Rafael Correa, candidat de la gauche équatorienne à l'élection présidentielle, a clamé victoire dimanche, à l'issue d'un second tour qu'il semble avoir remporté haut la main, selon les estimations et les sondages réalisés à la sortie des urnes. Son adversaire, le conservateur Alvaro Noboa, a aussitôt contesté sa défaite, assurant qu'il n'hésiterait pas, si nécessaire, à demander un nouveau dépouillement. Si ces résultats confirment les sondages, Correa deviendra le deuxième dirigeant d'un pays latino-américain à s'inspirer de la révolution bolivarienne prônée par le président vénézuélien Hugo Chavez, qui verrait ainsi s'élargir son réseau d'alliance hostile au libéralisme prôné par Washington. "Nous acceptons cette victoire avec dignité et humilité. Nous ne sommes que les instruments du pouvoir populaire", a déclaré Correa, s'adressant à ses partisans rassemblés à Quito. Les observateurs de Participacion Cuidadana, qui se fondent sur un décompte rapide réalisé dans un échantillon de bureaux de vote représentatif de l'ensemble du pays, le créditent de 56,9% contre 43,1% à son rival, une tendance qui confirme les résultats de trois sondages réalisés à la sortie des urnes. Devancé de 4% au premier tour, le 15 octobre, le candidat de gauche a depuis édulcoré ses appels en faveur d'une rénovation de la classe politique. Conjuguée à son alliance avec le président vénézuélien, cette volonté de procéder à un "coup de balai" semblait avoir effrayé une partie des électeurs de la classe moyenne. COHABITATION? Dimanche, cet ancien ministre des Finances âgé de 43 ans et formé aux Etats-Unis, a fait savoir qu'il pourrait réclamer la réintégration de Quito au sein de l'Organisation des pays exportateur de pétrole (Opep). Cinquième producteur d'Amérique latine, l'Equateur a quitté le cartel en 1992. Correa a en outre annoncé son intention de confier le ministère de l'Economie à Ricardo Patino, chef de file d'un mouvement qui milite pour l'annulation de la dette extérieure, et celui de l'Energie à Alberto Acosta, adversaire de la zone de libre échange que les Etats-Unis s'efforcent de mettre sur pied. Pour sa troisième candidature à la présidentielle, Noboa a quant à lui multiplié les promesses pour panser les plaies sociales du pays, faisant miroiter des emplois immédiats, des logements et des investissements. Dans ses spots télévisés, les électeurs étaient invités à participer à son programme censé permettre la construction de 300.000 logements sociaux. Ses déplacements de campagne ont été ponctués de distribution d'argent, d'ordinateurs et même de chaises roulantes. "J'ai gagné et je continuerai à me battre pour les pauvres, à la présidence", a-t-il lancé dimanche devant les caméras de télévision. L'Equateur, premier exportateur mondial de bananes, souffre d'une instabilité politique qui a conduit, en dix ans, au départ de trois présidents, victimes de la rue ou d'un parlement hostile. Pour les observateurs, le Parti du renouveau institutionnel pour l'Action nationale de Noboa, qui a obtenu 28 des 100 sièges que compte le parlement lors des législatives d'octobre, semble en mesure de former une coalition majoritaire synonyme de cohabitation pour Correa, si les résultats officiels confirment sa victoire.