Pour la première fois, le rapport d'une agence publique met en avant les carences et les déséquilibres provoqués par quinze régimes qu'elle a passés au crible. La nouvelle devrait contenter nombre de mauvaises consciences à l'approche des fêtes de fin d'année. Pour la première fois, une agence publique affirme que les régimes alimentaires ne sont pas sans risques sur la santé. Le rapport de l'Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), qui a été rendu public jeudi après-midi, se fonde sur l'étude scientifique de quinze régimes amaigrissants pour parvenir à cette conclusion. Entre autres cas étudiés, les régimes les plus connus : Atkins, californien, citron détox, chrononutrition, Cohen, Dukan, Fricker, Mayo, Montignac, Weight Watchers ou celui de la soupe au chou... «Une équipe de professeurs et de chercheurs hautement qualifiés a commencé par sélectionner les régimes les plus populaires en observant journaux et sites Internet sur le sujet. Puis ils ont calculé les apports nutritionnels de chacune de ces méthodes» explique, au Figaro.fr, le professeur Gérard Lasfargues, directeur scientifique à l'Anses. «Notre rôle, en tant qu'agence publique, est d'alerter quand il y a un danger, poursuit-il. Notre message est très clair : ces pratiques doivent faire l'objet d'indication médicale, et ne souffrent pas l'automédication». Déséquilibres Après un an d'observation, le constat des experts de l'Anses est en effet sans appel : tous ces régimes entraînent des déséquilibres en macronutriments (lipides, glucides, protéines), en vitamines et en minéraux. Dans le détail, pour plus de 80% d'entre eux, les apports en protéines sont supérieurs aux apports nutritionnels conseillés (ANC). Dans de nombreux cas également, les apports lipidiques dépassent la fourchette haute. Dans trois régimes sur quatre enfin, les apports en fibres sont inférieurs aux doses conseillées. Pour les femmes, les ANC en fer sont très rarement atteints. Plusieurs régimes (Mayo, Montignac phase 2, Fricker 3...) ne couvrent pas les besoins en calcium, alors que dans deux des phases de Dukan les apports sont deux fois supérieurs aux ANC. Autre exemple : le régime Dukan 1 fournit plus de deux fois le maximum de sodium recommandé. L'apport en vitamine C est souvent trop faible, notamment pour les régimes Dukan et Fricker, de même que l'apport en vitamine D, sauf pour les régimes Dukan 2 et 3, où il est quatre fois plus élevé que les recommandations. Reprise de poids dans 95% des cas Mais au-delà des manques ou des surplus provoqués par ces régimes, ces modes d'alimentation sont dangereux pour la santé. L'Anses cite la diminution de la masse minérale osseuse et les risques de fracture, ainsi que la réduction en acides gras polyinsaturés «indispensables», le risque de calculs biliaires avec les régimes très hypocaloriques, et de cancer colorectal avec les régimes pauvres en glucides complexes et en fibres. L'innocuité des régimes pauvres en glucides et riches en graisses et en protéines n'est pas établie sur le plan cardio-vasculaire. Dans Le Parisien, le président du groupe de travail qui a planché sur ce rapport, Jean-Michel Lecerf, de l'institut Pasteur de Lille, affirme également que «dans 95% des cas, il y a reprise de poids après le régime.» Pire : «Des personnes qui n'avaient pas de problème de poids avant leur régime peuvent se retrouver en surpoids et développer des troubles du comportement alimentaire.» L'expert avance également que, plus on fait de régimes, plus on gagne de gras : «Chaque régime est moins efficace que le précédent, et la reprise de poids plus importante» Jean-Michel Lecerf tient par ailleurs à avertir les jeunes filles des troubles possibles de l'ovulation. Et s'insurge contre les régimes préconisés aux enfants «au risque de les exposer à des troubles de la croissance ». Au final, le rapport de l'Anses préconise «une alimentation équilibrée et diversifiée». Et en cas de surpoids, ou même d'obésité, «il doit y avoir prise en charge par des spécialistes». «Chaque régime doit être adapté au mode de vie et au contexte social et familial de chacun», insiste Gérard Lasfargues, qui conclut : «Cela se saurait s'il y avait une recette miracle transposable à tout le monde».