Trump et les Etats-Unis réaffirment leur reconnaissance de la souveraineté du Maroc sur le Sahara    Abdelouafi Laftit reçoit à Rabat son homologue gambien    La poursuite du soutien de Washington à l'intégrité territoriale du Maroc renforce l'isolement du Polisario et de l'Algérie    République du Sud de l'Algérie : Un long combat pour l'indépendance et la libération    Nouvelle gifle pour l'Algérie et le Polisario : la maire de Paris débarque à Laâyoune pour une visite historique    Le Maroc à l'épreuve du numérique : progrès lents mais constants dans l'adoption de l'IA    Bourse de Casablanca : clôture en hausse    L'AMDIE couronnée Meilleure Agence de Promotion des Investissements en MENA aux AIM Congress 2025    Les Etats-Unis réaffirment la souveraineté du Maroc sur son Sahara occidental    La Chine critique l'escalade tarifaire de Washington et appelle à un commerce équitable fondé sur la coopération    Ligue des champions : Arsenal assomme le Real Madrid, l'Inter surprend le Bayern    Trafic de psychotropes : Deux personnes interpellées à Salé    Inauguration à l'UNESCO de l'exposition « Le Maroc: Tradition d'Ouverture et de Paix »    Salles de cinéma : Nomination des membres de la Commission de soutien    Prix Cheikh Zayed du Livre : deux Marocains primés à Abou Dhabi    Fitch maintient à «BB+f» la note du fonds BMCI Trésor Plus, intégralement exposé à la dette souveraine marocaine    Un rapport met en garde contre les dérives économiques et sociales du projet des sociétés régionales multiservices au Maroc    L'ambassadeur d'Israël sommé de quitter une commémoration du génocide rwandais, Tel-Aviv déplore une "profanation de la mémoire"    Le chef de la diplomatie marocaine Nasser Bourita reçu par Marco Rubio à Washington    Rencontre diplomatique de haut niveau à Washington : Nasser Bourita rencontre son homologue américain Marco Rubio    Pour le DG du Festival du Livre de Paris, le Maroc est un « acteur majeur » de l'édition en Afrique    L'Algérie accusée de vouloir annexer le nord du Mali    Etats-Unis-Maroc : Nasser Bourita reçu à Washington par Marco Rubio    GITEX AFRICA 2025 : le VILLAGE APEBI, vitrine de l'innovation numérique marocaine    Wydad-Raja : La date et l'heure du derby casablancais dévoilées    Rallye Aicha des Gazelles : Dacia Maroc mise sur ses talents féminins et sur son nouveau Duster    Liga : Cristiano Ronaldo va-t-il racheter le FC Valence?    Global money week : l'ACAPS initie les jeunes à la prévoyance sociale    Levée de fonds : PayTic obtient 4 M$ pour transformer la gestion des paiements    Le CG examine la formation aux métiers du transport à Nouaceur    Morocco FM Nasser Bourita to meet with US counterpart Marco Rubio in Washington    DGAPR : Fin de l'introduction des paniers de provisions après des cas de trafic    Le temps qu'il fera ce mardi 8 avril 2025    Espagne : Des ravisseurs exigent une rançon à la famille d'un migrant marocain enlevé    Les températures attendues ce mardi 8 avril 2025    Maroc-Pérou : Un accord signé portant sur des enjeux politiques et sociaux    Welcome Travel Group : le Maroc élu meilleure destination    Le Mexique n'exclut pas d'imposer des droits de douane de rétorsion contre les Etats-Unis    Etats-Unis : Nasser Bourita sera reçu par Marco Rubio à Washington    Parution : Abdelhak Najib signe des «Réflexions sur le cinéma marocain»    Escapades printanières : Le Maroc, destination incontournable des Français    Industrie du cinéma : 667.000 $ pour 29 festivals    Siel : 775 exposants pour la 30e édition    L'Algérie a fini la construction d'une base aérienne près du Maroc    CAN U17/Groupe C: La Tunisie et le Sénégal qualifiés, la Gambie barragiste    Coupe du Monde des Clubs 2025 : Yassine Bounou exprime sa fierté de représenter Al Hilal face au Real Madrid    L'Algérie perd la tête et continue de souffrir du "syndrome de la diarrhée chronique des communiqués"    Le rallye "Morocco Desert Challenge" fait escale à Laâyoune    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Le cinéma post-apocalyptique de Hicham Lasri
