M'hamed Grine à Agadir C'est devant une large assistance que M'hamed Grine, membre du Conseil de la présidence du PPS, a donné, vendredi dernier à la salle de la jeunesse et sports d'Agadir, un exposé autour de la dualité «élite politique/société civile». Cette rencontre qui s'insère dans le programme national du parti commémorant le 70e anniversaire de sa création a été saisissante, de par l'ambivalence de la problématique du thème abordé, la qualité potentielle du traitement communicationnel approché et la réactivité enrichissante de l'imposante audience. En fait, après une décortication subtile du concept afférent aux constituantes de ces antagonismes, l'intervenant tenait un discours aussi bien dégagé qu'interpellant. Selon lui, le paysage partisan marocain se perd dans des méandres ambigus et, de ce fait, perd de sa notoriété par le biais de laquelle la stabilité sociétale, déjà ancrée dans fondements du pays, tendrait à se renforcer. Il appartient donc à tout un chacun de contribuer à la vie politique, car il ne sert plus à rien à s'en dérober, au moment où le défrichage est encore dans son état embryonnaire. De même, enchaîne-t-il, il est grand temps de recouvrer la pratique politique saine dédiée au grand peuple et en dépoussiérer toutes les indispositions nocives, à l'instar des tentatives réconciliatrices manifestées, avec détermination, à l'adresse des victimes des années de plomb, de la condition de la femme, des droits de l'homme, de la culture et la langue amazighe, de la révision constitutionnelle...Toutefois, en dépit de toutes ces prouesses au plan institutionnel, il va sans dire que la panne politique constitue un sérieux handicap pour la concrétisation de cette volonté confirmée de relèvement. Le constat est encore plus alarmant en ces temps-ci, poursuit-il, non sans une connotation d'amertume profonde. «Vous savez, le boycott dont fait preuve une grosse frange des non-électeurs altère le diagnostic réel de la situation politique dans le pays qui fait qu'avec un taux d'un peu plus d'un million de voix qui ne représentent, en fait, qu'un faible pourcentage, un parti politique s'adjuge la première place et «impose» ses choix sur l'ensemble des citoyens, en déconsidérant tous ceux et celles qui ne sont pas allés aux urnes. Les intellectuels et les cadres n'ont alors plus le droit de se cantonner en spectateurs passifs, frayant ainsi la voie libre à ceux qui veulent se jouer de l'avenir des générations montantes. Cette aberration m'incite à réfléchir sur l'éventuelle obligation à la participation aux opérations de vote pour tous les inscrits, sous peine d'amende administrée aux réfractaires. Cette mesure pourrait être interprétée comme une atteinte à la liberté individuelle, mais le devoir civique se place au dessus de toute autre considération », déclare M'hamed Grine, tout en exhortant les jeunes de se monter actifs dans ce sens. La bataille de «la rue» est nécessaire, toutefois il importe de chercher à accéder aux centres de décision, en produisant des idées et des alternatives, sereines et réalistes, aux préoccupations du peuple et de la nation. «Il va falloir passer de la culture de «la rue» à la culture de «l'opinion publique», sans pour autant minimiser le rôle primordial que peut jouer la manifestation de matérialiser les revendications», souligne-t-il avec conviction. D'autre part, le conférencier n'a pas manqué de louer l'émergence d'un réseau multiforme de la vie associative, dans notre pays. Ces structures organisées, à caractère social, humain, environnemental, féminin, des droits de l'homme... est en passe de fleurir à une cadence accélérée, suite aux besoins ressentis dans tel ou tel domaine de la vie active. Cette évolution ascendante est d'autant plus judicieuse qu'il serait prudent de définir les contours et les missions de ce déferlement pléthorique. Dans un autre registre, M'hamed Grine met en garde le fait que le concept de «technocrates» renferme une connotation plutôt péjorative, alors que cette souche est porteuse d'expertise technique dont le pays a grand besoin pour telle ou telle spécialité. En parallèle, la pratique syndicale devrait, souligne-t-il, se baser sur des assises d'autonomie à l'égard des partis politiques, du patronat, de l'Etat, des lobbys économiques et autres. La subsistance des «courroies de transmission» partisanes a, en effet, beaucoup nui à la tâche syndicale dans notre pays et la discrédite aux yeux des salariés et des ouvriers. De même, la pratique partisane, chez nombre de formations est, de plus en plus, dénuée de sa mission initiale, car elle demeure assujettie à l'assouvissement des intérêts réducteurs de certains groupements, loin de toute approche globale axée sur les valeurs de l'encadrement et de la formation des populations. «On ne peut bâtir une véritable démocratie sans vote politique et ce dernier ne peut s'accomplir qu'avec le vote de la majorité écrasante de la société», conclut-il.