Le Président Rafael Correa, initiateur de la «révolution citoyenne», au pouvoir en Equateur depuis dix ans, peut se dessaisir de l'autorité suprême le 24 Mai prochain et s'en aller la conscience tranquille puisqu'à l'issue des élections présidentielles qui se sont déroulées ce dimanche, c'est son ancien bras-droit, le vice-président et candidat du parti socialiste au pouvoir Alianza Pais, Lenin Moreno, 64 ans, qui en est sorti vainqueur. Ce dernier, paraplégique à la suite d'une agression à main armée dont il fut victime en 1998 mais jugé plus accueillant et plus conciliant que son rival libéral a recueilli, lors de ce second tour et selon les résultats diffusés par le Conseil National Electoral, 51,11% des voix exprimées après le dépouillement de 96,94 % des bulletins de vote. Ayant promis «une chirurgie radicale» pour extirper les «corrompus d'hier et d'aujourd'hui», le candidat socialiste a lancé «un appel à tous, pour un dialogue fraternel» ajoutant « ma main est tendue à qui veut la saisir». Ayant ardemment défendu le droit à la dignité des handicapés et dirigé la première étude publique sur leur situation dans le pays, son humanisme et son engagement pour la cause des handicapés lui avaient permis d'accéder au rang de «champion des causes sociales» en Equateur et même d'être nominé pour l'obtention du Prix Nobel de la Paix en 2012 avant d'être désigné, en 2013, «Envoyé spécial pour le handicap et l'accessibilité» par l'Organisation des Nations-Unies. En succédant à son mentor, Lenin Moreno devra notamment s'attacher à maintenir le cap du «Socialisme du XXIème siècle» impulsé par son prédécesseur et, surtout, consolider cette gauche des pays d'Amérique Latine bien écornée après les virages à droite qu'elle a emprunté en Argentine, au Brésil et au Pérou. Mais son rival, le candidat de la droite libérale Guillermo Lasso ne l'entend pas de cette oreille et dénonce une fraude massive. Aussi, en fondant ces accusations de détournement et de malversation sur la différence entre les résultats d'une enquête à la sortie des urnes d'après lesquels il était gagnant avec huit points d'avance et ceux communiqués par le Conseil National Electoral qui confèrent la victoire à son rival, il récuse le résultat et appelle ses sympathisants à sortir dans la rue «défendre leur vote» et exiger un recomptage des voix dans toutes les provinces du pays. «Nous allons défendre la volonté du peuple équatorien face à des présomptions d'une fraude qui a pour objectif d'installer un gouvernement qui serait, dès à présent, illégitime». Mais, le représentant de la droite libérale est accusé par Lenin Moreno de s'être injustement enrichi lorsque le pays traversait la crise financière de 1999 et qu'il détenait le portefeuille du ministère de l'Economie au sein d'un gouvernement très souvent taxé de corrompu.