Meriem Bekkali est docteur en lettres françaises. Après un essai intitulé «Le transit mémorial dans -Un Eté à Stockholm- de Khatibi», elle se consacre à l'écriture du roman et de la poésie. Tout récemment, elle a publié en Egypte son deuxième recueil, ô poésie ! Ne m'abandonne pas ! Dans cet entretien, elle nous parle de son nouveau-né poétique. Voulez-vous bien nous parler de la genèse de votre dernier recueil? Beaucoup de conditions peuvent présider à la naissance d'un poème. Parfois, on réagit à un vécu particulier. Le poème, donc, peut être entaché d'engagement politique ou autre comme il peut être subi en lettres ou en images. Dans ce cas, il se transforme en un" capté" par le poète. Ce dernier peut être également capté par le moment poétique et mystérieux de l'écriture. Bref, l'identité du poème est multiple, on ne peut ni la cerner, ni en décider le destin. Ecrire en arabe est un acte qui m'a accompagnée dès l'adolescence. J'ai toujours été traversée par ce va et vient entre l'écriture en arabe et celle en français. L'inspiration, dans ces deux états, ne prévient pas et garde pour elle ses propres lois. La publication de mon premier recueil en arabe était seulement une question de temps. Le titre de votre recueil est, dans une certaine mesure, une injonction adressée à la poésie. Avez-vous peur d'être abandonnée par le vers? Tout poète ressent effectivement cette peur d'être abandonné par la poésie. Cette dernière, comme a dit Saint John Perse, est la vraie vie. Elle est effectivement une science de l'être. A travers le vers, le poète respire vraiment. Outre la dimension scientifique de la poésie qui pérennise le vrai/ le capté dans l'instantané, la poésie permet au poète d'effectuer une vraie évolution dans sa vie psychique. La sagesse est le lot de cette expérience. Le lecteur connait Meriem El Bekkali comme écrivaine en langue française. Cette fois-ci, vous avez produit dans la langue arabe. Pourquoi ce revirement? En fait, j'ai toujours écrit en français comme en arabe des poèmes, nouvelles et pensées, mais la formation que j'ai suivie en langue et littérature françaises a participé à cette réalité .En fin de compte, c'est la publication en français qui a précédé la publication en arabe. Qu'en est-il maintenant de la publication en Egypte? Pourquoi ce choix? L'idée de publier en Egypte trouve son origine dans plusieurs lieux. Certes, c'est en quelque sorte une sorte d'alternative à certaines contraintes de publications au Maroc. Comme vous le savez, la distribution du livre reste un problème majeur. Mais bon, la publication en Egypte ajoute, surtout, à mon expérience poétique de nouveaux lecteurs, de nouvelles lectures. Autrement dit, une approche critique ou intuitive est toujours enrichissante. Quelles sont les thématiques centrales de votre recueil? Le recueil se focalise essentiellement sur le rapport du poète à la poésie. Dans de nombreux poèmes, le questionnement de ce rapport est au centre. Vous n'avez qu'à remarquer le titre de ces poèmes : « Poésie, ne me quitte pas », «La poésie se fatigue à l'intérieur de moi », « Elle est ta langue et toi sa poésie ».Un autre thème important est celui de la mort ; un thème central à caractère mystique. Les poèmes d'amour sont également là et s'inscrivent dans un autre beaucoup plus grand...