgie esthétique, nous avons rencontré le docteur Fouad Ourzik, spécialiste en chirurgie esthétique et plastique depuis plus de 20 ans, qui en dit davantage sur cette pratique généralement méconnue. Al Bayane: Quelle est la différence entre chirurgie plastique et esthétique? Docteur Fouad Ourzik: Officiellement, la chirurgie plastique englobe trois chapitres : la chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique. On ne peut faire de chirurgie esthétique sans avoir au préalable fait de la chirurgie plastique et réparatrice, parce que si on fait de la chirurgie esthétique et si un problème survient, il faut savoir réparer. En plus, il y a des cas pathologiques, des cas qui viennent d'emblée pour la chirurgie réparatrice. C'est le cas des personnes brûlées ou atteintes de malformations génitales. La chirurgie plastique a débuté lors des grandes guerres mondiales, pour reconstruire et aider à rebâtir des membres atteints. La chirurgie plastique a deux facettes : reconstructive et esthétique. Les chirurgiens sont formés pour les deux. C'est après avoir été bien formé que l'on va faire de la chirurgie esthétique. Vous avez plus de 20 ans de pratique en chirurgie plastique et esthétique. Que pouvez – vous nous dire au sujet de la chirurgie esthétique au Maroc? La chirurgie esthétique au Maroc se porte très bien. Elle s'est bien développée ces dernières années. Il y a eu la création de plusieurs services au niveau des structures hospitalières publiques, de même que la formation de nouveaux médecins spécialistes plasticiens. Aujourd'hui, nous trouvons pratiquement un ou deux plasticiens au niveau des hôpitaux régionaux. C'est un développement qui connait une courbe ascendante et ceci est aussi vrai pour le secteur privé : plusieurs cliniques et cabinets spécialisés ont vu le jour. De grands noms de la chirurgie plastique et esthétique existent au Maroc, des spécialités très recherchées par une clientèle de plus en plus nombreuse originaire de différents pays. Les femmes s'adonnent-elles le plus à la chirurgie esthétique? Beaucoup de personnes pensent que la chirurgie esthétique est une spécialité destinée à satisfaire exclusivement les femmes. Il y a un peu de vrai car on sait tous que les femmes désirent se sentir belles, coquettes, admirées, et que c'est tout naturellement que celles – ci soient plus nombreuses. Oui, on peut dire qu'en général, il y a nettement plus de femmes, mais la proportion augmente chez les hommes. On parle de 30 ou 40%. Les hommes sont beaucoup plus demandeurs de greffe de cheveux. Justement quelles sont les interventions que vous pratiquez le plus? Dans ma pratique quotidienne, je dirais que la lipoaspiration arrive largement en tête. Mais vous savez, les autres confrères vous diront la même chose. Ceci est certainement dû au fait que la lipoaspiration est une opération simple, sans chirurgie, sans cicatrice. De plus, la graisse que l'on aspire ne récidive pas. En deuxième position, il y a la plastie abdominale qui est très demandée par de nombreuses femmes, ceci est en rapport avec les grossesses répétées. Ensuite, on peut citer les rhinoplasties, la chirurgie des paupières, les augmentations mammaires, les liftings et les réductions mammaires, la greffe de cheveux chez l'homme et les oreilles décollées chez les enfants. En gros, ce sont là les interventions que je réalise le plus, mais dans ma pratique, il y a une grande part pour la médecine esthétique qui fait appel aux techniques non invasives, plus douces, avec l'utilisation du Botox et de l'acide hyaluronique pour le comblement des rides et des sillons. Selon vous, la chirurgie esthétique rend-elle les gens plus heureux? Oui, il ne fait aucun doute que la chirurgie plastique et esthétique contribue à rendre les patients plus heureux. Vous ne pouvez pas savoir ce que ressent une femme qui a été opérée pour un cancer du sein (mammectomie) et à laquelle la chirurgie plastique et esthétique permet de reconstruire ce même sein. Cette patiente retrouve sa féminité et elle est heureuse. Mais il faut dire aussi et en toute honnêteté que beaucoup de gens peu ou pas bien informés, pensent qu'ils seront d'autres personnes à la suite d'une intervention esthétique. Il faut dire que la chirurgie esthétique ne change pas la vie d'une personne. Elle aide certes les patients à se sentir bien dans leur peau, à avoir plus confiance en eux, mais cela ne change pas leur vie. Ceux à qui cela a changé la vie se comptent sur le bout des doigts. Généralement, ceux qui ont de très gros complexes pensent que leurs problèmes seront réglés après la chirurgie. Il faut avoir des attentes réalistes. La chirurgie ne peut pas tout régler. Cela m'amène à dire que dans la relation soigné – soignant, le praticien doit bien informer son patient sur tous les aspects de cette intervention. C'est un contrat de confiance. Que recommandez-vous à quelqu'un qui voudrait subir une chirurgie esthétique? Avant de décider, de choisir telle ou telle intervention, il faut que la personne fasse un peu de recherche et qu'elle trouve la chirurgie qui l'intéresse. Ensuite, il faut choisir son chirurgien, c'est très important. Ce chirurgien est – il inscrit au Conseil de l'ordre des médecins? Est – il membre de la société savante de chirurgie plastique et esthétique? A – t – il des références dans ce domaine? Il s'agit de s'assurer de la bonne réputation du chirurgien avant de décider. Vous savez quand une personne arrive à la consultation, généralement sa motivation constitue la principale indication d'un projet de chirurgie esthétique. Ce que j'encourage le plus, c'est que la patiente ou le patient puissent prendre sa décision en connaissance de cause et en toute liberté, loin de toute pression de son entourage, notamment familial. En général, la décision d'opérer n'est pas prise à la légère, cela demande un temps de réflexion. Le patient doit prendre son temps. Par contre, je dirais qu'il est important de bien informer le client. En effet, celui – ci a droit à des conseils éclairés sur tous les risques et résultats d'une opération de chirurgie esthétique. Qu'en est-il des coûts des interventions esthétiques? Il est très difficile de prétendre répondre à une telle question. Le prix diffère d'une intervention à une autre, des moyens humains qui participent à l'intervention, de la technologie utilisée, du matériel, du fongible, de la réanimation, des médicaments, de la durée du séjour. Ceci dit, les interventions de chirurgie esthétique ne coûtent pas plus chères que les autres interventions classiques d'autres spécialités. Par ailleurs, tous les chirurgiens esthéticiens suivent au jour le jour le développement de la situation économique du pays, et je ne vous cache pas que nous veillons à appliquer des prix raisonnables pour permettre au plus grand nombre d'avoir accès aux prestations de chirurgie esthétique dans un souci de démocratiser ces soins. C'est pourquoi nos prix s'adaptent au pouvoir d'achat des Marocains. Par exemple, une liposuccion débute à partir de 12.000 DH, une rhinoplastie à partir de 15.000 DH, les paupières inferieures à 8.000 DH. Au – delà des prix, c'est le travail bien fait, le résultat satisfaisant et la satisfaction du client et sa sécurité qui m'importent le plus.