L'inspecteur pédagogique à travers une mise en mot de son agir Dans tout système éducatif, les inspecteurs pédagogiques (IP) sont des représentants institutionnels. Ils se doivent relayer les discours officiels. Mais, la structure organisationnelle des IP telle qu'elle est appliquée, dans notre système éducatif, depuis les années quatre vingt du siècle dernier et l'agir des IP, a rendu problématique l'image de ces derniers. En effet, pour les enseignants, les IP sont des acteurs du système éducatif : ils sont capables de décider, évaluer, entreprendre ou initier des actions. Pour les instances administratives, les IP sont des relais des politiques du système éducatif. Ils ne sont plus des acteurs qui sont la cause de leur propre agir, mais des actants qui partagent un agir avec d'autres actants. Elles attendent d'eux qu'ils appliquent ou fassent appliquer les directives venues du «haut». Ils seraient par conséquent de simples agents. A travers une mise en mots de l'agir des IP, on constate qu'il est question de deux groupes professionnels. Le premier est majoritaire, prisonnier à un discours obsolète bipolaire ne connaissant que deux modes le "je" quand il s'agit d'une tournure négative ou à des verbes évoquant une certaine passivité et le mode "on" où ils apparaissent comme second actant, tel que "on ne travaille qu'au nom...", en d'autres termes ils mettent en œuvre une décision arrêtée par le patron. Mais, sans oublier " le beurre et l'argent du beurre ". Le second est une minorité active, omniprésente sur le terrain, utilisant un " je" raisonné. Au-delà des tâches ordinaires ,elle prend des initiatives jugées en harmonie avec les finalités de sa mission. Car "l'innovation, elle, enclenche la confrontation pour faire changer les normes" (Serge MOSCOVICI) Ainsi, cette divergences dans la façon d'agir des IP et les perceptions qui en découlent mettent en avant une qualité requise pour l'exercice de leurs activités : l'identité professionnelle. Il est toujours difficile de parler de l'identité parce qu'il s'agit là d'une notion intrinsèquement problématique. Plus qu'une réponse ou une affirmation, l'identité contient d'abord une interrogation ; elle s'énonce de manière interrogative. La problématique de l'identité n'apparaît en effet pleinement que lorsque devient concevable une question telle que : « Qui suis-je ? » « A quel groupe professionnel, j'appartient ? » Le dictionnaire Larousse donne deux connotations différentes au concept identité : La première : " L'identité est le caractère permanent et fondamental de quelqu'un, d'un groupe, qui fait son individualité, sa singularité ". Donc, l'identité renvoie au sentiment d'individualité ("je suis moi"), au sentiment de singularité ("je suis différent des autres et j'ai telles ou telles caractéristiques") et d'une continuité dans l'espace et le temps ("je suis toujours la même personne"). C'est l'identité psychologique ou l'identité personnelle. La deuxième : " ce qui fait qu'une chose est exactement de la même nature qu'une autre". Dire que je suis " inspecteur pédagogique" devrait, en principe, désigner ce qui est commun à nous tous, et lorsqu'un groupe des IP cherche les finalités de l'existence de ce corps dans le système éducatif, il cherche alors ce commun qui les identifié personnellement et professionnellement. L'identité permet d'établir qui fait partie du groupe et qui n'en fait pas partie. Cette dimension d'appartenance au groupe met en évidence l'impact du groupe sur l'individu et l'intériorisation par celui-ci des modèles sociaux du corps professionnel. Ainsi, le processus d'identification à une profession correspond à des connaissances et compétences communes, et à l'adoption d'un système de normes, codes et manières de faire légitimés par le groupe d'appartenance. Si cette dimension sociale ou professionnelle de l'identité se définit par le «nous», l'identité psychologique s'exprime en «je» et s'appuie sur la singularisation de l'individu. Lorsque nous analysons attentivement l'opération: mission, tâche, valeurs dans les organisations, nous pouvons y trouver une tentative de créer une identité organisationnelle afin d'assurer la coordination des actions. Elle sert à définir ce qui est commun à tous ceux qui revendiquent cette identité. Elle fait appel à un partage de sens, à quelque chose de symbolique (le sens même de l'organisation). Dans cette composante symbolique de l'identité on retrouve les réponses à la question des finalités de nos pratiques. Quels