«ALBAIRA» de Mohammed Abderrahmane Tazi Voilà un film marocain difficile à situer sur l'échiquier du cinéma marocain actuel, et dans la filmographie du réalisateur. Après cinquante de cinéma d'un côté, et après «Le grand voyage», «Badiss» et même « A la recherche de ma femme», dont il emprunte l'air, le genre, le comique. Pour faire rire, ça passe mais pour faire sensibiliser et ajouter du nouveau ce n'est pas donné. Il est du côté de la formule divertissement. On est loin du film d'expression. Un choix. Un homme meurt laissant deux femmes, une jeune fille et un jeune garçon, et une bonne. Un frère lui succède à la tête de cette famille. Tout ce monde vit à Fès, au sein des remparts anciens, dans le vieux univers en pierres, dédales de rue et grouillements de la vie à petite échelle. Forcément, c'est cette vie exotique, séparée de la vie moderne, par l'ambiance, qui est donnée à voir. Tout y passe : décors de la maison, cuisine, habits, langue parlée, habitudes et us. Tout ce qui fait une vie à la fassie et qui plaît énormément à l'étranger, occidental de préférence, mais aussi qui change le spectateur marocain du trop plein de l'univers urbain, trop noir et sombre, qui caractérise les dernières productions marocaines. La première partie du film narre les tribulations de l'oncle, un vieux célibataire sans appétit sexuel, obligé de veiller sur les intérêts de cette famille. Notamment trouver un mari à la jeune fille, hôtesse de l'air, une «baira», une vielle jeune fille mais qui ne paraît pas l'être ! Une lignée de maris sera proposée. Ils sont choisis dans le répertoire du comique, afin de créer des situations hilarantes. Un boucher bedonnant, un vendeur veuf, un riche barbu ronfleur, tous sans attraits ni qualités, juste ce qu'il faut pour amuser la galerie spectatrice. Le plus amusant est l'homme, un Salaheddine Benmoussa, agréable à suivre dans son rôle. Tout retombe sur sa tête, sa bonté et sa naïveté sont mises à dure épreuve. Mais voilà que cette vie s'estompe. Le film fait un saut radical et investit une autre ville, un autre univers : Tanger. Cette ville revient est souvent cité, surtout ces derniers temps, dans nos films. Le film s'essaie à la confrontation et utilise ce qu'offre la ville pour créer de nouvelles situations hilarantes. Il jette l'oncle dans le monde des harraguas, dans une estafette de police, ainsi de suite. Le saut est dicté par les enfants, qui sont modernes et enjoués et vont entraîner l'oncle dans d'autres aventures. Un autre groupe de personnages entrent en action, notamment un jeune musicien sénégalais qui va s'enticher de la jeune fille. Celle-ci le lui rend bien. Débute alors une série de rencontres et séparations, de placements de gags ici ou par là. L'embarras est que les événements souffrent d'une cohésion nécessaire et d'un naturel bienvenu dans ce genre de film destiné à faire rire et amuser. Trop d'ajouts et de personnages secondaires. Le spectateur habitué au comique télévisuel ces dernières années se retrouvera sûrement dans ce long-métrage léger. Familial, plaisant, tournant autour des problèmes de la famille, sans prétendre envoyer un message ni être un film intime, ni d'idées comme ça a été le cas lors de la première partie de la carrière du réalisateur. Enfin autre temps, autre films !