Depuis l'arrivée au pouvoir de Nelson Mandela en 1994 à l'issue des premières élections libres de l'histoire de l'Afrique du Sud et la disparition du régime d'apartheid, la vie politique du pays a toujours été dominée par l'ANC. Or, aujourd'hui, le parti s'est trouvé affaibli d'abord par une crise économique sans précédent caractérisée par un chômage endémique de plus de 27% puis par les multiples accusations de corruption. Autant de faits qui ont contraint Jacob Zuma à se dessaisir des rênes du parti qu'il détient depuis 2007 tout en restant même à la tête de l'Etat jusqu'aux élections générales qui devront avoir lieu en 2019 et auxquels se présentera automatiquement son successeur à la direction de l'ANC. C'est ainsi que dans un discours prononcé samedi dernier devant les milliers de délégués du parti réunis à Johannesbourg , Jacob Zuma a «admis» que les sud-africains ne puissent pas être «satisfaits» du fait qu'il n'ait pu ni donner du travail aux jeunes ni mettre un terme à la criminalité et à la corruption. Reconnaissant également que les sud-africains ont le droit de faire montre de leur frustration de voir s'installer des querelles intestines aux lieu et place de la résolution des «défis» auxquels est confronté le pays mais dénonçant, toutefois, le comportement de certains représentants de la Justice, des médias et de la société civile, l'ancien chef de l'ANC n'a, à aucun moment, dans son discours, cherché à défendre l'un ou l'autre de ceux qui se sont portés candidats à sa succession mais leur a conseillé de rester «unis comme un roc» pour préserver l'unité du parti. Cet appel à l'unité a été nécessaire après que l'ANC ait emprunté la voie de l'éclatement lors de la campagne très serrée qu'ont mené les sept candidats en lice et à l'issue de laquelle les plus en vue furent le vice-président Cyril Ramaphosa, richissime homme d'affaires de 65 ans soutenu par l'aile modérée du parti, ayant violemment dénoncé la corruption du clan Zuma et promis de relancer l'économie et l'ex-épouse du chef de l'Etat Nkosazana Dlamini Zuma, 68 ans, ancienne ministre et patronne de l'Union Africaine ayant promis, pour sa part, de transformer radicalement l'économie du pays «au profit de la majorité noire». A l'issue de ce duel à couteaux tirés, sur les 4776 délégués appeler à désigner le successeur de Jacob Zuma à la tête de l'A.N.C. sous le regard de quelques 3000 journalistes présents dans l'enceinte du Centre d'exposition de Nasrec, 2440 ont donné leurs voix à Cyril Ramaphosa et 2.261 ont voté pour Nkosazana Dlamini-Zuma. L'annonce de la victoire de Ramaphosa avec 51,8% des voix a été accueillie par des chants et par des danses ; ce qui atteste qu'aujourd'hui «la peur a changé de camp» après cette «ère Zuma» durant laquelle ce dernier ne se privait pas d'intimider tous ceux qui s'évertuaient à dénoncer son autorité de quelque manière que ce soit. Enfin, avec cette victoire, Cyril Ramaphosa, qui devient automatiquement le candidat de l'ANC aux élections présidentielles qui se tiendront en 2019, sait que, pour clore définitivement l'ère très controversée de Jacob Zuma, il lui appartiendra, en premier lieu, de s'atteler à ressouder les rangs d'un parti rongé par les divisions et miné par les accusations de corruption.