sont les buts de nos pratiques (professionnelles ou organisationnelles) et en quoi ces buts nous sont spécifiques? Par conséquent, comment remédier aux dérives constatées dans les pratiques professionnelles. Les identités ne sont pas des choses données, elles ne peuvent rester figées dans le présent et le passé comme une photographie, mais elles doivent prendre en compte la dimension des nouvelles facettes d'adaptation du sujet, son perpétuel état de devenir, son potentiel évolutif et dynamique. L'identité n'est jamais construite mais toujours à construire. Il y a donc tout une dynamique dans la construction sociale d'une identité et sa reconnaissance. « ...La thèse est que notre identité est partiellement formée par la reconnaissance ou par son absence, ou encore par la mauvaise perception qu'en ont les autres : une personne ou un groupe de personnes peuvent subir un dommage ou une déformation réelle si les gens ou la société qui les entourent renvoient une image limitée, avilissante ou méprisable d'eux-mêmes. La non-reconnaissance ou la reconnaissance inadéquate peuvent causer du tort et constituer une forme d'oppression, en emprisonnant certains dans une manière d'être fausse, déformée et réduite. La reconnaissance n'est pas simplement une politesse que l'on fait eux gens : c'est un besoin humain vital » (Taylor C., 1994) La reconnaissance est au cœur de cette dynamique sociale. D'abord la reconnaissance de tous qu'ils ont une identité professionnelle. Sans cette reconnaissance collective, impossible de construire son identité. La reconnaissance joue un autre rôle, celui dans le groupe qui permet de distinguer ce qui est « fondamental » de ce qui est l'identité appropriée par une personne. Tout comme l'adolescent qui dit à ses parents, je vous renie pas, mais j'intègre dans ma personnalité familiale et je vous demande de reconnaître ceci, le professionnel va adapter avec sa personnalité et son style, l'identité du groupe. Le problème que l'on retrouve souvent avec une identité, c'est celui de vouloir imposer au nom de l'identité une sorte de conformisme négative où l'individu se contente de se conformer aux conventions les moins implicites pour ne pas créer d'ennui et pour éviter de conflit. Mais, il peut au fond avoir des convictions différentes et un désir de changement des normes. Synthèse : -Quand l'identité professionnelle du groupe est ni structurée ni reconnue collectivement. L'écart entre les identités peut provoquer différents heurts; C'est le cas où les personnes en autorité peuvent juger que les répondants ne font pas leur travail, selon la conception qu'ils en ont, et les répondants peuvent vivre une dissonance, parfois pénible, entre les attentes de l'autorité et leur identité professionnelle. -Si on cherche à préciser une identité, c'est dans le but de clarifier qui fait partie du "nous" et qui n'en fait pas partie. c'est une situation pénible mais nécessaire car l'identité vise à isoler le fondamental d'une pratique. -L'identité construite est revendiquée socialement pour être reconnue par d'autres. car il peut arriver qu'un groupe affiche une identité forte mais cette identité ne soit pas reconnue par différents acteurs sociaux. -lorsque les personnes ont la même identité, celle-ci joue le rôle de cadre de référence pour assurer la qualité de la pratique et pour gérer les limites de toute intervention, limites personnelles et limites contextuelles. Donc, l'identité sert de foyer d'interpellation. En conclusion : Loin de toute revendication syndicale, il parait que la réforme de l'organisation structurelle du corps inspectorats est un problème de fond. Toute restructuration ne sera adoptée que lorsqu'elle permet de dépasser cette crise d'identité professionnelle des IP. 1- Serge Moscovici " psychologie des minorités actives" 1991, HTTP://Bibliotheque.UQAC.CA 2- Pilar Marti," identité et stratégies identitaires", http://www.cairn.info/article.php?id_revue=empa&id_numpublie=empa_071&id_article=empa_071_0056 3- Sandra Pellanda, al "la construction et évolution de l'identité professionnelle en formation initiale", congres international de didactique 2010 3- Chevallier "identité, organisation, institution" l'université Panthéon-Assas (paris 2) 4- Sylvain Stark, "autonomie et loyauté chez les inspecteurs de l'éducation nationale" congres international Areef Strasbourg 2007. 5-G.A.Legault " l identité, composants et fonctions relationnelles" colloque de L'APEC Québec juin 2008, www.usherbrooke.ca/cirea.