Benabdellah : Le succès du programme de «villes sans bidonvilles» ne signifie pas l'éradication définitive du phénomène Roukbane : le problème des constructions menaçant ruine ne concerne pas le MHUPV tout seul Doukkali : les progrès en matière de lutte contre les bidonvilles ne doivent pas occulter la gravité du problème dans les métropoles comme Rabat Hajir : accorder davantage d'intérêt à l'habitat économique en milieu rural Les réalisations accomplies avec succès dans le cadre du programme «villes sans bidonvilles» ne signifient guère que l'on va totalement mettre fin à un phénomène, difficile à contrôler en raison notamment de l'amplification de l'exode rural, selon le ministre de l'Habitat, de l'urbanisme et de la politique de la ville. Réagissant aux commentaires et interrogations des membres de la commission de l'intérieur, des collectivités territoriales, de l'habitat, de l'urbanisme et de la politique de la ville, réunie récemment pour débattre du budget sectoriel de son département, Nabil Banabdallah a indiqué que le Maroc a réalisé certes des progrès encourageants en matière d'avancement du programme «villes sans bidonvilles», qui ne signifient guère que l'on va se débarrasser définitivement des bidonvilles au Maroc. Tant que l'exode rural se poursuit, le problème des bidonvilles, de l'habitat insalubre et clandestin va continuer, a-t-il laissé entendre, rappelant que l'exode rural trouve son explication dans les difficultés d'ordre économique et social qu'affrontent les populations rurales, qui émigrent à la recherche d'une vie meilleure dans les villes. Les efforts déployés par le Maroc en matière de lutte contre l'habitat insalubre lui ont permis d'occuper la première place en termes de résorption des bidonvilles, selon le Programme des Nations unies pour les établissements humains, plus connu sous le nom de ONU-Habitat, a-t-il affirmé, appelant à procéder à une évaluation de la politique poursuivie dans ce domaine pour l'insérer dans une stratégie plus globale visant à intégrer les couches démunies dans leurs tissus urbain, rural ou dans les centres intermédiaires. Ces progrès ne doivent pas pour autant occulter les difficultés pour le Maroc de mettre fin au phénomène, car tant que l'on ne maîtrise pas l'exode rural qui se poursuit depuis les années 1960, il est difficile d'éradiquer de manière définitive les bidonvilles, l'habitat insalubre et l'habitat clandestin, selon M. Benabdallah. Les villes, destination de cet exode rural incontrôlable, ne sont pas suffisamment équipées et sont incapables d'accueillir tous les migrants, comme c'est le cas à Casablanca, Kénitra, Fès et Meknès, a-t-il rappelé, notant que malgré cela, nombre de villes seront bientôt déclarées sans bidonvilles comme l'avait précisé le ministre dans son exposé devant la Commission. Il a souligné dans ce cadre le rôle de l'habitat social, qui a permis à des milliers de citoyens d'accéder au logement, ajoutant que la lutte contre l'habitat anarchique requiert davantage de fermeté pour rétablir l'autorité de l'Etat et que la démolition des constructions anarchiques ne doit pas constituer l'unique approche à poursuivre. Pour faire face à cette problématique, il est nécessaire de renforcer l'offre de développement des régions, procéder à la réforme des règles urbanistiques, maîtriser la situation foncière, ouvrir et équiper de nouvelles zones urbaines, mettre fin à la spéculation immobilière et foncière et rechercher des solutions appropriées aux problèmes des populations rurales dans l'objectif majeur de maîtriser l'exode rural vers les villes. Evoquant le cas des tissus anciens menaçant ruine, le ministre a fait savoir que son département va s'attaquer de manière plus énergique au problème à travers la mobilisation des moyens supplémentaires du Fonds de solidarité, la création d'une Agence dédiée à toutes les constructions menaçant ruine et de l'Agence spécialisée dans le renouvellement urbain. Intervenant dans le cadre du débat, ouvert à l'issue de l'exposé du ministre, le président du groupe du Progrès démocratique à la Chambre des représentants, Rachid Roukbane a relevé que le PLF 2013 a consacré aux secteurs sociaux - dont fait partie celui de l'habitat, de l'urbanisme et de la politique de la ville - des crédits conséquents, en dépit de la conjoncture économique et financière difficile du pays. Evoquant la situation du secteur, il a estimé nécessaire pour les services de l'Etat de renforcer la convergence de leurs actions respectives, d'intensifier la lutte contre la prévarication et la corruption qui rongent le secteur et de doter le ministère de l'Habitat, de l'urbanisme et de la politique de la ville de ressources humaines nécessaires pour lui permettre de jouer pleinement son rôle en matière de contrôle, d'inspection et de lutte contre la spéculation et la corruption. Il s'est par ailleurs arrêté sur l'effort déployé pour résoudre le problème des constructions menaçant ruine, qui concerne, selon lui, différents intervenants, appelant à la promotion de villes de petite et moyenne tailles pour alléger le poids de l'exode rural sur les grandes métropoles, dont il faut désormais maîtriser le développement. Pour sa part, le député Anass Doukkali, du groupe du Progrès démocratique, a souligné que la réalisation des documents d'urbanisme va permettre de mettre fin à l'anarchie et à d'autres phénomènes liés à l'économie de rente et à la prévarication dans le secteur. Il a toutefois proposé de maîtriser l'extension des villes au détriment des terres agricoles fertiles en optant plutôt pour un développement vertical des constructions, relevant que la création d'une agence nationale spécialisée dans le renouvellement urbain vient à point nommé pour se pencher sur cette problématique. Il a ensuite mis en relief les progrès réalisés en matière de lutte contre les bidonvilles, en particulier dans les petites et moyennes villes, rappelant que le problème se pose toujours avec acuité dans les grandes métropoles comme Casablanca et Rabat, qui abrite à elle seule plus de 6.000 baraques. De son côté, le député Fouad Hajir, membre du groupe parlementaire du Progrès démocratique a appelé le ministère à accorder davantage d'intérêt à l'habitat en milieu rural, faisant remarquer que les habitants cherchent surtout à construire des logements économiques dont le coût varie ente 100.000 et 150.000 DH. Il a proposé pour ce faire au groupe Al Omrane d'étendre son action au monde rural et en particulier dans les zones rurales où le ministère de l'Habitat, de l'urbanisme et de la politique de la ville aurait acquis il y a 25 ans, selon lui, des terrains à 50 DH/m2 comme c'est le cas à Tighessaline, province de Khénifra, où il est président du conseil communal. Il a souligné à ce propos que la décision du ministère de l'Habitat, de l'urbanisme et de la politique de la ville de simplifier les procédures d'obtention des autorisations de construire va dans le bon sens, exprimant toutefois ses craintes de voir le Fonds de développement rural dans l'incapacité de remplir sa mission, étant donné que les communes rurales, dont la participation à ce fonds s'élève à 50%, n'ont pas toujours les moyens pour s'acquitter de leurs contributions.