A l'approche de la rentrée scolaire la plupart des librairies recourent au livre scolaire. Etant plus lucratif, une telle pratique est devenue monnaie courante. Car, au risque de se répéter, la crise de la lecture, qui persiste, faute de politique nationale et de mobilisation qui vise à promouvoir le livre et la lecture au Maroc, plonge le secteur dans le marasme depuis belle lurette. La situation de l'édition jeunesse l'est encore plus. La lecture n'étant pas une tradition sociale dans nos foyers. Nos chérubins vouent moins d'intérêt à l'écrit aux profits des jeux vidéo qui investissent à la fois leurs domiciles et l'espace public. Quelques chiffres pour illustrer ces propos. Deux maisons d'édition jeunesse existent au Maroc pour une population âgée de moins de 15 ans qui représente 31,3% de la population totale (deuxième rapport national 2005 relatif aux objectifs du Millénaire pour le développement du Maroc). Deuxième élément non moins éloquent, l'édition marocaine publie entre 80 à 100 livres par an. Dans le Maghreb, le Maroc arrive de loin après la Tunisie et l'Egypte. Si nos jeunes boudent le livre aujourd'hui, la faute incombe à l'absence d'une volonté manifeste de l'Etat de leur donner goût à la lecture. La preuve : le magazine d'enfant «Al arabi assaghir» qui se vend à 17 000 exemplaires par numéro. Le succès de la première édition du salon international dédié au livre jeunesse «Cigogne volubile», organisée à l'initiative de l'Institut français de Meknès vient réfuter aussi tous les arguments qui prétendent le désintéressement des jeunes au livre littéraire : Plus de 17 000 personnes ont visité le salon en mars dernier. L'école devrait également jouer son rôle en introduisant la lecture libre avec des programmes incitatifs pour ramener les jeunes au plaisir de la lecture. Sur un autre volet, l'envol de l'édition jeunesse requiert l'implication à la fois de l'Etat par le biais des autorités publiques et du secteur privé. Le livre de qualité destiné aux enfants nécessite un budget considérable pour être au même niveau que la production étrangère qui monopolise le marché marocain. L'inaccessibilité du livre, partant de la distribution jusqu'à la diffusion des émissions audio et visuelles focalisées sur la littérature jeunesse, entrave aussi la promotion de la lecture. Autre écueil qui fait honte à notre pays du 21ème siècle est celui de l'absence d'espaces de lecture et de bibliothèques municipales munies de plans d'action à effet attractif. Ce tableau peu reluisant que les Marocains connaissent par cœur, reflète l'indifférence des responsables publics pour la chose culturelle reléguée au second plan dans la politique globale du pays.