Publié dans Albayane le 29 - 01 - 2016

Prélude en guise de pré-générique : dans une séquence du film, La sociologie est un sport de combat, documentaire de Pierre Carles consacré à Pierre Bourdieu, on voit celui-ci recevoir un courrier de J.L. Godard ; l'éminent intellectuel ouvre l'enveloppe et découvre un document qui est un collage à partir de photogrammes du film de Godard, Histoire(s) du cinéma; le sociologue regarde puis dit : «je ne comprends rien... je ne suis pas poète». Il finit par remettre les feuillets dans l'enveloppe et le journaliste lui demande : «ça reste un dialogue de sourd alors ?». Bourdieu acquiesce : «mais dès l'origine»; il sourit et regarde la caméra : «Ah...pauvre Bourdieu !»...
L'année 2015 fut une année faste pour le cinéaste marocain Hicham Lasri : deux longs métrages, The sea is behind et Starve your dog et deux autres en chantier. Les deux premiers ont eu et continuent à avoir une riche carrière internationale...Toronto, Dubaï et le cinéaste sera bientôt à Berlin pour présenter Starve your dog. Les films confirment une tendance et affinent un mode de production qui est une véritable économie politique du cinéma. Un dispositif cinématographique (il faudra préciser davantage le concept de « dispositif ») global qui ne manque pas d'interpeller non seulement tout projet de lecture/critique mais l'ensemble du discours sur le cinéma, ici et maintenant. Lasri impose un rythme de production et une démarche d'expression qui constituent un véritable contre-champ aux pratiques dominantes dans le champ du cinéma. Il bouscule l'horizon d'attente du récepteur nonobstant le cadre de cette réception (cinéphilique, commerciale, journalistique...). Chaque réception de son film est une entreprise hors norme...à l'image des films eux-mêmes. Voici des fragments d'un projet de lecture, une bande annonce de l'article futur ; des postulats sur une piste...
Postulat un : Je pose comme postulat, à mes risques et périls, que le cinéma de Lasri est un cinéma surréaliste : je me réfère pour couverture à la citation de l'un des pères du surréalisme André Breton quand il dit : « je crois à la résolution future de ces deux états à l'apparence si contradictoire, que sont le rêve et la réalité, en une sorte de réalité absolue, de surréalité, si l'on peut dire ». Une manière de placer un repère sur la voie d'une filiation (Buñuel). Le surréalisme étant par ailleurs une forme –exacerbée- du naturalisme. Celui-ci étant défini comme « le réel vu par les hommes ». Quelque part le cinéma de Lasri (déjà quatre longs métrages et un autre collectif) est une variante du naturalisme qui transcende le réalisme du mélodrame qui fait l'essentiel du cinéma marocain. Absence de tout psychologisme ; démarche qui met au jour le fond noir, morcelé, violent, obsédant du monde pulsionnel de ses personnages : le cinéma de Lasri est deleuzien. Le réel chez lui est sans cesse « décadré » - voir l'ouverture de The sea is behind- car envahi par le monde souterrain des instincts et des pulsions qui hantent les personnages. Un cinéma post-réalisme qui vient pallier à la saturation du sens par le storytelling et les multiples expressions de la réalité amplifiées par la prolifération des écrans. Comment faire (encore) du cinéma à l'ère du YouTube et dailymotion ?
