C'est aujourd'hui, samedi 11 février que le festival Agadir cinéma et Migrations met fin à ses travaux. La traditionnelle cérémonie de clôture sera très probablement marquée par la présence d'Amine Sbihi, ministre de la Culture. Sa présence à cet événement d'envergure qui souffle cette année sa neuvième édition, est très attendue et appréciée, d'autant plus que ce sera, sans contestation, le premier responsable de ce département qui accepte volontiers d'honorer de sa présence une aussi prestigieuse activité thématique nationale de haute notoriété. Durant quatre jours d'affilée, les festivaliers et les grandes foules auront vécu des moments de haute intensité à la fois émotive et cognitive. De par son caractère convivial et festif, cette tradition tisse constamment les fils de partage et de communion entre une flopée d'artistes jeunes et la panoplie de visiteurs de la cité et sa banlieue. Les multiples séquences de tares et d'avatars que vivent les compatriotes dans les pays d'accueil font émerger des sentiments aussi de compassion et de révolte, au creux du contexte migratoire, ardemment dilemmatique. A la fois passionnel et passionnant, le menu proposé, dont une partie relève d'un registre caricatural, ne manque pas de hardiesse et d'ardeur, crânement entrepris par des jeunes talents, en pleine aventure artistique. La manifestation dont la cérémonie d'ouverture a eu lieu, mercredi dernier au cinéma Rialto d'Agadir a également brillé de mille feux par la diversité des volets mis en avant, joignant l'utile à l'agréable. En effet, outre les projections, plus de trente films du long au court et documentaire, ce rendez-vous de taille a eu pareillement le mérité d'étendre savamment l'éventail de l'offre pour mettre à contribution une série de rencontres à caractère idéel scientifique, à travers des conférences vivement animées par d'éminents experts en la matière, des professionnels, des chercheurs. Cet axe qui insuffle à ce bouquet éclos une pimpante touche de débats sérieux et accrocheurs, pour se propager aussi dans l'enceinte de l'université qui se taille, pour le reste, sa part de contribution dans cette fête symbiotique. Il est bien évident que cette neuvième manche a été caractérisée, cette année, par deux faits saillants ayant, sans doute, donné un aspect rayonnant. Il s'agit de la présence d'une sommité incontestable, Tahar Benjelloun, président de marque de cette édition et de l'hommage émouvant rendu à deux figures emblématiques des cinémas égyptien et marocain, en l'occurrence Hassan Housni et Younès Megri. Comme à l'accoutumée, le festival d'Agadir Cinéma et Migrations a convié une multitude de stars marocaines qui ont imprimé, encore une fois, à ce rassemblement, une note d'intimité de liesse avec les fans qu'ils ne cessent pas de côtoyer et choyer. Il est bien clair que, au-delà des programmes variés et attractifs que l'association Al Mobadara, organisatrice de cet événement annuel, a bien eu le soin de mettre sur pieds, le festival se distingue par cette sorte de complicité émotionnelle qui unit les vedettes de cinéma marocain et leurs fans. Lors de la cérémonie d'ouverture, Driss Moubarik, président de cette structure associative, avait annoncé, lors de son speech de bienvenue, une bien affreuse nouvelle, inhérente à la fermeture du cinéma Rialto, juste après le baisser de rideau du festival. Une nouvelle qui tomba comme une douche froide dans les milieux communautaires de la ville. Après la disparition du cinéma Salam, c'est le tour désormais du cinéma Rialto, deux monuments culturels historiques qui ont fait vivre aux générations des moments pathétiques avec les géants du cinéma mondial. Une métropole comme Agadir, second pôle économique, première station balnéaire du royaume et dépositaire de Souss Al Alima, bastion de la science, de la création et de la connaissance, sera donc privée de l'une de ses assises infrastructurelles culturelles les plus notoires. Cinéma Rialto était non seulement un havre de projection cinématographique, mais également un âtre soyeux de débats sereins des chefs d'œuvre lors des séances de ciné clubs, de meetings politiques et de prestations théâtrale et musicale. Le festival d'Agadir Cinéma et Migrations qui écoulera, l'année prochaine, sa première décennie sera, sans doute, orphelin de son parrain auquel les voracités mercantiles se sont évertuées à signer son décès. On ne peut que déplorer cette situation déconcertante qui, en fait, vient crucifier, sur l'autel du massacre, un des rescapés de survivance, Cinéma Sahara, en état de délabrement alarmant, connaitra-t-il le même sort ? On peut toujours comprendre l'état désastreux dans lequel se trouve une bonne partie de nos cinémas, du fait, justement, que les gens ne vont plus au cinéma et ont sûrement perdu cette fameuse maxime « qui aime la vie, va au cinéma ». Devant cet abandon, les propriétaires vivotant, se trouvent dans l'obligation de fermer boutique et d'aller voir ailleurs, où le foncier devient alléchant. De même, il faut bien dire que ces même gens, contaminés par les mutations profondes du commerce et l'urbanisme, ne cherchent plus à investir dans le cinéma aussi aléatoire que velléitaire, surtout qu'ils ne déploient aucun effort pour restaurer et rénover leurs locaux transformés en taudis piteux. Cependant, il serait incivique et inhumain de sacrifier un patrimoine culturel et sociétal qui appartient, dorénavant, à toute une conscience collective. C'est le cas de cinéma Salam qui git toujours tel un mastodonte éventré et, aujourd'hui, cinéma Rialto qui tire sa révérence au grand dam des populations. Un débat profond auquel sont conviés les institutionnels, les élus, la société civile, les professionnels…pour sortir la ville du marasme de la privation consternante.