Les services marocains ont communiqué, à temps, à leurs homologues français des renseignements très opérationnels dans le cadre de l'enquête sur les attentats meurtriers du 13 novembre à Paris, a affirmé le Directeur du Bureau central d'investigations judiciaires (BCIJ), Abdelhak El Khayam. «Nous avons communiqué, à temps, des informations à nos homologues français car nous jugions ces renseignements très opérationnels sur certains auteurs desdits attentats», a souligné M. El Khayam dans entretien publié mercredi par le quotidien français «Le Figaro», précisant que «l'une de ces informations a permis de remonter jusqu'au logement d'Abdelhamid Abaaoud, la plaque tournante des attaques». Il a aussi indiqué que la coopération avec les services occidentaux est aussi excellente qu'ancienne car le terrorisme est «notre ennemi commun», faisant savoir que depuis toujours, les services de sécurité marocains ont fourni à leurs partenaires étrangers des renseignements hautement opérationnels ayant permis la destruction de camps d'entraînement comme celui de Khalden en Afghanistan, détruit en 2011 par l'aviation américaine, et la détection de projets terroristes ayant visé des sites sensibles dans certains pays européens tels la basilique de Bologne ou le siège d'un service de police à Paris, ainsi que la saisie de lots d'armes notamment en France et en Belgique. «Le terrorisme n'a pas de nationalité, ni de frontières. Il est l'ennemi de tous», a dit M. El Khayam. Sur un autre registre, il a fait savoir que le nombre de Marocains qui sont partis en Syrie pour rejoindre Daesh s'élève à 1.500, notant qu'ils «sont, pour nous, tous des terroristes et font l'objet de mesures de recherche et d'interception s'ils retournent au Maroc». Il a, dans ce sens, rappelé que la loi antiterroriste punit de 5 à 10 ans de prison les actes ou les tentatives de ralliement d'un foyer de tension où sévissent des organisations terroristes. «La stratégie de notre pays est l'anticipation», a-t-il dit, ajoutant que depuis le déclenchement de la crise syrienne, les services de sécurité marocains ont procédé au démantèlement de 29 structures liées à cette zone de guerre sur fond d'arrestation de plus de 200 individus, porteurs de projets malveillants, conformément à l'agenda d'Abou Bakr al-Baghdadi. «Mis au défi par le danger terroriste, le Royaume s'est inscrit dans une dynamique sécuritaire pour contrer la menace incarnée par al-Qaida et ses groupes franchisés, et aujourd'hui Daech», a expliqué le patron du BCIJ, précisant que depuis 2002 l'action d'anticipation a permis la neutralisation de 150 structures terroristes, dont plus d'une cinquantaine liées aux différents foyers de tension, notamment la zone afghano-pakistanaise, l'Irak, la Syrie et le Sahel. Le Maroc a aussi renforcé son arsenal antiterroriste avec notamment l'inauguration, en mars 2015, du BCIJ, qui constitue une interface judiciaire de la Direction générale de surveillance du territoire (DGST), dont l'action, qui s'effectue dans le strict respect des droits de l'Homme, vise à assurer la sécurité des citoyens, a dit M. El Khayam, rappelant que depuis sa création, ce bureau a démantelé 23 cellules terroristes, ayant à leur actif des projets malveillants visant des intérêts nationaux et occidentaux, ainsi que le recrutement et l'acheminement de combattants au profit des groupes armés en Syrie et en Irak, dont notamment Daech. La dernière cellule, mise hors d'état de nuire en janvier 2016, envisageait aussi de rallier la Syrie, avant d'opter pour la Libye en guise d'alternative pour intégrer la branche de l'Etat islamique dans ce pays, dès lors que le périple pour rallier ce dernier foyer de tension s'avère moins risqué et moins coûteux, a-t-il indiqué. Interrogé sur la situation en Libye, M. El Khayam a affirmé que cette dernière constitue un terrain par excellence pour les djihadistes de la région, car Daech a pris le contrôle de points importants et constitue une menace pour la région maghrébine et pour les pays du pourtour méditerranéen. Par rapport à la Syrie, la Libye connaît la présence de cas isolés de combattants marocains dont la première vague avait rallié les rangs des islamistes d'Ansar al-Charia dans ce pays, avant de rejoindre les rangs d'Aqmi, a-t-il fait savoir, précisant que d'autres ont été influencés par les thèses de l'Etat islamique en Libye. «Le Maroc prend au sérieux le cas de ces combattants dès lors qu'ils sont très bien entraînés et scrutent l'opportunité de revenir au Royaume pour y sévir en tant que conquérants», a affirmé le directeur du BCIJ.