Garantir l'indépendance de la justice et du parquet constitue un défi majeur pour la mise en application optimale des dispositions de la Constitution relatives à la réforme de la justice, ont indiqué, jeudi à Rabat, les intervenants à un colloque sur “la réforme du pouvoir judiciaire, nouvelle constitution marocaine et normes internationales”. La réalisation de cette indépendance requiert l'activation du rôle du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ), de la Cour constitutionnelle et la réforme du statut des magistrats, et ce conformément aux normes internationales se rapportant à l'indépendance du pouvoir judiciaire et sa neutralité à l'égard du pouvoir exécutif et du parquet, ont-t-ils souligné. S'exprimant à l'ouverture de cette rencontre, initiée par le Conseil national des droits de l'Homme(CNDH) et la Commission internationale des juristes, le président du Conseil, Driss El Yazami a rappelé que la conception de réforme de la justice consacrée par la nouvelle Constitution est basée sur les recommandations de l'Instance Equité et Réconciliation en la matière, citant notamment la constitutionnalisation de plusieurs principes des droits de l'Homme, comme la présomption d'innocence, le droit à un procès équitable et la consécration de la séparation des pouvoirs. Elles concernent également la réforme du statut des magistrats, l'interdiction de toute intervention du pouvoir exécutif dans l'organisation de la justice et le fonctionnement du pouvoir judiciaire, le renforcement des garanties constitutionnelles de l'indépendance du CSPJ et l'élargissement de ses contributions en termes d'organisation de la justice, ainsi que la promotion de la politique judiciaire et pénale. Pour sa part, le délégué interministériel chargé des droits de l'Homme, Mahjoub El Hiba a souligné que la réforme de la justice est une condition fondamentale pour la consolidation de la démocratie et le respect de l'Etat de droit, mettant l'accent sur l'importance de permettre au magistrat de jouir de sa liberté, étant le garant de la confiance du citoyen vis-à-vis de l'Etat et de la société. M. El Haiba a insisté à cet égard sur le rôle de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle dans l'amélioration de l'application de la loi, le parachèvement des dispositions de la mise en œuvre de la constitution et sur la responsabilité de l'Etat, des tribunaux et des juges pour assurer les garanties nécessaires à l'indépendance de la justice, comme étant “non seulement une exigence morale et professionnelle, mais un droit et un devoir”. Quant au professeur universitaire Mohamed Alami Machichi, il a qualifié de “révolution” les dispositions apportées par la Constitution en matière de réforme de la justice, en précisant clairement que la justice est un “pouvoir” et pas seulement une simple autorité, à l'instar des deux autres pouvoirs législatif et exécutif. Le juriste Machichi a fait part de quelques défaillances qui entachent le bon fonctionnement du parquet et de l'organisation judiciaire, mettant l'accent sur l'importance de faire séparer le pouvoir judiciaire du ministère de la justice et des libertés d'une part, étant donné que “le ministre de la justice ne siège plus au conseil supérieur du pouvoir judiciaire”, et du ministère de l'intérieur, d'autre part, tant que certains agents d'autorité ont le statut d'officiers de la police judiciaire, selon la loi”, a-t-il ajouté. Pour sa part, le conseiller juridique principal à la Commission internationale des juristes (ICJ), Said Benarbia, a affirmé que l'indépendance de la justice constitue un mécanisme de consolidation de la suprématie de la loi et la protection des droits de l'Homme, notant à cet égard que les défis de la nouvelle Constitution se posent notamment au niveau de l'élaboration des lois organiques. M. Benarbia a souligné que plusieurs pays, y compris les pays démocratiques, sont confrontés aux défis de la réforme du parquet, à savoir “le parquet est-il un organisme judiciaire ou relève du pouvoir exécutif ? et celui de “la possibilité de mettre en cause ses décisions”. Les travaux de cette rencontre scientifique traitent notamment du rôle du conseil supérieur du pouvoir judiciaire dans la consolidation de l'indépendance de la magistrature, la réforme du statut des magistrats, le ministère public, quelle indépendance, l'indépendance de la justice entre la loi et la pratique.