Très attendu sur l'affaire du report de la réforme des changes, le gouverneur de Bank Al-Maghrib a enfin rompu le silence à l'issue du Conseil tenu mardi dernier. Abdellatif Jouahria répondu avec tact et doigté à ceux qui l'accusent de s'approprier la réforme. «Politiquement, c'est au gouvernement que revient la décision de migrer vers un régime de change flexible. Techniquement, c'est la Banque centrale qui se charge des travaux de préparation et de la mise en œuvre», a-t-il souligné. De plus, «un comité conjoint avec le ministère des Finances a été mis en place dès le départ pour préparer la réforme», a-t-il rappelé. Malgré ce report de la réforme, décidé à la dernière minute par le chef du gouvernement, le ton est à la sérénité. C'est du moins l'impression qui se dégage des déclarations de Jouahri. «Si le gouvernement a reporté l'entrée la réforme pour mieux l'apprécier et mieux évaluer ses conséquences, cela me semble positif», a-t-il lancé. D'ailleurs, Jouhari dit préférer un gouvernement qui prend sur lui le temps d'apprécier la réforme pour la mener de bout en bout. Pour rappel, le chef du gouvernement avait justifié lors de son passage télévisé le 1er juillet dernier, le report de cette réforme par la nécessité de mener des études complémentaires afin d'identifier les conséquences. Pour le moment, «aucune demande ne nous a été faite dans ce sens», assure Jouahri qui s'est dit prêt à mener d'autres études si le gouvernement venait à lui en demander. En attendant, Jouahri assure avoir fait son autocritique. «Nous avons peut-être été en retard sur la vulgarisation de cette réforme auprès du grand public», a-t-il dit. Mais «toutes les études ont été faites pour apprécier la réforme». Pour preuve, «le FMI a estimé que le Maroc pouvait passer au nouveau régime dès janvier 2017, mais la Banque centrale a préféré repousser la réforme à juin», a rappelé Jouahri. Le wali de BAM laisse entendre qu'il n'y aura pas de marche arrière. Pour lui, le passage au nouveau régime de change servira de levier à d'autres réformes. Jouhari affirme que cette réforme est indispensable si l'on veut atteindre une meilleure distribution des revenus, aller vers l'émergence de l'économie et se prémunir contre les chocs externes. L'attentisme n'est plus possible. Jouahri prévient que le Maroc a besoin de réformes. «Si nous ne les faisons pas, d'autres pays le feront. Après, ce sera trop tard pour nous», a-t-il dit. D'autant que les agences de notation attendent des éclaircissements sur le sort de la réforme. Le wali de BAM n'a eu de cesse de répéter que la réforme et volontaire et que tous les prérequis pour ce passage sont réunis. Il affirme avoir joué la transparence la plus totale car le Maroc n'est pas en situation de crise de change. Dans ces conditions de transparence, le basculement vers le régime flexible devrait se faire dans la sérénité. «Il n'y a donc aucune raison de dévaluer», insiste Jouahri. C'est aussi le message qu'il a été répété à tous les opérateurs, en l'occurrence les banquiers accusés d'avoir instrumentaliser cette réforme pour «spéculer» contre le dirham. Selon Jouahri, l'Office des changes a effectué son enquête pour identifier les présumés spéculateurs. Les résultats des opérations de contrôle qui ont été menées feront l'objet d'un rapport en cours de finalisation.