Effets euphorisant, relaxant, riche en polyphénols… les propriétés du chocolat sont multiples mais il reste un aliment calorique. Parlez à un chocolatomane de son aliment favori et il vous répondra qu'il vient d'aller à la «pharmacie» acheter quelques tablettes de son antidépresseur à croquer. Effet euphorisant, relaxant, stimulant de la mémoire… Comme les apothicaires du XVIIIe siècle, les aficionados de la fève de cacao sont convaincus de ses propriétés médicinales. Depuis une dizaine d'années, les chercheurs s'attellent à les démontrer. Et les preuves commencent à s'accumuler, en particulier dans le domaine cardio-vasculaire. Selon une étude allemande conduite pendant huit ans auprès de 20.000 personnes et récemment publiée dans l'European Heart Journal, la consommation quotidienne d'une quantité modérée de chocolat (7,4 g/jour) réduit de 48% le risque d'accident vasculaire cérébral, et de 27% celui d'infarctus du myocarde. L'effet serait encore plus net avec une consommation de 10 voire 20 g/jour (1). «Ces résultats semblent liés à une baisse de la tension artérielle (TA) chez les mangeurs de chocolat. C'est très intéressant, car il est bien établi qu'une diminution même très modeste de la TA réduit le risque cardio-vasculaire», estime le Pr André Vacheron (cardiologue, membre de l'Académie de médecine), qui présente demain une communication à ce sujet lors d'un symposium «chocolat et santé» à Paris. D'autres travaux avaient déjà suggéré que c'est à leurs boissons au cacao que les Indiens Kuna du Panama doivent leur tension artérielle modérée et leur moindre mortalité par cardiopathies et cancers. Crédits photo : ASSOCIATED PRESS Si plus de 800 composés entrent dans la composition du chocolat, ses bénéfices s'expliquent avant tout par quelques dizaines d'entre eux, appartenant à la grande famille des polyphénols. Présents dans les végétaux (fruits, légumes, thé vert, café, vin…), il s'agit d'un ensemble complexe de molécules (au moins 500), dont les scientifiques ne cessent de découvrir les bienfaits en prévention des maladies cardiaques, mais aussi des pathologies neurodégénératives, des cancers… «Au niveau vasculaire, les polyphénols agissent par plusieurs mécanismes , précise le Pr Vacheron. Ils ont un effet antioxydant sur le LDL cholestérol (le mauvais cholestérol, NDLR), ce qui prévient la formation des plaques d'athérome. Ils entraînent aussi une vasodilatation des artères, une inhibition de l'agrégation des plaquettes…» L'équipe d'Augustin Scalbert (Inra, Clermont-Ferrand) a mis en ligne une base de données colossale sur les polyphénols (2), qui indique précisément la teneur de 450 aliments en ces composés. «Le chocolat est l'un des aliments les plus riches en polyphénols. Il s'agit en particulier de flavanols, qui sont d'ailleurs à l'origine de l'amertume de ce produit», précise ce chercheur. Tous les chocolats ne se valent pas: les noirs sont plus riches en polyphénols que ceux au lait. Quant aux blancs, qui ne contiennent pas de pâte de cacao, ils en sont carrément dépourvus. Quid des effets sur le psychisme? Ils sont moins clairement établis que pour les vaisseaux. «Une étude récente retrouve une consommation spontanée de chocolat plus élevée chez les personnes dépressives que chez les non-dépressives, mais il est difficile d'en tirer une conclusion», relève ainsi le Dr Bernard Waysfeld (psychiatre et nutritionniste, Paris), également intervenant au symposium. D'autres travaux ont retrouvé des effets intéressants sur le stress, voire en prévention de la maladie d'Alzheimer. «Ce sont des résultats préliminaires, qui demandent à être confirmés», insiste le psychiatre. Selon lui, les effets stimulants du chocolat ne sont en tout cas probablement pas dus à un composant spécifique, mais plutôt au plaisir gustatif procuré par leur dégustation. Face à ces atouts, peut-on conseiller une consommation quotidienne, et à quelle dose? Il y a quelques mois, l'Académie de pharmacie avait jugé qu'il est prématuré de préconiser un régime enrichi en flavonoïdes . Et il ne faut pas oublier les autres composants du chocolat, glucides et lipides. En moyenne, 100 grammes de chocolat apportent tout de même 500 calories. Un apport non négligeable, surtout pour les plus accros qui peuvent dépasser les 200 g/jour. En France, la consommation moyenne reste raisonnable: 12 g/jour chez les adultes et 15 g/jour chez les enfants. Peut-être la dose idéale pour se faire du bien en étant sûr de ne pas se faire de mal.