Festival de Marrakech «Serein, sobre et diversifié». Ce sont les qualificatifs qui sont repris au terme de la 14ème édition du festival de Marrakech par les festivaliers, nombreux encore cette année à venir plébisciter la fête du cinéma annuelle qu'abrite la ville symbole du Maroc éternel. Les premiers à afficher leur satisfaction et ne cachent pas leur plaisir, ce sont les cinéphiles, qui, à quelques instants à peine de la proclamation du palmarès, mènent des discussions animées pour départager les favoris des uns et des autres...De l'Azerbaïdjan à l'Inde en passant par les Usa, la Russie ou l'Iran...les uns et les autres défendent leur choix avec des arguments puisés dans la force des films présentés cette année. Une compétition officielle inscrite dans la droite ligne du concept que le festival a fait sien depuis quelques années et qui fait son identité, désormais avérée et reconnue de par le monde ; celle de s'ouvrir sur la vaste carte du cinéma au sens géographique et esthétique du mot. Des films d'auteurs, indépendants, des premières œuvres... représentatifs des cinq continents de la planète. Des films de facture variée n'hésitant pas à radicaliser des choix esthétiques à l'instar du film hindi qui choisit de dire la complexité du mouvement social dans un long métrage sans dialogues, tout en dégageant émotion et plaisir intellectuel... Le thème récurrent de l'enfance dans plusieurs films programmés renvoie à la fois à une quête de l'innocence perdue tout en invitant à un regard quasi éthique sur le monde. Autre moment cinéphilique fort avec le pays invité cette année, le Japon. «C'est un événement cinématographique majeur mais aussi un message culturel plein de sens» commente un observateur. Le Japon et le Maroc étant des Nations qui partagent de nombreux communs du point de vue de leur évolution historique et de leur rapport à la modernité. La présentation « des maîtres et disciples » du cinéma japonais, l'un des plus importants du monde, offre aux festivaliers dans leurs différentes catégories, une mise en perspective qui ne manque pas d'éclairer leur approche d'un cinéma national en émergence. Un cinéma qui réussit son ancrage social sur la base d'une légitimité artistique original. Une équation qui se pose avec acuité au cinéma marocain. Un cinéma national qui a retrouvé une nouvelle fois à Marrakech une vitrine de choix et une plateforme d'échange et de travail. Si les cinéphiles n'ont pas cessé de discuter de la nouvelle approche artistique de Mohamed Mouftakir ou du regain de cinéma de divertissement avec Karrat et Fennane, les distributeurs, eux, étaient à l'affût du filon qui remplira les salles et ont entamé leur approche des futures sorties. Les producteurs pour leur part ont multiplié les rendez-vous institutionnels et informels pour dégager de nouvelles pistes sur la voie de la coproduction. L'une des réussites avérées du festival et qui a été l'un des éléments majeurs de cette édition a été l'attitude du public et son évolution dans le sens de la ligne éditoriale du festival et qui s'est illustré dans l'accueil attentif, enthousiaste, tolérant...pour les films dans leur diversité. Les différents espaces qui ont abrité les 113 séances proposées par le festival ont connu de fortes affluences conjuguant engouement populaire (le film hindi ou Adil Imam à Jamaâ El Fna) et passion cinéphile (projection d'un film japonais à minuit au Colisée) ! Continuité, persévérance et ouverture intelligente sur les attentes de son environnement immédiat et sur les bruits du monde, le festival de Marrakech porte dans son programme génétique les indices culturels et humains qui renvoient à la ville qui l'a naître.