La transhumance a transformé le Parlement en «un souk», face à ce qui se passe aujourd'hui, au sein des deux Chambres. Les propos sont de Driss Lachgar, qui porte la double casquette de ministre chargé des relations avec le Parlement et de dirigeant de l'Union socialiste des forces populaires. Ils ont été tenus, mardi dernier, lors de l'émission Hiwar (Dialogue) sur la chaîne de télévision Al Oula, regardée, en principe, par des millions de Marocains. Bien avant Driss Lachgar, feu Me Mohamed Bouzoubaâ, ancien ministre de la Justice et également dirigeant de l'USFP, n'avait pas nié, lors d'une émission sur 2M si mes souvenirs sont bons, l'existence du phénomène de la transhumance politique au sein de la Chambre des conseillers. A l'époque, en 2007, le nomadisme politique, à l'ouverture des sessions parlementaires, concernait essentiellement la deuxième Chambre. Feu Bouzoubaâ avait déclaré qu'il avait été informé par l'un de ces amis de l'accentuation du phénomène parmi les conseillers. Quelques jours après, le ministère de la Justice avait saisi le procureur du roi au tribunal de Première instance de Casablanca, pour enquêter avec le responsable de la publication d'un quotidien national qui avait comparé le Parlement à une «joutia» (marché de puces). Deux années plus tard, c'était le tour de notre confrère «Al Ahdat Al Maghribya», dont le directeur de la publication et un journaliste ont été écoutés par un juge d'instruction, comme ce fut le cas avec le premier quotidien. Les deux affaires n'auront pas de suite, surtout que les convocations devant la police judiciaire et les PV établis par le juge d'instruction, en présence d'un greffier, répondaient plus à une réaction par rapport à des titres qui agissent, dans la responsabilité, pour l'intérêt du pays et de la démocratie. Il est vrai que les motivations des anciens nomades diffèrent, quelque part, de celles qui animent les nouveaux transhumants. Hier, l'élément pécuniaire était omniprésent et omnipotent. Aujourd'hui, sans disparaitre, il est associé ou non à la recherche d'immunité, d'avantages et de passe-droits que d'aucuns promettent ou donnent l'impression de pouvoir offrir. Argent ou pas, la transhumance est, d'abord, contraire aux principes de la démocratie. Et, contrairement aux circonstances atténuantes que Driss Lachgar veut donner à ceux qui y recourent au nom de divergences d'opinion, la démocratie exige que si un élu quitte un groupe parlementaire et donc un Parti, il doit continuer son mandat sans appartenance politique. Car les électeurs l'ont porté à la députation en tant que représentant d'un parti bien déterminé, fût-il proche de la formation politique d'accueil. Il n'aura, donc, qu'à attendre les élections suivantes pour aller à la pêche avec le parti qu'il aura choisi de rejoindre.