The sea is behind et Starve your dog nous proposent un autre contrat de réception et un autre régime des images. Là où la signification n'est jamais assignée à résidence, mettant le confort du spectateur du samedi soir en déroute ; un cinéma de la monstruosité : celle-ci étant l'écart qui se nourrit de l'inédit, de l'excès, du grotesque, du terrifiant et de l'insolite : le retour de 404 dans C'est eux les chiens ; l'appareil dentaire de Daoud ; la scène de zoophilie dans The sea is behind ; la fille de Driss et le jeune au visage difforme dans Starve your dog.
Postulat deux : Fin du réalisme. Fin de tout un monde. C'est un cinéma post-apocalyptique. Les personnages et leur univers sont des survivants qui évoluent dans des ruines ; ils font suite à une catastrophe. Déjà son premier long métrage offre un indice : The end, la fin de quelque chose. Je formule alors mon second postulat : C'est eux les chiens, the sea is behind, Starve your dog sont issus de la séquence ultime de The end celle qui fait suite à l'annonce de la mort de Hassan 2 et le dépouillement du cadavre de Pitbull. Les personnages de trois films qui vont suivre sont inscrits dans le programme de cette séquence de clôture, apocalyptique. Une figure d'origine littéraire africaine mais investie par le cinéma (Roméro) offre une entrée d'une possible lecture des personnages de Lasri ; la figure du zombie. 404, c'est pratiquement un mort qui revient (un revenant) hanter les vivants (juin 81/ février 2011). La mort traverse the sea is behind : « Larbi » le cheval qui tire le récit est déclaré cliniquement mort par la vétérinaire. Daoud est réduit à un cadavre ambulant ; Tarik semble nous parler d'outre-tombe (l'image des menottes en ouverture), son horizon est hanté par la catastrophe des Twin Towers...Dans Starve your dog la séquence d'ouverture est sous le signe de l'apocalypse ; le discours de la vielle dame est apocalyptique. Driss , le visible qui renvoie à l'invisible basri, est la réincarnation d'une figure qui hante l'horizon politique et médiatique du pays.
La figure du zombie permet à Lasri de mettre en place une logique (je n'ose pas parler d'une dramaturgie ; son scénario est adramatique) de l'errance (404), de la déchéance (Daoud ; Driss). Une métaphore d'une société rescapée d'un drame, animée de sujets traumatisée (l'équipe de télévision).
Le zombie est en outre une logique d'écriture filmique qui induit une logique de l'espace. Le zombie ordonne une organisation spatiale particulière qui neutralise toute velléité référentielle. Si dans C'est eux les chiens, l'espace offre une certaine homogénéité, dans the sea is behind et Strave your dog nous sommes dans un espace péri-urbain, fragmenté, hétérogène. Ce sont des espaces de transit, des espaces de circulation sans ancrage. Les trois films proposent un discours sur l'espace où nous dégageons quelques tendances : fragmentation ; ghettoïsation (C'est eux les chiens, The se ais behind), disparition de l'espace public (voir la place Lhmam envahie par des figures de l'étrangeté).
Postulat 3. Les films de Hicham Lasri sont des films politiques. Ils traitent de parias, d'exclus réduits à la condition animale. La politique présente non comme déclaration d'intention mais comme parabole à travers le discours silencieux des corps, des formes et des espaces ; c'est une réécriture des images : la violence du réel passe chez lui par la violence de la représentation de la violence physique et symbolique qui caractérise les rapports sociaux. Une esthétique qui revendique la marge et la périphérie. Il est temps alors de lui poser une question éminemment politique : quelle légitimité pour un cinéma de la périphérie dans un contexte de cinéma sans centre. Pour que la périphérie ait un sens, il faut qu'il y ait un centre qui lui donne sa raison d'être. La légitimité d'un cinéma relève également du degré de son inscription dans une sociabilité. La révolution du mode de production reste amputée sans un mode adéquat de distribution.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.