D'un moment à un autre, la recomposition du champ politique marocain suscite des interpellations, voire des «coups de gueule» dont le contenu reste beaucoup plus marqué par la critique abusive et outrancière que par une approche autocritique visant à dépasser les difficultés et à présenter une véritable alternative. Si depuis quelque temps déjà, «la société, les repères, les systèmes de valeurs ainsi que les grands problèmes contemporains sont d'un nouvel ordre», d'aucun(e)s restent attachés à des comportements passéistes dont l'aspect relique relève beaucoup plus de la nostalgie d'un passé militant magnifié que d'une action politique en adéquation avec les exigences du présent et les aspirations du futur. Les salafistes de la «gauche» s'adonnent ainsi à l'autoflagellation, balayant d'un discours la réalité dans laquelle ils ne se retrouvent pas. Négationnistes, ils ne veulent reconnaitre que leur personne au moment où l'histoire récente a montré la caducité de leur approche antérieure. Tous ceux et celles qui avaient versé dans le gauchisme, cette maladie infantile, n'ont pu dépasser leur aversion à l'encontre des adeptes de la réforme, du compromis historique et des avancées négociées dans le sens de l'édification de l'Etat national et démocratique. A moins qu'ils aient été reversés dans un projet de structuration par le haut du champ politique sans aucune autocritique ni même la modestie de la reconnaissance du travail accompli. Leur approche occulte, comme par le passé, le rapport des forces dans la société qui reste déterminant dans la réalisation du changement et ils croient, comme par le passé, que ce sont les envolées discursives enflammées dans un cadre plus que restreint qui vont le changer. Il est clair que l'alternance consensuelle n'a pas permis aux forces démocratiques et progressistes de consolider le leadership qu'elles avaient dans la société. Elle a le mérite d'avoir assuré la stabilité et une transition démocratique pacifique reconnue à travers le monde. L'équilibre dynamique ainsi instauré nécessite une clairvoyance et un engagement sans défaut pour faire aboutir le processus à son terme. Comme par le passé, la pratique des slogans et de la fuite en avant ne peuvent ni changer la réalité ni consolider la confiance entre les acteurs du champ politique marocain au sein duquel les malentendus ne cessent de semer la suspicion. La méfiance ne fait qu'aggraver l'éloignement des forces vives du processus dans son ensemble au lieu de les amener à pratiquer dans un mouvement social responsable et organisé la tactique nécessaire afin que ce processus soit dégagé de l'opportunisme et de la débauche. Les circonstances de chaque étape, depuis l'avènement de l'alternance consensuelle, montrent l'accentuation des divergences des forces démocratiques et progressistes qui ont permis à leur mise en retrait et à faire apparaitre leur division. La responsabilité de cette situation revient aux tenants du zigzag politique, animés qu'ils sont par l'opportunisme et cultivant à l'outrance le particularisme, l'égocentrisme et l'hypocrisie politique. Si les Marocaines et les Marocains ne sont pas dupes de cette action, ils restent dans une certaine mesure des spectateurs affligés de la détérioration de l'action politique. La pratique du nihilisme ne peut en aucun cas les encourager à se mobiliser dans un sursaut salvateur au sein d'une gauche dénigrée à tort par ceux-là même qui veulent la promouvoir. La «gauche» existe bel et bien dans la société marocaine «voudra qui voudra et refusera qui voudra». Elle réfléchit, agit et propose. Une de ces composantes, et non des moindres, est à l'exécutif. Notre peuple se prononcera sur cette expérience. Celles et ceux qui en doutent doivent se préparer à cette échéance. Il n'est pas dans les habitudes des progressistes de se mettre en doute. A l'approche des élections où l'engouement pour l'engagement partisan se renouvelle; il s'agit, beaucoup plus pour la gauche que pour tout autre axe politique, de relever les défis inhérents «au bon exercice du pouvoir» qui ne concernent pas seulement les rouages de l'Etat qui s'apprête à inaugurer la régionalisation avancée dans son administration territoriale; mais interpellent aussi les élus dans leur ensemble et leur capacité à répondre aux vœux des populations à vivre dans le bienêtre.